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Burnout de 9


Demilune

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Bonjour à tous,

 

Voilà quelques mois que j'ai découvert l'Ennéagramme et que je parcours régulièrement ce forum. Aujourd'hui je me jette à l'eau avec une première contribution !

Je souhaite témoigner ici du chemin qui, au cours de toute cette année, a conduit ma vie professionnelle à un burnout. Celui-ci a eu lieu début septembre 2013 ; je commence désormais à y voir plus clair, même si je n'en suis pas encore sorti. La connaissance de l'Ennéagramme m'a permis, un peu par l'auto-observation et beaucoup par la réflexion a posteriori, de mieux comprendre les mécanismes égotiques de 9 qui étaient à l'œuvre dans cette situation. Paradoxalement, le fait d'être allé jusqu'au burnout m'a aidé à voir fonctionner mon ego à outrance et m'a fait progresser dans la connaissance de moi-même.

Le contexte

Je travaille comme ingénieur dans la fonction publique. Ayant intégré un grand corps de l'État, j'ai été mis dès mon premier poste dans une position d'encadrement, responsable d'une équipe d'une douzaine de personnes. C'était en septembre 2012. Bien qu'inexpérimenté et très peu formé au management, je suis arrivé sur ce poste avec un enthousiasme véritable. Mon centre instinctif était très présent et j'avais envie de mettre en œuvre plein de projets. La relation aux équipes était importante pour moi et je voulais installer une atmosphère harmonieuse, qui mêle à la fois l'épanouissement de chacun et la compréhension mutuelle. J'exprimais à plein l'orientation du 9. Je me souviens même avoir dit dans les jours qui ont suivi mon arrivée que le soutien était une valeur que je voulais faire vivre dans l'équipe, et qu'en particulier, j'estimais très important d'être disponible auprès des agents lorsqu'ils en auraient besoin. Je précise qu'à cette époque je n'avais absolument pas connaissance de l'Ennéagramme…

Le lent chemin vers le burnout

Dans les premiers mois d'exercice, j'ai fourni beaucoup d'efforts pour faire face aux obstacles que je rencontrais, ce qui me semblait assez normal puisque je découvrais un nouveau milieu professionnel tout en devant trouver mes marques au niveau du management. J'ai commencé à mettre en place quelques principes de gestion dans l'équipe, que je voulais souples et adaptables. Je voulais de cette manière laisser à chacun une marge de manœuvre pour travailler de la manière qui lui convenait le mieux et respecter les différentes personnalités. Certains agents, représentants du centre mental (des 6 et des 7 dans le cas présent), sont alors venus me voir pour obtenir des précisions : ils ne comprenaient pas très bien comment procéder. L'un d'eux a fini par me dire qu'il se demandait si ces règles trop souples n'étaient pas un moyen sournois de le contrôler : puisqu'il y avait une marge de manœuvre, je pouvais tout à fait l'utiliser contre lui. Je constatais que j'obtenais l'effet inverse de celui recherché : alors que j'essayais de préserver la liberté de chacun, certains y voyaient un message ambigu et potentiellement dangereux.

J'ai peu à peu compris que dans ma position de chef, je n'arriverais pas à éviter les conflits puisqu'en envoyant un message d'acceptation, celui-ci pouvait générer les conflits que je voulais justement ne pas provoquer. Mais l'ego a alors fait davantage d'ego. J'ai commencé à ne pas seulement éviter les situations de conflit, mais les situations de risque de conflit. Par exemple, lorsque je considérais qu'il fallait qu'un agent retravaille une de ses productions, je n'osais pas dire clairement ce que j'attendais de lui. J'avais peur d'être trop direct. Est-ce qu'il va se froisser ? Est-ce qu'il va m'en vouloir ? J'avais en fait peur de l'éventualité qu'il puisse mal réagir et je me censurais avant même d'avoir dit quoi que ce soit, alors que dans 99 % des cas, ma demande serait passée comme une lettre à la poste. Dans ces situations, je paralysais mon centre instinctif. Par ailleurs, lorsque mon adjoint me faisait remonter des difficultés dans l'équipe, je tardais à agir puisque je pouvais toujours faire croire que je n'étais pas au courant. Voire à ne pas agir du tout, en espérant que le temps ferait son œuvre, que l'équipe pourrait penser que j'avais oublié le problème — alors qu'il me trottait toujours dans la tête. Je ne me sentais pas honnête dans cette attitude si bien que de plus en plus fréquemment, j'avais de l'appréhension à l'idée de croiser certains collègues dans les couloirs, pensant qu'ils pouvaient me rappeler frontalement les problèmes que je n'avais pas résolus. J'avais pris pour habitude dès ma prise de poste de faire le tour des bureaux chaque matin, ce qui était un vrai plaisir puisqu'il activait mon centre émotionnel et me donnait de l'énergie pour la journée. Au fur et à mesure, cette coutume est devenue pesante car elle présentait le risque de me confronter dès le matin à des revendications individuelles que je ne pouvais pas satisfaire, et qui me minaient par la suite.

J'ai vite vu comment la paresse et l'oubli de soi se manifestaient dans le contexte professionnel. Prenez une situation de travail, a priori non conflictuelle, impliquant plusieurs personnes de l'équipe. Faites-les venir dans votre bureau pour discuter des futures actions à mener. Le premier exprime son point de vue, qui me paraît défendable. Le second réagit alors en disant qu'il pense différemment avec un raisonnement qui a aussi sa cohérence. Je tente alors de reformuler les deux points de vue en montrant qu'ils apportent tous les deux quelque chose et qu'ils peuvent converger (technique très éprouvée de 9 pour faire le grand écart). Le troisième intervient alors pour développer une idée qui n'a rien à voir avec ce qu'ont dit les deux premiers. Là, je commence à être en colère intérieurement : il ne pourraient pas davantage s'écouter pour se mettre d'accord entre eux ? Plus l'échange se poursuit, moins je sais ce que j'en pense et moins j'interviens. Puis vient le moment où ils se tournent tous vers moi : "Alors Tristan, on décide quoi ?" Panique dans ma tête : "Ben… Je sais pas."

Ce qui a été le plus flagrant au cours des mois qui ont précédé le burnout, c'est le basculement de plus en plus fréquent du centre instinctif. Une spirale infernale se met en place. Des problèmes apparaissent, j'y réagis mais ma réaction provoque des conflits. La fois suivante, la paresse me conseille de ne pas avoir d'avis, je réagis plus tardivement et ma décision est moins étayée, ce qui provoque davantage de critiques et d'incompréhension. La fois d'après, je tombe dans la passivité, les problèmes grossissent et me semblent de plus en plus insurmontables. Cela a été particulièrement difficile à vivre pour deux raisons. D'une part, l'incapacité à agir a provoqué la crainte de ne plus être capable d'assumer ma charge de travail. La simple rédaction d'un mail pouvait devenir une épreuve. D'autre part, cette paralysie du centre instinctif me coupait de plus en plus des échanges avec mes collègues, qui ont toujours été, malgré tout, un motif de ressourcement. Alors que j'avais édicté comme principe de garder la porte de mon bureau ouverte quand je n'étais pas en réunion, j'ai fini dans les derniers temps par m'isoler pour ne pas être vu, désespéré, les yeux dans le vide. À cette époque, mon niveau de désintégration était tel que j'ai ajouté à la passion de paresse la passion de mensonge du 3 (je pense être de variante mu, même si j'attends le stage Centres pour confirmer). Non seulement je ne faisais aucun effort pour comprendre ce qui m'arrivait, mais en plus je ne supportais pas de reconnaître que j'étais en train de me détruire : je ne voulais pas renoncer à l'image du jeune cadre sup promis à une belle carrière et à qui tout réussit. J'ai vraiment fait tout pour cacher aux autres mon malaise et mon angoisse de ne plus du tout y arriver.

Je crois que si je n'ai pas craqué plus tôt, c'est grâce à la narcotisation. Celle-ci se manifestait principalement en rentrant chez moi. Vivant seul pendant la semaine, rien ne m'empêchait de m'affaler devant l'ordinateur et de perdre mon temps sur Internet. C'était un soulagement de savoir que chaque soir, j'allais pouvoir décrocher de mes problèmes par ce moyen. Il m'arrivait même parfois d'oublier de manger, manifestation de mon trop faible instinct de conservation, caractéristique du 9 sous stress qui finit par s'oublier et se mettre en danger. Mais au moment de me coucher, je ne pouvais plus narcotiser, et le fait de me retrouver seul avec mes pensées a fini par me donner des insomnies ; évidemment, cela n'a fait qu'amplifier le problème. Au travail, il m'arrivait aussi de narcotiser en remplissant pendant de longues heures le tableau de suivi comptable de l'équipe. Cela me donnait l'impression d'avoir la paix et me permettait de m'isoler, même si je reconnais que je n'étais pas très efficace. J'avais choisi de recopier à la main tous les chiffres de la base centrale dans mon tableau et j'exerçais ma fixation secondaire de perfectionnisme en vérifiant que toutes les cellules du tableur avaient exactement le même format (centrage, police, taille de caractères, etc.). Mon mental était complètement réprimé puisqu'il y avait certainement un moyen d'automatiser tout ce travail, mais le chercher était clairement au-dessus de mes forces.

Quand tout s'effondre

Dès janvier, je vivais au niveau personnel l'oubli de soi. Je ne me soignais pas, ne m'alimentais que par intermittence, renonçais à de nombreuses activités qui me donnaient du plaisir. Parallèlement, je me réveillais chaque matin avec une boule dans le ventre et j'avais perdu toute envie de me lever. J'avais l'impression d'être entré dans un tunnel sans fin où chaque jour était un effort plus important. J'ai fini par me couper totalement de mes émotions et je devenais de plus en plus incapable d'éprouver de l'empathie pour mes collègues ou ma compagne. En découvrant l'Ennéagramme en mars, j'ai pris conscience de la colère intérieure et complètement réprimée qui était en moi : j'en voulais à tout le monde de ne plus pouvoir être présent, de ne plus avoir aucun impact, de m'effacer.

Les congés que j'ai pris en août ont précipité les choses. J'ai touché de nouveau à mon centre émotionnel en m'émerveillant devant la beauté des paysages. En rentrant fin août, j'ai ressenti de nouveau cette angoisse intense qui n'avait pas cessé de me tenailler au cours des mois précédents. Mais j'ai cette fois laissé libre cours à mes émotions, ce qui a produit les trois jours les plus douloureux qu'il m'ait été donné de vivre dans ma vie. J'ai écouté mon corps qui me criait d'arrêter, qui me tiraillait les tripes, qui ne me laissait plus aucun sommeil. Je voulais juste me suicider, juste pour que cela s'arrête, pour cesser ces angoisses et pouvoir dormir.

Deux jours après ma reprise, je vois que je n'ai plus le choix. Je me rends compte que je ne comprends plus du tout ce que je lis, le sens ne parvient plus jusqu'à mon cerveau. J'ai le courage d'aller chez le médecin. Et je parle bien ici de courage, car il m'a fallu d'un seul coup dépasser toutes les limitations de mon ennéatype. Un centre instinctif complètement annihilé, un instinct de conservation peu actif, et le renoncement à une image idéalisée de réussite. Je vis tout à la fois un immense sentiment de culpabilité (comment va faire l'équipe avec tous les sujets que je laisse en plan ?), un énorme soulagement (enfin ça s'arrête !!!) et une pointe de vengeance (c'est bien fait pour eux, ils m'ont fait tout ce mal, qu'ils se débrouillent). Je prends conscience que j'ai atteint un point de non-retour. Plus jamais ça. Il m'a fallu un énorme courage pour franchir la porte du médecin, il est hors de question que je revienne en arrière. L'avenir sera autrement. Je ne sais pas du tout ce qu'il sera, mais il sera autrement.

Le retour progressif vers la sérénité

Le burnout a été un tel bouleversement qu'il a offert à mon esprit un espace inédit de créativité. Du jour au lendemain, je me retrouvais sans activité et je devais organiser mon temps autrement. Tout était à construire, je repartais en quelque sorte d'une feuille blanche. Mon centre instinctif retrouvait un espace sur lequel agir sans conflit, même si sa remobilisation ne s'est faite que très progressivement. J'ai fait deux choses qui m'auraient paru impossibles auparavant : suivre un cours de Qi Gong et rencontrer un psy. Dans un cas comme dans l'autre, ces activités mettaient à nu deux choses qui me sont très intimes : d'un côté mon corps et son expression, son mouvement, de l'autre ma psyché et tout ce qui s'y cache. On dit souvent que le contrôle est une des préoccupations du centre instinctif : c'est vrai. Dans mon cas, ces deux activités me faisaient perdre le contrôle de moi-même puisqu'une personne extérieure pouvait mieux voir que moi ce qui se passait en moi. J'ai longtemps lutté contre cela en évitant de me retrouver dans ces situations. La rupture consécutive au burnout a été une libération vis-à-vis de cette réticence.

Dans les premières semaines qui ont suivi l'arrêt de travail, j'ai eu une très fine connaissance de mes émotions et j'ai vécu des amplitudes émotionnelles très grandes. Je crois avoir à ce moment touché du doigt ce que peut être le monde intérieur d'un 4. J'ai aussi compris la problématique de l'identité propre au centre émotionnel : passant par tant d'états différents, je ne savais plus dire qui j'étais d'une minute à l'autre. Puis en l'espace de quelques jours, cela s'est arrêté. Je pense qu'à ce moment-là, le mécanisme de défense de narcotisation était redevenu fonctionnel. Je n'avais plus d'angoisses, je me sentais beaucoup plus serein et je passais mes journées à ne pas faire grand-chose : c'était redevenu confortable. Une petite séance de piscine, quelques courses, un peu de cuisine, beaucoup d'Internet et les journées s'enchaînaient sans ennui. Autant dans la phase précédente, je développais une vraie activité à me connaître, à m'interroger constamment sur mes ressentis, mes difficultés, autant dans celle-ci je retombais dans la paresse. Je comprends désormais que cette force d'inertie est immense et que je dois me mettre en tension pour sortir de cet état confortable. C'est ma préoccupation de tous les jours et ce n'est pas facile.

 

Je me suis forcé pour venir témoigner sur ce forum, ce n'était pas spontané, mais le stage Ailes que j'ai vécu ce week-end m'y a aidé en sollicitant mon centre émotionnel, que je sais être la clé d'activation de mon centre instinctif.

Bien amicalement,
Tristan

Tristan (91 mu, C=/-, S++/-, X-/+)

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Bonjour à tous,

 

Bienvenue sur ce forum, Tristan, et merci pour ce magnifique témoignage. Sa lucidité et sa clarté sont remarquables… au point qu'elles ne me laissent rien à dire sauf mon amitié, car si je savais les grandes lignes de ce que tu as vécu, je n'en soupçonnais pas l'ampleur.

 

Je suis heureux de te savoir sur la pente ascendante et je suis convaincu que ce burnout ne t'aura pas seulement permis de "progresser dans la connaissance" de toi, mais qu'il est le point de départ d'une intégration durable.

 

Très amicalement,

Fabien

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Cher Tristan,

Juste un petit mot pour te souhaiter la bienvenue ! Cela m'a fait très plaisir de faire ta connaissance lors du stage Ailes et je suis très, très heureuse que tu te sois lancé sur le forum ! Et quel joli pseudo ! Comme Fabien, je comprends mieux en te lisant ce que tu as vécu et il ne me reste qu'à te dire mon immense tendresse et mon admiration pour le remarquable travail sur toi-même que tu as fourni en si peu de temps.

À très bientôt !
Laure

Laure E3 alpha, aile 4/2 , C-- S=/- X++

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Bonjour Tristan, bonjour à tous,

Superbe témoignage.

J'aime bien également le pseudo Demilune qui me fait penser aux habituels et sobres calendriers des bureaux des techno-structures.

L'adjoint est-il effacé, est-il désintégré, ou pire ? :wink: Est-il également 9 ? Il n'entre en scène qu'au tiers du récit.

Amicalement,
Thierry

9 alpha, grande aile 1, petite aile 8, sous-type conservation. Je me reconnais dans l'INTJ du MBTI.

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Bonjour à tous,

 

Merci beaucoup de vos réponses et de votre accueil chaleureux. J'espère aussi, comme dit Fabien, que ce burnout sera l'occasion d'une intégration durable. Même si j'ai conscience qu'il est très facile de retomber dans la paresse, surtout quand les choses recommencent à aller mieux. Dans la mesure où je suis encore sous le coup de cet événement (je n'ai pas encore repris le travail car je ne m'en sens pas encore capable), j'ai de fait une motivation pour continuer à travailler sur moi.

 

Ça me fait plaisir, Laure et Thierry, de voir que vous appréciez mon pseudo. Je trouve qu'il me correspond bien, à la fois parce que je suis toujours un peu rêveur et que regarder la lune m'inspire la sérénité. Par ailleurs, une demi-lune, c'est aussi une fortification et beaucoup de choses dans ma manière d'agir renvoient au désir de se protéger. Le jour où j'aurai atteint suffisamment souvent l'amour de soi et des autres, peut-être que je pourrai oublier cette partie du message !

 

L'adjoint est-il effacé, est-il désintégré, ou pire ? :wink: Est-il également 9 ? Il n'entre en scène qu'au tiers du récit.

 

Mon adjoint est 6 avec une grosse aile 5. C'est une personne très compétente sur son domaine mais je n'ai pas réussi à m'en faire un appui du point de vue de la gestion de l'équipe. Il a toujours été loyal avec moi (c'est quand même la moindre des choses pour un 6 :happy:) à tel point qu'il ne prenait jamais aucune initiative ou décision avant de m'en parler et que je ne lui aie donné mon accord. Quand il vivait la peur et le doute, c'est-à-dire le plus clair de son temps, il me rapportait tous les problèmes dont il avait entendu parler ou qu'il imaginait, ce qui ne faisait qu'accentuer mon malaise. En discutant avec lui, il me semblait que tous les malheurs du monde allaient nous tomber dessus à court terme, que notre équipe allait être condamnée à souffrir sous le coup d'un travail harassant et que le ministère tout entier traversait une crise inédite. Je me rends compte maintenant que je prenais tout ça pour argent comptant alors que pour lui, ce n'était que des pensées parmi d'autres.

 

Son bureau est à l'autre bout du couloir par rapport au mien, ce qui ne facilite pas les échanges. Il aime s'isoler en fermant sa porte mais il est néanmoins extrêmement observateur. Il m'a avoué récemment qu'il avait appris à se "blinder" au cours de sa carrière, car il avait été en situation d'être en contact avec le public pour délivrer des autorisations administratives. En cas de refus, les noms d'oiseau volaient souvent dans son bureau… J'aurais bien aimé de temps à autre qu'il se mette plus en avant mais la fixation secondaire de détachement, bien visible chez lui, l'en empêchait. J'ai eu le sentiment que malgré tous mes efforts, je ne faisais pas partie de son groupe. C'était flagrant car quand il était hors de son bureau, je pouvais être certain de le retrouver dans le bureau d'une autre agente de mon équipe, également 6, avec qui il échangeait beaucoup. J'ai très bien compris qu'ils se protégeaient l'un et l'autre face à cet environnement dangereux en échangeant de précieuses informations destinées à assurer leur sécurité. Est-ce que vous pouvez me dire, amis 6, la manière dont il faut s'y prendre pour arriver à être accepté dans votre groupe ? Dans le cas présent, mon écoute et mes tentatives pour l'amener à parler de lui sont restées vaines.

 

Bien amicalement,

Tristan

Tristan (91 mu, C=/-, S++/-, X-/+)

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Bonjour à tous,

 

Bienvenue Tristan. Moi qui ai peur de manquer de ressources, je me sens émerveillé par tes ressources. Je me sens aussi enthousiasmé par ton travail d'auto-observation.

 

"J'ai commencé à ne pas seulement éviter les situations de conflit, mais les situations de risque de conflit."

Mon père est 9 alpha. Bien que sa santé soit relativement bonne (il a maintenant 82 ans), depuis quelques années, il a très peur de la mort. Il se désintègre. Sa peur et sa suspicion (désintégration en 6) se conjuguent à sa compulsion pour éviter l'ombre du soupçon d'un conflit externe : il veut la paix à tout prix. Quand il est phagocyté par sa compulsion, il lui arrive de s'interrompre au début d'une phrase (transe de confusion) ou de mentir : il est alors sourd et aveugle à ma bienveillance. Sur le coup, je me pétrifie, je me sens accablé par la tristesse. Sa mécanique égotique l'étouffe peu à peu et laisse de moins en moins de place à l'idée supérieure du 9.

 

Celle-ci est pourtant toujours là. Je la sens parfois quand nous sommes tous les deux présents dans la même pièce. C'est la même présence que dans ma petite enfance. C'est dans mon corps.

 

Amitié,

Yves

 

P.S. : peut-être me suis-je trompé. Peut-être n'est-ce pas la mort que mon père craint le plus. Peut-être est-ce de sentir basculer définitivement son centre préféré. De ne plus avoir envie de vivre. Quand il sera mort, il me manquera beaucoup. Comme toi, Tristan, mon père cultive au fond de lui un trésor de ressources. Ce trésor m'émerveille.

Yves (E5 alpha, ailes 4 et 6, C- S= X-/+)
"Attendre d'en savoir assez pour agir en toute lumière, c'est se condamner à l'inaction." (Jean Rostand)

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Bonjour à tous,

 

Est-ce que vous pouvez me dire, amis 6, la manière dont il faut s'y prendre pour arriver à être accepté dans votre groupe ? Dans le cas présent, mon écoute et mes tentatives pour l'amener à parler de lui sont restées vaines.

En attendant l'arrivée de la brigade des 6, il est évident, Tristan, que tu as fait bien involontairement tout ce qu'il fallait pour les paniquer, hésitation et non-prise de décision, là où ils attendaient une communication franche, claire et précise. Du coup, à la peur s'est ajouté la suspicion (J'ai adoré cette phrase : "L'un d'eux a fini par me dire qu'il se demandait si ces règles trop souples n'étaient pas un moyen sournois de le contrôler : puisqu'il y avait une marge de manœuvre, je pouvais tout à fait l'utiliser contre lui.")

 

Était par contre positif de signaler ta volonté d'écoute et de soutien.

 

Après, se pose l'éternel problème de savoir à qui ton adjoint et l'autre agente 6 étaient loyaux. À toi, vraiment ? Au poste que tu occupes ? À ton prédécesseur à ce poste ? À leur métier ? Au ministère ? À l'État ? À autre chose ? En rentrant dans une administration, il y a beaucoup de chances soit de rencontrer un peu plus de 6 que la moyenne, soit que le type 6 imprègne la culture1. Tenter de déterminer la vraie loyauté principale dès les premiers entretiens est alors indispensable, même si le 6 n'en est pas toujours conscient avant l'apparition d'un problème.

 

Très amicalement,

Fabien

 

1 Les ennéatypes 6 et 9 sont, à ce jour, les plus communs dans les cultures des administrations françaises, ce qui n'exclut pas bien sûr d'autres possibilités. Quand on rentre dans une organsation, quelle qu'elle soit c'est toujours une bonne idée d'essayer de déterminer son ennéatype et son positionnement sur la Spirale Dynamique (cf. respectivement stages Entreprise et SD).

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Bonjour Tristan,

Quelle clarté dans ton témoignage ! Je l'ai lu avec beaucoup d'intérêt et admire la précision avec laquelle tu nous relates ton auto-observation et nous fais partager ton ressenti.

Étant une 6, je peux essayer de me mettre à la place de ton adjoint. D'après ce que tu nous dis, il t'est loyal. Et effectivement, en attirant ton attention sur les problèmes qui pourraient advenir, il te prouve sa loyauté : il te met en garde contre ce qui POURRAIT mal tourner. Or je pense que lorsqu'il vient pour te rapporter "tous les problèmes dont il a entendu parler ou qu'il imagine", ce qu'il attend de toi au fond, ce n'est pas que tu prennes tout pour argent comptant ; il cherche plutôt un échange, qui lui permettra :

  1. soit d'être rassuré car tu lui auras donné de bons arguments pour montrer que ses craintes sont infondées ;
  2. soit, dans les cas où la probabilité que tel ou tel problème survienne est bien réelle, que vous puissiez prendre ensemble les mesures qui permettront de l'anticiper et de le gérer.

C'est un mental, donc :

  • Il échafaude des hypothèses sur l'avenir ;
  • Comme c'est un 6, il se focalise en priorité sur les problèmes ;
  • Enfin il fait son devoir en faisant part de ses doutes à son supérieur hiérarchique, en l'occurrence toi.

Mais à ce stade il est dans la théorie intellectuelle. Par contre le fait que tu prennes ses craintes pour argent comptant a probablement dû leur faire prendre des proportions vraiment inquiétantes à ses yeux.

Par ailleurs il est normal, en tant que 6, qu'il ne prenne aucune initiative ou décision avant de t'en parler. Il aime les choses et les consignes claires et ne veut certainement pas être mis en défaut en outrepassant ses prérogatives. Ce que tu aurais pu faire est définir précisément avec lui son champ d'autonomie : par exemple, quel niveau de budget il peut engager sans ton accord ; ou encore lui donner un objectif précis en lui disant que le choix du process pour y arriver lui appartient.

Et si tu le juges compétent, le lui dire : il ne le sait pas forcément… Le 6 doute aussi de ses propres capacités et sous-estime ses limites. Il est donc important de le conforter dans sa légitimité et dans son travail, en lui disant que tu lui fais confiance, et que s'il a besoin d'échanger sur un point ta porte est ouverte. Un 6 compétent et loyal peut devenir pour toi un appui solide, sur qui tu devrais pouvoir compter.

Voici à chaud ce que je peux te dire, j'espère que cela t'éclairera un peu. Après il serait intéressant aussi de connaître son positionnement sur la Spirale Dynamique.

Au plaisir de poursuivre cet échange !
Amicalement,
Pascale

Pascale – 6 mu aile 7 Cordialité

On a deux vies, et la deuxième commence le jour où on se rend compte qu'on n'en a qu'une. (Confucius)

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Bonjour à tous,

 

Un grand merci collectif pour vos réactions et ce que vous me partagez à l'occasion de cette discussion. Je suis rentré tard chez moi ce soir donc je fais une réponse succincte, la fin de semaine me donnera l'occasion de réfléchir davantage à vos commentaires.

 

"J'ai commencé à ne pas seulement éviter les situations de conflit, mais les situations de risque de conflit."

Mon père est 9 alpha. Bien que sa santé soit relativement bonne (il a maintenant 82 ans), depuis quelques années, il a très peur de la mort. Il se désintègre. Sa peur et sa suspicion (désintégration en 6) se conjuguent à sa compulsion pour éviter l'ombre du soupçon d'un conflit externe : il veut la paix à tout prix. Quand il est phagocyté par sa compulsion, il lui arrive de s'interrompre au début d'une phrase (transe de confusion) ou de mentir : il est alors sourd et aveugle à ma bienveillance. Sur le coup, je me pétrifie, je me sens accablé par la tristesse. Sa mécanique égotique l'étouffe peu à peu et laisse de moins en moins de place à l'idée supérieure du 9.

 

Celle-ci est pourtant toujours là. Je la sens parfois quand nous sommes tous les deux présents dans la même pièce. C'est la même présence que dans ma petite enfance. C'est dans mon corps.

J'ai été vraiment touché, Yves, par ce témoignage. Je suis loin d'avoir l'âge de ton père, j'ai donc du mal à imaginer ce qu'il peut vivre et la façon dont le fait de sentir la mort s'approcher agit sur son ennéatype. Je ressens pourtant beaucoup de douceur dans la manière dont tu le décris, et il me semble que l'amour est encore bien là, même s'il ne s'exprime plus de la même manière. Et j'ai envie de croire, pour moi-même, pour ma vieillesse future, qu'il est toujours possible pour un 9, jusqu'au dernier jour de sa vie, d'atteindre ce sentiment.

 

 

Il est évident, Tristan, que tu as fait bien involontairement tout ce qu'il fallait pour les paniquer, hésitation et non-prise de décision, là où ils attendaient une communication franche, claire et précise.

Ça me paraît maintenant aussi évident que pour toi. Le fait est que je n'ai pas pris conscience tout de suite du besoin de mon adjoint d'obtenir des réponses claires et opérationnelles. Une limite à cela, toutefois, c'est que mon propre N+1, un 7 assez désintégré, a un talent formidable pour laisser planer le flou sur ses attentes à notre égard. N'affichant pas ses priorités, cela lui permet de repasser par derrière pour contredire une décision que j'ai prise au niveau de mon groupe. Ce qu'il a fait plusieurs fois. Donc prendre une décision claire et ferme dans ces conditions, ce n'est pas vraiment facile. Et mon adjoint avait aussi conscience que moi de ce problème.

 

J'ai adoré cette phrase : "L'un d'eux a fini par me dire qu'il se demandait si ces règles trop souples n'étaient pas un moyen sournois de le contrôler : puisqu'il y avait une marge de manœuvre, je pouvais tout à fait l'utiliser contre lui."

Ne t'en déplaise, cette remarque m'a été faite non par un 6, mais par un 7 (à aile 6, je te le concède), qui tenait trop à sa liberté pour prendre le risque que je puisse venir fouiner de trop près dans ses affaires. :wink:

 

Concernant le typage de cette administration et son positionnement sur la Spirale Dynamique, je n'ai pas encore assez de recul pour avoir un avis bien étayé. Je peux néanmoins dire qu'à partir du moment où j'ai appris qu'on pouvait typer les organisations, j'ai immédiatement pensé au type 6 pour mon service. Côté Spirale Dynamique, il y a énormément de BLEU, à un tel niveau que de mon point de vue, c'est étouffant. Petit exemple illustratif :

Plusieurs agents de mon équipe m'avaient fait remonter dès janvier leur souhait de trouver des aménagements de leurs conditions de travail à l'occasion d'un important événement qui devait se dérouler sur une dizaine de jours en juin dans l'agglomération. Étant donné l'afflux prévisible de visiteurs, les déplacements domicile-travail risquaient d'être rendus extrêmement difficiles. La proposition de faire du télétravail et/ou de se rendre dans des bureaux de l'administration plus accessibles que les nôtres avait été tout de suite évoquée. Bien que ne figurant dans le règlement intérieur, ces deux solutions étaient techniquement possibles. J'ai donc relayé cette demande à mon N+1 qui a trainé du pied pour en parler lors du codir. Il n'obtient pas de réponse claire : "Ce n'est pas la priorité du moment", "De toute façon les syndicats ne seront jamais d'accord", et autres arguments destinés à ne pas traiter le problème. Bref, l'affaire s'enlise malgré de fréquents rappels de la part de mes agents, le message s'arrêtant toujours quelque part dans la chaîne hiérarchique, soit à mon niveau soit à celui de mon N+1, selon notre énergie disponible pour nous confronter à l'inertie ambiante. Je note d'ailleurs que mes agents n'ont jamais tenté d'utiliser une autre manière que la voie hiérarchique pour se faire entendre. À une semaine de l'échéance, nous en étions toujours au point mort, et à l'occasion d'une réunion de mon équipe, je me fais mettre sous pression par mes agents qui attendent une réponse, positive ou négative, mais au moins une réponse, et étayée tant qu'à faire. Gros stress pour ma part, car niveau conflit, celui-ci en est un, et j'ai toute l'équipe soudée face à moi. Vue l'urgence, je décide donc, (car à titre personnel, je trouve cette demande totalement légitime), d'envoyer un message au directeur pour lui relayer officiellement notre demande et notre souhait d'avoir une réponse de sa part — ce qui revient à squeezer mon N+1. Au moment où j'écris le mail, mon N+1 passe dans mon bureau et j'en profite pour lui expliquer ce que je suis en train de faire. Je vois alors, chose très rare chez lui, de la colère dans ses yeux, et il me dit d'une voix calme mais qui ne souffre pas de réplique : "Il est hors de question que tu envoies ce mail directement au directeur et que tu contournes ton supérieur hiérarchique. Ça ne fonctionne pas comme ça dans l'administration. TU m'envoies ce mail, que tu adresses à MOI, sur lequel je donnerai MON avis et que JE ferai suivre au directeur. Si tu procèdes autrement, le mail risque de me revenir pour avis et je ne serai certainement pas dans de bonnes dispositions pour y donner une suite favorable." Dont acte. Il a fait suivre mon mail avec "avis très favorable", et rien ne s'est passé. C'est finalement parce que mon N+1 a fait jouer ses relations (il connaissait le secrétaire général d'un service voisin qui avait des bureaux libres) que mes agents ont finalement pu travailler en site déporté, dans la plus grande opacité. L'affaire s'est résolue, sans rire, à deux jours de l'échéance. Je n'ai même pas eu le temps de signer tous les ordres de mission pour donner un semblant d'officiel à tout cela.

 

Étant une 6, je peux essayer de me mettre à la place de ton adjoint. D'après ce que tu nous dis, il t'est loyal. Et effectivement, en attirant ton attention sur les problèmes qui pourraient advenir, il te prouve sa loyauté : il te met en garde contre ce qui POURRAIT mal tourner. Or je pense que lorsqu'il vient pour te rapporter "tous les problèmes dont il a entendu parler ou qu'il imagine", ce qu'il attend de toi au fond, ce n'est pas que tu prennes tout pour argent comptant ; il cherche plutôt un échange, qui lui permettra :

  • soit d'être rassuré car tu lui auras donné de bons arguments pour montrer que ses craintes sont infondées ;
  • soit, dans les cas où la probabilité que tel ou tel problème survienne est bien réelle, que vous puissiez prendre ensemble les mesures qui permettront de l'anticiper et de le gérer.
[…]

 

Mais à ce stade il est dans la théorie intellectuelle. Par contre le fait que tu prennes ses craintes pour argent comptant a probablement dû leur faire prendre des proportions vraiment inquiétantes à ses yeux.

 

Pascale, je pense que c'est tout à fait le genre de raisonnement et d'attentes que pouvait avoir mon adjoint. Je crois qu'il y a ici un problème de hiérarchie des centres. Si j'en reste à mon hypothèse de départ de 9 mu, je réprime le mental. Je sais que ma réaction à son discours était d'abord émotionnelle : je ressentais en direct le plaisir face à une bonne nouvelle (oui, il y en avait aussi !), l'angoisse face à une incertitude, la peur lorsqu'il fallait décider quelque chose allant à l'encontre de quelqu'un… Autant dire qu'il m'arrivait d'appréhender nos points hebdomadaires car j'avais l'impression d'être à la merci des émotions qu'il allait me faire vivre ! Lorsque j'étais bien, je n'avais pas trop de mal à faire le tri et à utiliser mon mental pour objectiver le problème et me projeter avec lui dans une solution. Mais quand je touchais à la désintégration, le mental n'était plus au rendez-vous, et j'étais paralysé car je n'arrivais plus à prendre la distance nécessaire pour circonscrire le problème. Et l'émotionnel en remettait une couche en redoublant mon angoisse. Nous ne fonctionnions plus sur le même canal de communication.

 

Là où je lui trouve une part de responsabilité, c'est qu'il attendait de moi la prise de décision alors qu'il avait plus d'informations que moi (du fait notamment de son expérience) pour trouver une décision juste. En raison, je suppose, de l'avarice de son aile 5, il se contentait de poser le problème sans me donner quelques pistes pour les résoudre (pistes auxquelles il avait bien entendu déjà pensé). Lorsque je lui demandais explicitement, il me faisait part de ses idées, mais lui poser la question n'était pas un réflexe : pour cela, il fallait déjà que je fasse un usage adéquat de mon centre mental, ce qui n'était pas toujours le cas comme je l'écrivais plus haut.

 

Et si tu le juges compétent, le lui dire : il ne le sait pas forcément… Le 6 doute aussi de ses propres capacités et sous-estime ses limites. Il est donc important de le conforter dans sa légitimité et dans son travail, en lui disant que tu lui fais confiance, et que s'il a besoin d'échanger sur un point ta porte est ouverte.

Je l'ai fait. Je n'hésite jamais à dire à quelqu'un que je suis satisfait de son travail quand c'est le cas. Je lui ai d'ailleurs dit très clairement que je lui exprimais ma pleine confiance et que je l'autorisais à prendre l'initiative des décisions quand cela pouvait être utile. Et que de surcroît je le soutiendrai vis-à-vis des décisions qu'il aurait prises, autrement dit qu'il ne prenait pas le risque d'être désavoué par moi. Mais je pense que c'était malgré tout encore trop global pour qu'il se lance. Là où je l'ai vu prendre des décisions, c'est sur le pilotage de sa propre production (il me mettait quand même prudemment en copie du mail qu'il envoyait) mais jamais sur le management du groupe.

 

Au passage, une anecdote assez révélatrice à son sujet qui ne m'a plus donné beaucoup de doutes sur son ennéatype, alors même que je venais tout juste de découvrir l'Ennéagramme. Lors de son entretien annuel, je lui faisais valoir toutes les qualités que je lui trouvais (rigueur, organisation, fiabilité, efficacité, expertise technique…). Puis après que j'ai fini mon laïus, il me regarde d'un air sombre et me dit : "Bon, là tu m'as dit tout ce qui allait bien… Maintenant, qu'est-ce qui ne va pas ?" :laugh:

 

Amicalement,

Tristan

Tristan (91 mu, C=/-, S++/-, X-/+)

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Bonjour à tous,

J'ai adoré cette phrase : "L'un d'eux a fini par me dire qu'il se demandait si ces règles trop souples n'étaient pas un moyen sournois de le contrôler : puisqu'il y avait une marge de manœuvre, je pouvais tout à fait l'utiliser contre lui."

Ne t'en déplaise, cette remarque m'a été faite non par un 6, mais par un 7 (à aile 6, je te le concède), qui tenait trop à sa liberté pour prendre le risque que je puisse venir fouiner de trop près dans ses affaires. :wink:

 

Pan sur le bec ! Heureusement, il y avait quand même un peu de 6 là-dessous, ce qui me permet de sauver la face ! Même si c'est une parenthèse hors-sujet, c'est sans doute une belle différence entre un 7 à aile 6 et un 7 à aile 8. Personnellement, plus mes supérieurs hiérarchiques étaient flous, plus j'étais ravi : je pouvais faire ce qui me plaisait sans avoir à m'opposer directement à eux, ce que je faisais volontiers sinon. J'ai d'ailleurs un excellent souvenir d'un 9 qui m'a fichue une paix royale.

 

Très amicalement,

Fabien

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  • 3 weeks later...

Bonjour tout le monde,

 

Suite au stage Entreprise, j'ai eu envie d'affiner mon témoignage en revenant sur quelques points caractéristiques du 9 dans le milieu professionnel, qui ont participé à cet état de burnout.

 

Approbation

 

Je suis très sensible aux marques de reconnaissance positive sur mon travail, c'est une façon pour moi de recharger les batteries. J'aime quand ce retour vient naturellement, car l'environnement a remarqué le souci de qualité que j'apporte aux tâches dans lesquelles je m'engage. Je croyais au départ qu'il s'agissait d'un effet de mon aile 1 et d'une fixation secondaire de perfectionnisme, mais au fond, ce n'est pas tant par idéal du travail bien réalisé que par espoir qu'on le remarquera. Je trouverais ça indécent de réclamer cette reconnaissance, c'est pourquoi je fais en sorte de me distinguer en faisant mieux que les autres. J'estime plus ou moins consciemment le niveau de qualité moyen de réalisation d'une tâche dans un environnement, et je me situe au-dessus, quand j'en suis capable. Dès que je vois que je n'en ai pas la capacité, cela génère beaucoup d'angoisse et de frustration, et tend à m'immobiliser : car à quoi bon faire, si mon travail passe inaperçu ?

 

En tant que manager, j'ai très vite constaté la difficulté de n'obtenir aucun retour sur mon travail. Mon équipe n'allait pas me tresser des lauriers quand je faisais les choses bien, ce que je comprends tout à fait. Quant à mon chef 7, il a pour philosophie que la félicitation serait dangereuse, car un cercle vicieux pourrait s'enclencher : "Tu comprends, si je commence à féliciter, les gens vont finir par attendre systématiquement que je les félicite, ce qui pourrait générer de la frustration." Un bel exemple de rationalisation à la 7 ! :laugh: Bref, je me suis retrouvé à travailler dans le vide, sans savoir si mon engagement était à la hauteur des attentes de la structure. Réprimant le mental, j'ai un problème vis-à-vis de la confiance et je peux dire que plus le temps passait, plus je doutais de ma capacité à assurer mes fonctions. Le cocktail est détonnant : faute de marques de reconnaissance positive, mon niveau d'énergie était faible, ce qui entraînait un effort important pour mobiliser le centre instinctif. Mais l'ego ayant soif de reconnaissance, il impose un travail exigeant qui sollicite aussi beaucoup le centre mental. Si je fais ce travail, j'ai consommé encore davantage mon énergie mais comme je ne reçois pas de reconnaissance, j'ai encore moins confiance, je me dis que c'est parce que je n'ai pas assez bien fait que la reconnaissance n'est pas venue. Donc l'énergie décroît, l'exigence personnelle croît et tout cela conduit au désespoir. Dans les derniers temps avant mon arrêt, j'avais renoncé à agir sur certains sujets (ou bien à procrastiner comme jamais) car je m'en croyais incapable. Bien évidemment, cet état de fait était grandement inconfortable car l'immobilisation faisait de moi une proie pour les conflits. Ne pas agir, cela finit toujours pas se remarquer et je finissais par manquer d'arguments pour justifier le fait que je n'assumais plus toutes mes responsabilités.

 

Prévisibilité et sécurité / cohérence et logique

 

La prévisibilité est pour moi un facteur très rassurant. Plus je dispose d'éléments objectifs sur lesquels m'appuyer pour comprendre le futur et prendre des décisions, mieux je me porte car je suis moins personnellement impliqué dans ces décisions : je peux me cacher derrière leur rationalité pour ne pas être tenu pour responsable des conséquences. Rien n'est plus stressant que de devoir dire oui ou non quand les deux réponses sont possibles, faute d'arguments sérieux pour faire pencher la balance d'un côté ou de l'autre. Je suis sensible aux avantages et aux inconvénients de chaque option et je sais la plupart du temps qui souhaite l'une ou l'autre de ces options, donc qui va me reprocher ma décision après coup. C'est d'ailleurs souvent ce paramètre qui me fait décider dans un sens ou dans l'autre, connaissant le potentiel de récrimination de mes interlocuteurs. Cela m'insupporte intérieurement car j'en viens à défavoriser les plus "gentils" ou les plus "loyaux" dont j'apprécie la contribution ou l'état d'esprit. Attachant moi-même beaucoup d'importance à la clarté et à la logique, je suis démuni quand on vient me demander pourquoi j'ai tranché dans un sens : la personne avance des arguments logiques (les inconvénients que j'avais identifiés) sur lesquels je ne peux être que d'accord, et je me sens pris en défaut sur ce terrain de la logique. Je n'ai pas assez de courage pour dire, à la manière d'un 8 : "Mieux vaut une décision mauvaise que pas de décision du tout !" Pourtant, c'est exactement cela qui m'a forcé à décider : le fait que l'absence de décision ne peut que conduire à l'aggravation du problème.

 

Dans le cadre de mon poste, la question de la prévisibilité a pris une résonance particulière en raison de mon chef 7. C'est un adepte de la navigation à vue et sa priorité — si tant est qu'on puisse parler de priorité le concernant — change d'une semaine à l'autre. Chaque lundi matin, nous faisons une réunion de département où nous traitons les questions courantes. Son grand plaisir est de discuter de toutes les sollicitations que nous avons reçues (et auxquelles nous n'avons la plupart du temps aucune obligation de répondre) au cours de la semaine précédente. Je crois qu'il n'a absolument pas conscience que lorsque les agents ont déjà pour un an de travail à plein temps (ce qui est le cas de la quasi-totalité des agents de mon équipe), l'idée de prendre de nouveaux projets avec une échéance à trois mois n'a pour nous rien d'enthousiasmant. Je vois déjà les aménagements du plan de charge, les clients à contacter pour leur annoncer du retard, les agents qui vont râler parce qu'on les prend pour des girouettes, etc. Mon chef, lui, voit une belle idée à explorer et comme notre mission est de défricher des sujets mal connus, il trouve ça très intéressant, formidable et ne comprend pas que nous (les chefs d'équipe) ne partagions pas son enthousiasme. Le problème, c'est que, contrairement à ce qui est dit des 7, celui-ci revient à la charge sur la majorité des projets car il a une mémoire d'éléphant et comme ce n'est pas lui qui gère les problèmes ensuite, il n'y voit que le plaisir d'imaginer le beau rapport qu'on pourrait produire et dont il pourrait se vanter à l'extérieur. Dans cette histoire, je joue le rôle de courroie de transmission et je supporte très mal de devoir relayer un message aussi flou et mouvant d'une semaine à l'autre. Mon adjoint 6 est le premier à venir me demander des précisions sur les attentes du chef, que je suis bien en mal de lui fournir. Dans cette situation, je suis forcé de faire face au conflit car soit je ne relaie pas l'idée du 7 à l'équipe et je sais qu'il m'en reparlera, voire ira s'adresser à mes agents directement sans m'en parler (bonjour le cafouillage…), soit je relaie l'idée et je me trouve confronté à l'agacement de mes agents qui me donnent avec force détails tous les problèmes que soulève la réalisation de cette idée dans les délais impartis. J'ai particulièrement mal vécu ces situations qui se reproduisaient en permanence et comme je ne voyais pas de marge de manœuvre pour m'en sortir, je concevais beaucoup de ressentiment pour ce chef. :angry:

 

Temps

 

Avoir le temps et prendre le temps de réfléchir, de maturer une décision, d'en considérer les différents aspects, est pour moi quelque chose d'essentiel. Je n'envisageais pas de décider sans avoir interrogé les diverses parties qui n'étaient pas toujours disponibles au même moment, ce qui ne faisait que retarder le moment de la décision. Face à l'urgence, j'avais l'impression de trahir mes agents si je ne les avais pas consultés auparavant. Le fait de manquer de temps me conduisait paradoxalement à être moins efficace car, sentant que je ne pourrais pas faire les choses de la manière qui me convenait, mon centre instinctif se paralysait. Et j'étais particulièrement incapable de cerner mes priorités, si bien que je me consacrais à des tâches secondaires pour me donner bonne conscience (je n'ai pas le temps de faire le plus urgent, j'ai déjà du travail) et avoir un argument à disposition au cas où on viendrait me demander pourquoi je traînais. Lorsque j'étais mis sous pression d'agir par mes agents, cela était une grosse angoisse car je me trouvais face à deux mauvaises options : soit rentrer dans le conflit en répondant que toute urgente que soit leur demande, j'avais besoin de temps pour réfléchir à la solution à apporter, soit décider à la va-vite, prendre le risque de me planter et être mis en défaut sur le manque de rationalité de ma décision.

 

Je me souviens d'une fois où mon chef 7 avait sauté en une matinée sur une TRÈS grosse affaire, en l'occurrence l'engagement de mon équipe sur un projet de recherche national, qui allait, vus les montants affichés, occuper un des mes agents pendant 9 mois. J'étais sidéré qu'on puisse prendre une décision si importante si vite, sans considérer sérieusement les conséquences de celle-ci. Non seulement j'ai à peine été consulté, mais en plus le seul agent qui aurait été capable d'assurer ce travail commençait à prospecter pour faire une mobilité de poste. Il m'a d'ailleurs annoncé une semaine plus tard qu'il avait trouvé un poste à sa convenance et qu'il s'en irait dans quelques mois. Je me suis donc retrouvé avec cette affaire sur les bras dont je ne savais pas quoi faire : incapable de prendre du recul sur ce problème, je ressentais de l'angoisse à chaque fois que j'y repensais et j'étais paralysé faute de trouver une issue convenable. Même si je n'en ai rien dit, j'étais très en colère contre la précipitation de mon chef qui ne respectait pas mon besoin de prendre le temps de réfléchir avant d'agir.

 

Au demeurant, j'étais en permanence distrait dans mon travail par des sollicitations de toute sorte (mails, téléphones, passages à mon bureau), et cela a contribué à compliquer ma gestion du temps. Je sautais d'une activité à l'autre, jusqu'à traiter trois ou quatre choses en parallèle en zappant toutes les trente secondes lorsqu'une idée me venait sur l'un des autres sujets. Il n'y avait rien de pire niveau concentration et à force, je finissais par me demander si j'avais fait quelque chose de mes journées. D'une certaine manière, j'en venais à apprécier les réunions car, même si ce n'était pas toujours efficace, nous nous concentrions sur un seul sujet.

 

Globalité

 

Je ne pensais pas que ma tendance à donner des directives générales à mes agents était un effet de ma compulsion. Mon ego me laissait penser qu'ainsi, je laissais à chacun la liberté de mettre en œuvre les moyens qui lui sembleraient les plus appropriés pour parvenir à l'objectif. Lorsque j'ai réalisé les entretiens annuels, j'ai donné des "orientations" et non des objectifs avec des critères précis d'atteinte de ces objectifs, en tenant le discours suivant : "Voilà la direction que je veux que tu suives, les circonstances de cette année feront que tu progresseras beaucoup dans une dimension et très peu dans une autre, c'est pourquoi je ne souhaite pas être trop précis dans les résultats à atteindre dans un an car je ne voudrais pas te pénaliser alors que tu auras sincèrement contribué à avancer dans cette direction." Vous n'êtes pas convaincu, vous ? :happy:

 

Bien amicalement,

Tristan

Tristan (91 mu, C=/-, S++/-, X-/+)

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Bonjour à tous,

 

Tristan, en lisant ton témoignage, je mesure mieux l'impact que peut avoir le manque de confiance en soi des 9 mu. Ce manque de confiance accroît le besoin de reconnaissance lié au centre émotionnel et peut induire une dépendance. Conjugué au manque d'espérance, il fragilise tout un équilibre. Tu as travaillé à te connaître et conscientisé ces phénomènes. Les 9 mu que j'ai côtoyés ne l'ont pas fait. Ton témoignage éclaire leurs tendances au défaitisme, à l'étiolement soudain, comme s'ils se noyaient tout à coup dans un brouillard épais, qu'ils n'expliquent pas. Ton message m'aide — plus qu'eux-mêmes, hélas ! — à mieux les connaître.

 

Amicalement, :bye:

Yves

Yves (E5 alpha, ailes 4 et 6, C- S= X-/+)
"Attendre d'en savoir assez pour agir en toute lumière, c'est se condamner à l'inaction." (Jean Rostand)

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  • 1 month later...

Bonjour à tous,

Voilà deux semaines que j'ai repris mon travail. J'ai envie d'utiliser cet espace pour faire le bilan des transformations qui m'ont permis de revenir sur mon poste et faire une introspection sur ces premiers jours de retour au travail. J'y trouve une nécessité pour moi-même, car le fait de coucher par écrit les expériences de ces dernières semaines m'oblige à les analyser et à les hiérarchiser, ce qui contrebalance ma passion de paresse. Je m'excuse par avance de la longueur de ce message, il me permet vraiment de mettre au clair ce qui s'est passé au cours de ces derniers mois et ce n'est pas toujours facile d'être juste tout en étant économe en mots !

Le chemin de la transformation : faire face aux doutes et à la confusion

L'état de choc consécutif au burnout a duré environ un mois, jusqu'à début octobre. Comme je le décrivais dans mon premier message, j'ai vécu des moments d'instabilité émotionnelle, avec des alternances de félicité et de désespoir dont je me sentais complètement dépendant. Puis lorsque l'ego est redevenu fonctionnel, j'ai retrouvé mes marques de 9 en étant d'une humeur plus égale et en narcotisant beaucoup tout le long de mes journées sans activité. Cela a marqué le début d'une période plus longue, qui s'est prolongée jusqu'à la fin de l'année 2013. Aujourd'hui, le recul me permet de dire que c'est au cours de cette période que j'ai mis en place les ressources internes qui ont rendu possible mon rétablissement, mais sur le coup, je n'avais pas du tout la capacité de m'en rendre compte. Au contraire, je vivais une impression de confusion car je ne voyais pas du tout de quelle façon j'arriverais à me sortir de cette situation.

Déjà, je dois remercier chaleureusement mon ego : sa présence au cours de cette période m'a donné l'assise nécessaire pour faire les démarches qui m'ont permis d'évoluer. Cela ne signifie pas du tout que c'est l'ego qui a été le moteur de mon évolution ; l'image qui me vient à l'esprit est celle d'une peinture : l'ego est la couleur de fond, suffisamment claire pour donner envie au peintre de représenter quelque chose dessus. Pour moi, le confort et la sécurité apportés par l'ego, le cadre familier qu'il me donne, ont été nécessaires pour lancer des actions inédites visant à sortir de cette ornière : en plus de consulter un psychothérapeute, j'ai décidé de travailler avec Patricia qui m'a proposé d'engager un processus de pardon sur mon environnement professionnel. Chacun de ces temps propices à la réflexion (auxquels j'ajoute la pratique hebdomadaire du Qi Gong et de la natation) me permettaient de sortir momentanément de mon état habituel de paresse et de narcotisation. Comme des coups de pinceau furtifs, des jaillissements sur la calme toile de fond de l'ego.

En tant que 9 mu, cette situation me paraissait finalement plutôt agréable. Pas de contraintes, pas de sources de conflit, la liberté de faire ce que je voulais quand je voulais. L'émotionnel en support vivait avant tout dans le présent, et appréciait de ne plus subir les angoisses répétées qui avaient miné mon moral avant mon arrêt. Le mental réprimé ne se préoccupait pas beaucoup du futur, et ce d'autant plus que j'avais la recommandation de mon médecin traitant et du médecin du travail de prendre le temps qu'il faudrait pour me remettre. La perspective d'une reprise forcée n'a donc jamais été réellement présente, ce qui me permettait de ne pas imaginer d'échéances désagréables et d'en concevoir de l'angoisse. Je dois dire que j'avais absolument besoin de cette assurance, même si je la présente aujourd'hui comme confortant mon ego. Être libéré de cette préoccupation laissait la place pour d'autres réflexions, plus constructives.

Pourtant, dire que j'ai perçu cette période comme la traversée d'un océan de tranquillité serait inexact. Deux événements m'ont obligé à sortir du confort de l'ego. Le premier événement est lié à ma compagne 6 qui, pendant les vacances de la Toussaint, a réellement pris conscience de ce que je vivais. Son mental a tout de suite envisagé le futur et s'est posé la question que je ne voulais pas voir : mais comment tu vas t'en sortir ? Elle a forcé mon mental à s'activer et à reconnaître que la situation que je vivais ne pouvait être que transitoire. Cette projection vers l'avenir, que ma compagne teintait de sa passion de peur, m'a tout à coup mis très mal à l'aise. J'étais certainement beaucoup moins inquiet qu'elle mais son malaise ne pouvait me laisser indifférent et je fusionnais avec elle dans cet état. Le deuxième événement a été l'annonce de la division de mon salaire par deux au moment où j'allais atteindre les trois mois d'arrêt. Mon instinct de conservation, faible en général, s'est d'un coup emballé et m'a convaincu qu'il fallait sortir le plus vite possible de cette situation. Je parle bien d'un instinct C+ et non C= dans la mesure où je n'étais pas encore pris à la gorge d'un point de vue financier, ayant engrangé un peu d'épargne et pouvant compter si besoin sur le soutien de ma compagne. Ces deux événements ont finalement eu un impact positif puisqu'ils ont mis mon ego en déséquilibre à un moment où il était suffisamment bien installé pour encaisser le coup. J'ai progressivement considéré comme nécessaire le fait de me fixer l'horizon d'une reprise, sans pour autant savoir précisément à quel moment elle interviendrait. Certaines angoisses sont revenues à cette occasion, mais cela contribuait silencieusement à mon processus de transformation.

En confrontant, d'une part l'objectif de devoir reprendre, et d'autre part l'analyse que je faisais de ma situation, je ressentais une grande confusion et beaucoup de doutes. Car ma vision était la suivante : je n'avais aucune perspective positive à l'idée de reprendre le travail, je me sentais trop faible pour assumer le poids des responsabilités de ce poste, je ne voyais pas où je pourrais trouver la force d'affronter les personnes "qui m'avaient fait tant de mal". Je faisais le constat que mes ressources étaient bien trop limitées pour faire face aux exigences que me demanderaient une présence quotidienne dans ce milieu professionnel. Cela n'aurait pas été un problème en soi si j'avais vu chez moi les signes d'une amélioration, par petites touches. J'aurais alors simplement laissé le temps au temps, et au moment où les ressources auraient été suffisantes, j'aurais repris le travail. Cela paraissait simple, logique. Sauf que dans la réalité, je ne ressentais pas du tout cela. Je ressentais plutôt une stagnation de mon état et du niveau de mes ressources. Les problèmes que je me représentais avaient toujours la même résonance en moi, ils me semblaient indépassables. J'étais d'autant plus mal à l'aise qu'il me semblait devoir donner des gages d'amélioration aux personnes qui me suivaient, et notamment à mon médecin traitant que je voyais tous les mois. Je voulais croire à un processus de rémission continu dont je ferais état à intervalles réguliers. Pourtant, la réalité était que d'un mois à l'autre, je me sentais toujours aussi incapable de reprendre le travail, et je ne savais plus comment faire passer simultanément les deux messages : "je vais mieux" et "je ne peux pas reprendre mon travail". J'ai consciemment perçu dans cette attitude la marque d'une désintégration dans le mensonge du 3. Je voulais "réussir" ma guérison comme j'avais voulu "réussir" mon poste. Il se trouve que ces sentiments étaient particulièrement présents début décembre, au moment où j'entamais la phase instinctive du processus de pardon avec Patricia. Je me souviens avoir été dans des états de très grande colère intérieure car je ne parvenais pas à réaliser les exercices qu'elle me proposait (double dissociation, désactivation d'ancres…), or ces exercices visaient justement à dépasser les angoisses que j'associais à certaines situations vécues à mon travail. Cela ne faisait que renforcer mon impression de stagner et augmentait mon inquiétude vis-à-vis de l'objectif que je m'imposais de devoir reprendre. Patricia a eu l'intelligence de s'en rendre compte et de faire dialoguer ma colère et mon inquiétude au début d'une séance, tout en appelant ma "partie créative" à faire émerger ses propres solutions. Rétrospectivement, je crois que ce moment a eu un impact très fort sur mon inconscient et qu'il m'a permis de dépasser cette barrière que mon esprit se mettait à lui-même.

Il semble qu'il faille "laisser le temps" aux 9… Je l'ai constaté très clairement sur mon cas, même si j'ai eu du mal à l'accepter. Car en apparence, il me semblait que rien ne se passait et j'étais perdu entre l'impression d'aller plutôt bien (état confortable de mon ego) et d'être totalement incapable de revenir au travail. Je ne manquais d'ailleurs pas d'osciller entre ces deux pôles : je me reprochais souvent de "me laisser vivre", ce à quoi je répondais par une panique intérieure qui me disait que je n'avais pas les moyens de faire face à ce monde hostile. Mais il ne s'agissait que d'une apparence. En profondeur, des mécanismes de transformation étaient en train de se mettre en place, totalement invisibles à ma partie consciente. Ce qui, en tant qu'instinctif préféré, était particulièrement difficile à supporter : je voulais du tangible, de l'action, du concret ! Ma question récurrente était "que fais-tu donc pour aller mieux ?" et j'attendais de pouvoir afficher les résultats. Une amie 1 que je voyais régulièrement me posait souvent cette question, et je me trouvais bien en mal de lui répondre. Je percevais à travers elle le besoin de mon centre instinctif qui disait, dans les termes que je lui prête : "Bouge-toi le cul !!!" Et pourtant, la réalité était toute autre, puisque, loin d'être continu, mon processus de guérison a fait surface d'un coup : après ces longs mois de latence, les choses se sont éclaircies en l'espace de quelques petites semaines.

Le basculement : quand l'évidence se révèle à moi-même

Début décembre, je me fixe l'objectif de reprendre au début de l'année 2014, même si à ce moment-là, j'ai des doutes très forts sur ma capacité à reprendre. Je me dis (et je l'annonce à mon médecin) que j'ai besoin de tout le mois de décembre pour mettre en œuvre les exercices que m'a recommandés Patricia, alors qu'au fond de moi, je sais que ce n'est qu'une manière de repousser l'échéance. Mais la présence de cette date butoir oblige mon mental à ne pas rester en sommeil et à secouer l'ego. À l'issue de la dernière séance avec Patricia qui clôt le processus de pardon, je ne pars pas avec les idées claires, d'autant que nous avons manqué de temps pour aborder l'étape 8 : se tourner vers l'avenir. Mon mental en a bien conscience : il me semble que je dispose d'une série d'éléments intéressants, glanés au cours des étapes du processus, mais tout cela ne fait pas émerger un sens global. Cependant, lors d'une des dernières séances, Patricia insiste sur les principaux niveaux de la personnalité (corps, ego et essence) et sur la tendance de l'ego à prendre toute la place dans notre attention à nous-mêmes et aux autres. Et elle me recommande de pratiquer les exercices de méditation guidée de Christophe André. Cette pratique a eu immédiatement une très grande résonance en moi, car le corps et l'essence (qui fonctionnent ensemble par le biais de la méditation) ont d'un seul coup pris un sens intérieur, alors que ces concepts me semblaient jusque là plutôt théoriques. J'ai intuitivement senti que ma solution résidait dans l'accès à l'essence. Tout à coup, je devenais l'observateur bienveillant de mes émotions et de mes pensées, je n'en étais plus le jouet ballotté au gré des soubresauts de mon ego. Tout à coup, je vivais comme une évidence la sérénité que mon orientation de 9 a toujours recherché. Tout à coup, je pouvais accéder à l'idée supérieure du 9, l'amour de soi et des autres : j'étais dans une totale plénitude, j'avais presque les larmes aux yeux en m'émerveillant de la présence du ciel à ma fenêtre, je me sentais empli d'amour pour les personnes que je croisais dans la rue, je les sentais proches de moi, je les considérais comme mes semblables, comme si nous ne formions qu'un seul grand corps (état bien différent de la fusion que provoque mon instinct sexuel). Je détenais enfin là la pièce manquante, celle qui donnait du sens à ma pratique du Qi Gong, qui éclairait ce que j'avais découvert sur moi par l'Ennéagramme. Cette révélation fut un moment extraordinaire, comme je pense qu'on en vit peu dans sa vie.

À peu près au même moment, j'avais repris contact avec mon adjoint 6, pour lui faire part de mon intention de reprendre le travail début janvier. Nous nous sommes rencontrés un midi, et il m'a fait part – comme à son habitude – d'un certain nombre de craintes qu'il avait me concernant (ta longue absence interroge l'équipe, on se demande si tu seras encore légitime pour occuper ce poste, le temps joue contre toi, etc.). En l'écoutant, j'ai ressenti une très forte angoisse, de la même nature que celles qui m'envahissaient avant mon arrêt. Mais peu de temps après, j'ai perçu que cela n'était que la conséquence de ma hiérarchie des centres : l'émotion est là, tout de suite, elle s'exprime dans mon corps, et le mental a du mal à prendre le relais dans ces circonstances (les échanges que nous avons eu au sujet de mon adjoint dans cette conversation ont beaucoup facilité cette prise de conscience). Pour la première fois depuis mon arrêt, j'étais confronté à une situation identique à celles que je rencontrais quotidiennement dans mon travail, mais pour la première fois aussi, j'étais capable de la comprendre et de l'accueillir. Juste après cet entretien, j'ai fait un exercice de méditation pour laisser s'exprimer pleinement mon émotion, en la regardant depuis mon essence et en lui laissant sa juste place : je sais qu'elle est présente dans mon corps, mais ce n'est qu'une partie de ma réalité. Je ne suis pas mon émotion. Je ne me réduis pas à elle. Quelle révélation, quel bonheur aussi de constater que pour la première fois, je disposais de la ressource nécessaire pour faire face à l'une des difficultés majeures de mon travail, et que cette ressource était si belle et si profonde !

La période des congés de fin d'année m'a sollicité sur d'autres fronts et a mis en veille cette réflexion. Ce que j'avais vécu auparavant m'avait néanmoins conforté dans l'idée que je serais capable de reprendre, même si j'avais encore du mal à me projeter positivement dans la reprise. Aussi, il me semblait plutôt clair qu'à l'horizon d'une quinzaine de jours, je serais de nouveau au travail. Mais à l'approche de l'échéance, j'ai commencé à mal dormir, à être pris d'angoisses au réveil. Le changement d'environnement (visite de la famille et d'amis) ne me donnait pas vraiment l'occasion de continuer à pratiquer régulièrement les exercices de méditation. Je me remettais à douter, j'avais du mal à avoir confiance en ma capacité de faire face au travail depuis les qualités essentielles que j'avais découvertes. Je craignais que ça ne soit pas suffisant. L'état de confusion si fréquent chez le 9 mu tendait à reprendre le dessus. Je me reprochais de ne pas savoir ou ne pas vouloir anticiper la façon dont j'allais m'y prendre pour les premiers jours de la reprise. Quel orgueil, finalement, d'imaginer qu'un simple appel à l'essence saurait à lui seul résoudre toutes les difficultés ! Plus je voyais le temps passer, moins je me sentais apte à revenir. Les angoisses redoublaient d'intensité et mon moral redescendait de jour en jour.

C'est un deuxième déclic qui a fait rebasculer les choses, et ce déclic reste pour moi encore très mystérieux. Cela s'est passé en l'espace d'une après-midi. J'avais rendez-vous avec ma psychothérapeute à qui je fis part des angoisses qui me tenaillaient. Elle me renvoie alors une seule question : de quoi avez-vous peur ? J'ai été incapable de répondre. Ma passion de paresse s'était de nouveau installée, en l'espace de quelques jours, sans même que je ne m'en rende compte ! Après avoir longuement erré dans diverses directions, j'en arrive à un point qui me semble central ; j'ai peur de ne pas être compris par mes collègues, j'ai peur de ne pas recevoir de compréhension de leur part vis-à-vis de l'expérience que j'ai vécue. Ce à quoi ma psy me répond que je ne pourrai pas attendre de la compréhension de ces collègues, que c'est une illusion. Et elle fait référence à un concept d'analyse transactionnelle dont nous avons plusieurs fois évalué les implications sur ma personnalité ces derniers mois : l'enfant en moi recherche toujours un parent qui le comprenne et le protège. Je dois adopter la position adulte, qui affirme son point de vue et qui trouve en lui-même les ressources pour se comprendre et se respecter.

Pourquoi cette remarque a fait sens précisément à cet instant, alors que nous en avions maintes fois parlé auparavant ? Je ne le saurai probablement jamais. En tout cas, cette image de l'adulte responsable, je l'ai ressentie en moi pour la première fois, j'ai perçu les ressources qu'elle pouvait m'offrir, la force intérieure qu'elle me conférait, le potentiel de confiance qu'elle portait. Par ce concept, je trouvais une sorte de remède à ma compulsion d'éviter les conflits. Si un conflit arrive, j'ai maintenant la ressource pour me donner l'aide dont j'ai besoin au lieu de l'attendre de la part des autres. Cette ressource, maintenant je la connais, c'est l'essence, et j'ai trouvé un moyen d'y accéder, c'est par le corps (méditation de pleine conscience ou Qi Gong). Mes angoisses et leurs conséquences sur mon moral se sont apaisées en l'espace de quelques heures, et j'ai vécu pleinement les derniers jours de mon arrêt, en profitant de ceux-ci comme d'un dernier cadeau offert par tout ce chemin de transformation, dans l'attente sereine du prochain lundi qui marquerait ma reprise.

Si je regarde ce basculement d'un autre point de vue, il me semble qu'on peut faire un lien avec les vertus théologales étudiées dans le stage Centres. Je co-réprime le mental et l'instinctif, et à ce titre je manque de confiance et d'espérance. Dans la période qui s'est étalée de début octobre à mi-décembre, j'ai profondément manqué de confiance et d'espérance. Je ne pensais pas avoir les ressources pour reprendre et je ne pensais pas que le fait de retourner au travail pourrait être un facteur d'amélioration de mon état. Je pensais que je serais impuissant à me transformer, et la stagnation que je décrivais plus haut ne faisait que renforcer cette impression. Les deux déclics qui se sont produits en l'espace de deux semaines (accès à l'essence et position adulte) ont redonné leur place à ces vertus théologales. L'espérance est probablement celle qui reste la plus fragile car le basculement du centre instinctif peut intervenir à tout moment, dès l'apparition d'un stress. La confiance, en revanche, me semble plus durablement installée. Quant à l'amour, vertu théologale du centre émotionnel, à l'exception des premières semaines de mon arrêt, elle m'a accompagnée tout au long de ce chemin.

Le retour au travail : mettre à l'épreuve mes résolutions

Je suis revenu au travail avec une conviction profonde : mon environnement professionnel resterait le même, l'émotionnel n'y aurait pas sa place, et c'était donc à moi de changer ma perception sur celui-ci. J'ai parfaitement compris que l'ego seul ne peut être dans mon cas une solution durable puisque en étant prisonnier de celui-ci, je suis submergé par mes émotions et par les pensées négatives qu'elles entrainent. Et j'en ai déjà expérimenté l'aboutissement : le burnout. Par contre, en observant ces émotions et ces pensées depuis l'essence, celles-ci n'occupent qu'une partie de ma réalité, elles n'accaparent pas l'intégralité de mon attention.

Pour mettre en œuvre cette solution, j'ai adopté deux principes auxquels je me suis tenu depuis ces deux semaines :

  • Je me réserve du temps pour moi au cours de la journée, pour revenir à ma respiration et à mon corps, pour retrouver cette position d'observateur de mes émotions et de mes pensées, sachant que de nombreuses situations professionnelles sont susceptibles d'activer mon ego dans ses mauvais côtés. Concrètement, je me réveille plus tôt pour avoir le temps de faire quelques mouvements de Qi Gong avant de partir au travail, j'en fais aussi après le déjeuner (série plus brève) et toutes les fois dans la journée où je sens que j'en ai besoin (prendre deux minutes pour fermer les yeux et respirer est toujours possible, malgré les sollicitations). Par ailleurs, j'ai décidé transitoirement de poser deux demi-journées de congés par semaine pour ne pas me retrouver le nez dans le guidon et perdre cette capacité de distanciation chèrement acquise.
  • Lors de tous mes contacts professionnels, j'essaye de pratiquer l'auto-observation directe ou en léger différé pour conscientiser les réactions de mon ego aux informations qu'il reçoit de l'environnement. Je suis aussi attentif aux réactions égotiques des autres, ce qui m'évite de prendre pour moi leurs croyances limitantes. Quand on est entouré de mentaux qui ne cessent d'avoir peur pour l'avenir, c'est une mesure salutaire !

Le premier jour de ma reprise, mon ego m'en a fait voir de toutes les couleurs ! Je me suis rendu compte qu'étonnamment, c'était le centre mental qui était le plus virulent. J'ai très précisément senti la peur de ne pas savoir gérer le moment d'après, de ne pas réussir à m'organiser, de ne pas savoir mettre de l'ordre dans mes priorités, face à la pelletée de sujets dont il me fallait prendre connaissance. Le centre instinctif, quant à lui, craignait de ne rien avoir à faire, et j'ai ressenti aussi l'angoisse du vide (objectivement irrationnelle vu tout ce que j'avais à faire), comme si le centre instinctif allait se retrouver sans matière à transformer. Il m'a fallu beaucoup de volonté pour ne pas succomber à ces messages de l'ego et accepter leur présence sans pour autant les confondre avec la réalité. Ce même jour, j'avais décidé de réunir mes agents pour leur donner quelques informations sur ce que j'avais vécu, ce qui m'avait conduit à cet état de burnout et la façon dont j'envisageais de reprendre. J'avais pris soin de faire appel aux trois centres dans la préparation de mon discours, afin que chacun puisse percevoir au moins une partie du message. J'ai eu au cours de cette allocution un silence religieux que mon ego interprétait comme de la défiance. Le recours à la position adulte a été ma bouée de sauvetage pour éviter d'être submergé par l'émotion. J'affirme ma position, j'exprime mon avis, en acceptant le fait que d'autres ne le partagent pas, et en prenant le risque de déplaire. Je dois confesser une grande fierté (c'est sans doute encore l'ego qui parle, là…) d'avoir réussi à surmonter cette épreuve de cette manière. Au cours des jours suivants, j'ai eu l'impression que le comportement de mon équipe vis-à-vis de moi était exactement comme auparavant, comme si je n'avais jamais été absent. Je pense que c'est le signe le plus tangible de la réussite de cette reprise : mes agents me témoignent à nouveau de la confiance et reconnaissent ma légitimité sur ce poste.

J'ai eu l'excellente surprise de constater qu'au bout de quelques jours, les émotions négatives que me faisait vivre mon ego commençaient à s'estomper face aux situations délicates et conflictuelles. En parallèle, j'ai aussi goûté à quelques petits moments de plaisir liés au travail, notamment par les échanges avec mes collègues. Reprendre contact avec chacun d'entre eux me fait du bien. Même lorsque ceux-ci me font part de problèmes que je vais devoir gérer, j'arrive à faire en sorte que mon mental entende le message, sans que le centre émotionnel ne fasse filtre. Il en résulte beaucoup plus de sérénité intérieure et une plus grande capacité d'attention et d'écoute de ma part. Je ne pensais pas être capable de recevoir ces messages de cette manière ; que c'est reposant ! J'ai confiance en mes ressources et je crois que l'environnement m'offrira le terrain favorable pour trouver les solutions nécessaires.

Malgré ces impressions très encourageantes, je reste en permanence sur le qui-vive car je sais maintenant que mon ego de 9 peut faire revenir la paresse et l'oubli de soi à chaque occasion. Bien des fois, je note, dans la formulation d'une phrase ou dans ma façon d'appréhender un problème, ma tendance à m'effacer au profit des besoins et attentes des autres. Lorsque j'en prends conscience, je rectifie le tir mais lorsque la fatigue s'accumule, cela devient de plus en plus difficile. D'où pour moi l'impérieuse nécessité d'avoir une bonne hygiène de vie et de dormir suffisamment. C'est un cercle vicieux : plus je suis fatigué, plus mon ego prend le dessus et me fait traverser des émotions douloureuses que j'ai du mal à accueillir, et plus je dépense mon énergie dans celles-ci, ce qui ne fait qu'accentuer la fatigue.

J'ai certes conscience d'avoir fait un très grand pas dans le travail vertical en me rapprochant de l'essence et en accédant aux ressources qu'elle procure, mais je pense qu'il y a encore beaucoup à faire sur le travail horizontal (le meilleur fonctionnement de l'ego). Je vois déjà le risque d'être parfois démuni pour gérer certaines situations de conflit car dans le feu de l'action, c'est surtout l'ego qui fonctionne. Même si je sais maintenant prendre du recul après coup, je ne suis pas sûr d'être toujours efficace au moment où les choses arrivent. C'est pour moi un axe de travail futur, sur lequel je n'ai pas vraiment les idées bien claires.

Je réponds – encore très partiellement – à ce problème en effectuant un rééquilibrage de l'orientation intérieure/extérieure de mon centre instinctif. Du fait de mon aile 1, l'orientation intérieure est naturellement plus marquée, ce qui se traduit par une forte exigence vis-à-vis de moi-même et une faible tolérance devant mes propres erreurs et imperfections. J'ai senti ces derniers jours l'instinctif extérieur se manifester à l'occasion de certaines prises de décision, où j'ai tranché sans avoir cherché à prendre l'avis de toutes les parties dans le détail, et en étant assez affirmatif dans l'expression de cette décision. Je ressens cela comme libérateur car de cette façon je prends en compte mon besoin – ici celui de faire avancer les choses au niveau de mon équipe – en acceptant le fait qu'il est légitime, et que les éventuelles protestations de mes agents ne remettent pas en cause cette légitimité.

Tout cela reste encore très fragile, je le sais, et je vais devoir être extrêmement attentif au cours des prochains mois pour consolider ces nouvelles manières de faire et les mettre à l'épreuve de toutes les situations professionnelles que je peux rencontrer. En particulier, je constate très nettement une difficulté propre aux 9 mu : la gestion des priorités. L'émiettement des tâches et du temps, inhérent à ma fonction de manager, me conduit à des transes hypnotiques dont j'ai bien du mal à me défaire. Sauter d'un sujet à l'autre sans même me rendre compte que je n'ai pas terminé le premier conduit à des pertes d'efficacité et me renvoie à une paralysie du centre instinctif. Ne sachant plus ce qui est important pour moi à un moment donné, je tombe dans la narcotisation et j'entretiens la peur de ne plus savoir faire face aux responsabilités qui m'incombent.

Je voudrais conclure en disant à quel point l'Ennéagramme m'a aidé dans cette démarche. L'Ennéagramme a été d'un bout à l'autre une grille de lecture qui m'a émerveillé par sa pertinence, sa profondeur et sa subtilité. Le fait d'avoir suivi, dans un laps de temps réduit, les stages Sous-types, Centres et Ailes, m'a permis d'approfondir bien des dimensions de ma personnalité, en maintenant un aller-retour permanent entre la théorie et l'auto-observation. Et je veux seulement témoigner de la chance qui m'a été offerte de croiser cet outil à ce moment de ma vie.

Bien amicalement,
Tristan

PS : je pense que ce sera le dernier témoignage que je livrerai dans cette conversation. Comme pour me dire à moi-même qu'une page se tourne et que la suite sera une autre histoire. Je ressens à ce moment-même, avec une égale intensité, un grand soulagement et une envie de dire merci à la vie de m'avoir fait vivre cette expérience.

Tristan (91 mu, C=/-, S++/-, X-/+)

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Bonjour à tous,

 

Beau chemin, Tristan ! En lisant ton message, j'ai ressenti du réconfort et de l'espérance.

 

Je pense aussi à mon ancien collègue 9 alpha. Après 21 mois d'arrêt maladies, il vient de reprendre le travail, cette semaine (à mi-temps).

 

Le temps est à l'espérance ! :happy:

 

Amicalement, :bye:

Yves

Yves (E5 alpha, ailes 4 et 6, C- S= X-/+)
"Attendre d'en savoir assez pour agir en toute lumière, c'est se condamner à l'inaction." (Jean Rostand)

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Fabien Chabreuil

Bonjour à tous,

 

Merci effectivement Tristan d'être venu nous raconter la belle fin de l'histoire. Je suis désolé de n'avoir pas eu le temps de te le dire avant.

 

Je m'excuse par avance de la longueur de ce message, il me permet vraiment de mettre au clair ce qui s'est passé au cours de ces derniers mois et ce n'est pas toujours facile d'être juste tout en étant économe en mots !

Ce n'est pas la longueur qui fait la saga ! Détaillé et précis, ton message n'entre pas dans la communication égotique du 9. :bravo:

 

Déjà, je dois remercier chaleureusement mon ego.

Eh oui, l'ego est "mi ange, mi démon" selon la belle formule de Stephen Wolinsky que tu as fort bien illustrée dans cette conversation.

 

Je pense que ce sera le dernier témoignage que je livrerai dans cette conversation. Comme pour me dire à moi-même qu'une page se tourne et que la suite sera une autre histoire.

Tu as raison. C'est important de clore symboliquement certains épisodes de notre vie, comme nous le faisons dans le stage Résilience. Pour aller dans ce sens, je fermerai la semaine prochaine cette conversation, laissant ainsi le temps à ceux qui le désire de t'envoyer un message de conclusion.

 

Très amicalement,

Fabien

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Bonjour Tristan, bonjour à tous,

Juste un petit mot pour te dire que j'ai lu le récit de ton parcours semaine après semaine avec beaucoup d'intérêt, et que je suis vraiment très impressionnée tant par l'étendue que par la profondeur du chemin que tu as parcouru, en ce qui me semble, à moi aussi, "relativement" peu de temps.

Les managers dignes de ce nom ne courent pas les couloirs, et je me dis que tes collaborateurs ont beaucoup de chance. :bravo:

Amitiés,
Marie-Noëlle

Marie-Noëlle - 4α 3 C- S= X+/-

"La vraie faute est celle qu'on ne corrige pas" (Confucius)

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Merci pour ce précieux et très approfondi témoignage au fil des semaines, empli d'espoir et d'espérance.

À bientôt sur d'autres conversations !

E4 α, ailes 5 et 3, C-/=, S-/=, X+/-

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Bonjour à tous,

Juste un mot pour vous remercier de vos réponses tout au long de cette conversation. Plusieurs d'entre vous ont dit que mon témoignage apportait de l'espérance ; pour un 9 dont le risque est sans cesse d'en manquer, je trouve que c'est un beau compliment !

Je voudrais aussi ajouter que la bienveillance dont vous avez preuve dans vos réactions (bienveillance que l'on retrouve plus généralement sur ce forum) m'a aidé à progresser sur le chemin du mieux-être. Du soutien, quelques remarques de bon sens, le partage de vos expériences, tout cela a fait écho pour faire émerger sur certains sujets des évidences que je peinais à trouver tout seul. Et comme il m'était difficile de partager mes problèmes au-delà du cercle des intimes, j'ai trouvé ici une sorte de relais pour m'exprimer en confiance.

Je pense que ce sera le dernier témoignage que je livrerai dans cette conversation. Comme pour me dire à moi-même qu'une page se tourne et que la suite sera une autre histoire.

Tu as raison. C'est important de clôture symboliquement certains épisodes de notre vie, comme nous le faisons dans le stage Résilience. Pour aller dans ce sens, je fermerai la semaine prochaine cette conversation, laissant ainsi le temps à ceux qui le désire de t'envoyer un message de conclusion.

Je n'y aurais pas pensé, mais c'est une bonne idée. Une façon de concrétiser la symbolique, adaptée au fait que nous sommes sur un forum.

Les managers dignes de ce nom ne courent pas les couloirs, et je me dis que tes collaborateurs ont beaucoup de chance. :bravo:

C'est flatteur ; pour autant je pense que certains de mes collaborateurs seraient plus à l'aise avec un manager plus traditionnel. Sans doute une question de Spirale Dynamique : beaucoup d'entre eux sont positionnés en BLEU (comme l'ensemble de la structure) et sont déroutés par mes incursions en VERT qui forcément, ne sont pas très bien comprises et inspirent incompréhension et méfiance.

Très chaleureusement,
Tristan

Tristan (91 mu, C=/-, S++/-, X-/+)

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