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Le Rôle de ma vie
Analyse

Le rôle de ma vie : Aiden BloomAiden Bloom (Zach Braff) : 7

L’identification de Aiden est compliquée par le fait qu’il est en profonde souffrance dans quasiment tous les contextes de sa vie : "Mon père souffre d’un cancer, mes deux enfants sont sur le point d’abandonner l’école, et j’ai pas de travail", sans compter que "Sarah n’est pas très branchée sur mes besoins naturels en ce moment". Cependant, les deux traits de caractère les plus visibles d’Aiden sont son immaturité et son narcissisme, tous deux typiques d’un ennéatype 7 bien désintégré.

À l’enterrement de Saul, il déclare : "Quand j’étais petit, mon frère et moi, on jouait à être des héros. Avec des épées. Nous seuls avions le pouvoir de sauver les autres. Peut-être qu’on mettait la barre un peu trop haut. Peut-être qu’on est juste des gens ordinaires. Ceux que l’on sauvera." Cette prise de conscience n’a lieu qu’à la fin du film ! Le début nous le montre à la table du petit-déjeuner où il est psychologiquement plus proche de Tucker que de Sarah ou même de Grace :

  Tucker : Papa, c’est quoi ton mot de passe ?
  Aiden : [Cela fait quelque temps qu’il s’imagine en superhéros en train de courir dans une forêt et est complètement déconnecté du monde.] Hein ?
  Tucker : [Il articule soigneusement] J’ai dit : “C’est-quoi-ton-mot-de pa-sse ?” [Aiden a du mal à revenir à la réalité.] Papa !
  Aiden : Bordel, mais j’en ai pas la moindre idée.
  Tucker : Bocal à gros mots !
  Aiden : Il va se faire foutre, le bocal.
  Sarah : Aiden !
  Aiden : Le bocal à gros mots, il va se faire foutre.
  Tucker : Foutre, ça veut dire coucher. Tu veux coucher avec le bocal ?
  Sarah : OK. Tucker, ça suffit. Le mot de passe, c’est 1234. [Elle se tourne vers Aiden.] Qu’est-ce qui te prend ?
  Aiden : Le bocal à gros mots, il est plein, regardez. [Il s’adresse à Tucker.] Sachant qu’il est notre unique source de revenus pour pouvoir financer vos études, tu devrais être ravi quand je suis grossier.
  Grace : [Elle entre dans la pièce.] Je t’ai entendu, Papa. Rabbi Perlman dit que ce sont les simples d’esprit qui sont grossiers.
  Aiden : Rabbi Perlman a tellement mauvaise haleine que depuis qu’il le connaît, Dieu se demande pourquoi il s’est pris la tête à créer l’Univers. Chaque fois que Rabbi Perlman prie, Dieu fait : “[Il se pince le nez et agite la main devant sa bouche.] Ah pitié ! Tais-toi, Perlman ! Je t’exauce, je t’exauce.”
  Tucker : [Il éclate de rire.]
  Grace : Si tu peux être grossier, ça veut dire que nous aussi. T’es sûr de vouloir ça ?
  Aiden : Pas de souci.
  Sarah : Non !
  Tucker : Je suis sûr que Grace, elle dira pas de gros mots.
  Grace : [Elle se sent mise au défi, se concentre et se jette à l’eau.] Tête de nœud.
  Aiden : [Ravi.] Ouaouh !
  Sarah : Grace !
  Grace : Papa a dit ça l’autre jour quand un type lui a piqué sa place de parking.
  Aiden : Je l’ai traité de tête de nœud parce que c’était une tête de nœud. Il avait un 4×4 jaune vif. Qui se paye des 4×4 jaune vif ? C’est quoi son truc ? La guerre contre le soleil ?
  Tucker : [Il montre une photo de voiture affichée sur la tablette.] Papa, faut qu’on s’achète cette voiture.
  Aiden : Nous n’achèterons pas d’Aston Martin, mais durant les prochaines soixante secondes, t’as le droit de dire un gros mot. [Grace fait une moue désapprobatrice.]
  Tucker : Alors, poil aux couilles. [Aiden éclate de rire, et Grace se retourne indignée vers sa mère dans l’attente d’une réaction.]

Aiden rêve de devenir comédien et tout le monde, Dieu y compris, doit se plier à son désir : "Qu’est-ce que vous faites de mon rêve ? C’est vrai, Dieu ne croit-il pas en moi et en ma quête de bonheur ?" assène-t-il au rabbin Twersky. Sarah est, par définition, celle qui, plus que tous les autres, doit se consacrer à lui :

  Aiden : T’as envie de quoi alors ? C’est vrai au fond, j’en sais rien.
  Sarah : Ben moi non plus. Tu sais quoi ? J’ai même pas une seconde pour me poser la question parce que je cavale et que je m’arrête jamais, et qui si je m’arrêtais une minute, nos gosses n’auraient rien à manger. Tout repose sur moi.
  Aiden : Je croyais… Je croyais que tu me soutenais, que tu avais envie de m’aider à vivre mon rêve.
  Sarah : Depuis quand notre relation doit-elle se consacrer uniquement à la poursuite de ton rêve ?

"Depuis toujours" est la réponse qu’Aiden, sauvé par un appel téléphonique, aurait dû donner. On remarque d’ailleurs qu’il n’a aucune idée de ce qui peut passionner Sarah. Il pense même qu’elle est heureuse dans son métier alors qu’elle "importe des données dans un tableur" et fait un travail de "scanner" :

  Aiden : J’ai un casting auquel je voudrais vraiment aller.
  Saul : Ces castings, là, quand est-ce que tu vas arrêter ?
  Aiden : Je n’en sais rien. Pas tout de suite.
  Saul : Tu ne peux pas te considérer comme un chef de famille.
  Aiden : Merci.
  Saul : Je sais, on est en 2014. À mon époque, un homme serait mort plutôt que de laisser sa femme s’épuiser au travail pendant qu’il fait le clown.
  Aiden : OK, je fais le clown. Tu oublies un élément très important : c’est que Sarah aime beaucoup son travail. Elle, elle le vit son rêve.

Aiden va donc à une audition pour apprendre qu’il fallait un Afro-Américain pour jouer le rôle qu’il visait et que l’autre personnage disponible était un vieillard hispanique. Il reprend sa voiture, hurle "Meeeeeerde !" en roulant, puis, expression du contrepoids égotique de l’ennéatype (cf. stage Connexions), il se masturbe à peine rentré chez lui. Son père surgit à ce moment-là :

  Saul : Je tombe mal, on dirait.
  Aiden : [Il remet en vitesse son caleçon et se sert de son ordinateur portable comme d’un cache-sexe.] Papa ! Mais qu’est-ce que tu fais là ?
  Saul : Des problèmes dans la chambre à coucher, Aiden ? L’homme a des besoins naturels, et ces besoins doivent être satisfaits.
  Aiden : Sarah n’est pas très branchée sur mes besoins naturels en ce moment, Papa. On a autre chose à penser.
  Saul : Et donc tu as pris les choses en main. Si je puis dire.
  Aiden : [En bon 7, il n’apprécie guère l’humour quand il est tourné contre lui.] Mort de rire. Pourquoi t’as pas payé les frais de scolarité de la yechiva. Des rabbins enragés m’agressent sur les passages piétons. J’ai l’impression de tourner dans un film de zombies orthodoxes.
  Saul : Il faut qu’on parle, mais tu mets de l’ordre dans ta tenue d’abord. J’te parle pas si tu as le pantalon sur les chevilles.
  Aiden : Oh ça va. [Ils sortent tous les deux.]
  Saul : [Le chien de Saul est en train d’uriner sur un des jouets des enfants.] Kugel, non ! Kugel ! Désolé. Je sais que tu le supportes pas. Il est bien éduqué d’habitude.
  Aiden : Si tu as éduqué ce chien pour qu’il pisse partout sauf sur la pelouse, tu as fait un boulot épatant.
  Saul : [Il se tourne vers la piscine sans eau, plein de terre et de détritus divers.] Elle est bien la piscine. Tu cultives quoi, la typhoïde ou l’hépatite. Et la clôture, elle a un souci ? Tu sais quoi, on se croirait un peu à Bombay chez toi.
  Aiden : Le jardin est dans le même état depuis qu’on a emménagé. Tu vas faire le même commentaire chaque fois que tu viens ? J’ai pas reçu un chèque décent depuis la pub contre les pellicules.
  Saul : Et le pire, c’est que tu as toujours des pellicules.
  Aiden : Bon, qu’est-ce qui se passe avec les frais de scolarité, Papa. On avait un accord. Tu avais dit que tu prendrais les frais en charge à condition de pouvoir choisir l’école, et c’est ce qui s’est passé. Maintenant, tu as deux gentils petits enfants pratiquants et bien endoctrinés. Alors ne m’oblige pas à te tanner pour signer le chèque.
  Saul : Le cancer est revenu, Aiden. [Aiden se recule sur sa chaise.] Je voulais pas vous inquiéter tant que j’étais pas sûr.
  Aiden : Mais là, t’es sûr.
  Saul : Là, j’suis sûr, et ça se présente mal.
  Aiden : Ça se présente mal mal ?
  Saul : Y’a des métastases. C’est plus juste dans le poumon, ça se propage.
  Aiden : Merde, ah non.
  Saul : J’ai trouvé une clinique à Malibu. Ils prennent de tes propres cellules souches. Après ils te les réinjectent et t’es comme neuf. Mais je vais devoir tout payer de ma poche.
  Aiden : Et donc ?
  Saul : Et donc, j’ai plus les moyens de payer l’école. Ce qui me reste d’économie, j’ai décidé de le dépenser pour me soigner. Voilà tu as gagné.
  Aiden : Mon père souffre d’un cancer, mes deux enfants sont sur le point d’abandonner l’école, et j’ai pas de travail. J’ai un peu de mal à voir en quoi je peux être gagnant.
  Saul : Les voies du Seigneur sont impénétrables.
  Aiden : Eh oui, particulièrement sur ce coup-là.
  Saul : Ah et puis, j’oubliais. Je vais sûrement être absent un bout de temps. Va falloir que tu t’occupes de Kugel.
  Aiden : [Désespéré.] Oh non, c’est terrible toutes ces mauvaises nouvelles qui tombent d’un coup. On fait quoi maintenant ?
  Saul : Comment ça “on fait quoi ?” ! On va de l’avant. C’est la seule direction que Dieu nous ait indiquée.

Puisque problème il y a, Aiden essaye de le refiler à quelqu’un d’autre, son frère en l’occurrence :

  Aiden : Écoute, j’ai deux problèmes. Il y en a au moins un pour lequel tu pourrais peut-être m’aider.
  Noah : Quoi ?
  Aiden : Kugel.
  Noah : [La réponse fuse.] Dans tes rêves.
  Aiden : Non, j’peux pas élever deux enfants, aller à des auditions, et m’occuper de ce chien.
  Noah : T’oublies tout de suite.
    […]
  Aiden : L’autre problème, c’est qu’il va essayer un nouveau traitement expérimental et qu’il n’a plus assez d’argent pour payer la yechiva pour les enfants.
  Noah : [Il soupire et se lève.] Bon ben, je crois que t’es dans la merde, mon gars. [Il lève la main, paume en avant.] Longue vie et [Il fait un doigt d’honneur à Aiden.] prospérité.
  Aiden : Attends ! T’es sérieux ?

Il faut alors trouver une solution, comme le lui suggère Sarah qui sait visiblement parler aux 7 :

  Sarah : J’peux dire quelque chose qui va sûrement t’énerver.
  Aiden : J’ai hâte, vas-y.
  Sarah : Pourquoi tu leur ferais pas l’école ?
  Aiden : Tu te fiches de moi ? On est quoi ? Des Amishs ?
  Sarah : J’ai fait des recherches sur Internet et y’a tout un mouvement qui va dans ce sens. Dans certaines villes où l’école publique craint vraiment trop, il y a pas mal de parents qui envisagent d’autres options.
    […]
  Sarah : On peut pas payer une école privée, t’as peur de l’école publique.
  Aiden : On est au milieu de l’année scolaire. Tu veux vraiment parachuter ces deux petites boulettes matze endoctrinées dans l’école la plus mal notée du district ?
  Sarah : Je suis d’accord, papa, mais t’as un plan B alors ?
  Aiden : Grace, c’est quoi le mot hébreu pour dire “charité” ?
  Grace : Tsedaka.”
  Aiden : Tsedaka”. Tse-da-ka.

Et donc Aiden va demander la tsedaka au rabbin Twersky en improvisant complètement et en ayant même écrit le mot dans sa main plutôt que de l’apprendre. Ce "plan B" ayant échoué, Aiden se résigne à faire les cours aux enfants, là aussi avec un degré d’improvisation assez hallucinant :

  Aiden : Bien. Mes chers élèves, bonjour.
    […]
  Aiden : Concentrons-nous d’abord sur vos programmes respectifs. Grace, qu’est-ce que tu étudies plus particulièrement en ce moment ?
  Grace : La géométrie.
  Aiden : [Il se met à chantonner.] Géométrie, géométrie, c’est la chanson de la géométrie.
  Grace : [Elle fait une mimique inquiète.]

Le désastre est tel que Grace finit par prendre sa place et par poser les questions. Aiden donne péniblement une bonne réponse sur les angles complémentaires et crie de joie : "Yes !"

Dans la série des plans tordus, celui sur l’essai de la voiture est assez remarquable :

  Aiden : Hello. Mon nom est Marco, et je travaille pour Sean Puff Daddy Dirty Money Combs, et voici les enfants de Puff. Il m’a demandé de venir essayer pour lui aujourd’hui la nouvelle Aston Martin DB9 Volante.
  Vendeur : Est-ce que je peux vous parler ?
  Aiden : Bien sûr.
  Vendeur : Je vous en prie, venez par là.
  Aiden : Soyez sages, les enfants. [Ils se mettent à l’écart.] Je sais ce qui vous tracasse. Pourquoi les enfants de Puffy sont blancs ? La question est pertinente. Y’a tellement de célébrités qui vont à l’étranger adopter des enfants noirs ! Vous savez ce qu’il a fait, lui ? Il est parti en Suisse et il a adopté ces deux esquimaux au lait écrémé.
  Vendeur : [Il rit.] Je sais à quoi vous jouez, là.
  Aiden : Ah bon.
  Vendeur : Vous savez combien de personnes entrent tous les jours et me font du charme pour que je les laisse essayer une de ces petites merveilles ? [Aiden veut essayer de nier.] Je ne tombe jamais dans le panneau.

C’est la deuxième fois qu’Aiden compare ses enfants à des choses comestibles : les "esquimaux au lait écrémé" après les "boulettes matze" !

Tout cela n’empêche pas Aiden d’être persuadé d’avoir un bon mental : "Je crois que je l’avais impressionné avec ma logique.", dit-il parce que Saul l’avait laissé manger non kasher en dehors de la maison. À propos de la sheitel, il rationalise avec Grace : "Tu es tellement jolie qu’à tous les coups, tu serais encore plus jolie sans cheveux qu’avec, et ça foutrait tout le raisonnement en l’air." Même quand il aborde un sujet sérieux, la difficulté du 7 à parler de sa souffrance et son vocabulaire ressurgissent :

  Sarah : Ça va ?
  Aiden : Oui. En fait, non, pas trop. [Soupir.] C’est drôle, on passe toute sa vie à espérer que tout ça ait un minimum de sens, et au final, ça se résume à une question dans un dépliant en papier glacé : que souhaiteriez-vous qu’on fasse de vos ossements ?

Effet de la préférence pour un centre mental intérieur, Aiden a peur du monde extérieur, notamment des gens :

  Saul : Tu as l’intention de leur apprendre quoi ? À faire l’acteur ?
  Aiden : Il y a des sites Web, Papa, je te signale, et il y a des bouquins. C’est juste pour finir le semestre. Ça va le faire.
  Saul : Tu les accables avec tes peurs. C’est pas parce qu’on t’a tabassé à l’école publique que ça leur arrivera.
  Grace : On t’a tabassé, Papa ?
  Aiden : Mais non.
  Saul : Oh que oui.
  Aiden : Non.
  Saul : [Fermement.] Dis-leur la vérité ! [Il se tourne vers les enfants.] Ils s’en sont pris à lui. Avec ses Donjons & dragons, ses films de science-fiction…
  Aiden : C’est arrivé qu’une fois.

La fin du film montre un début d’intégration : il se réconcilie avec son père, il affronte Jerry, et il accepte le travail proposé par Paul.

Identification avancée : Aiden est un 7 μ à aile 6 de sous-type conservation ("Clan").

Le rôle de ma vie : Sarah BloomSarah Bloom (Kate Hudson) : 1

Peut-être le trait égotique le plus manifeste chez Sarah est-il le mécanisme de défense de formation réactionnelle. Sauf de brèves interjections à son mari à Tucker ("Aiden !", "Tucker, ça suffit !", "Non !", "Grace !"), elle est le plus souvent souriante et disponible, et elle fait tourner son foyer sans même s’apercevoir que ses idéaux de couple et de mère ne correspondent pas à ses désirs réels :

  Grace : Je vais prier pour que… Dieu aide Papa à trouver du travail.
  Sarah : Oui.
  Grace : Et que les antidépresseurs d’oncle Noah commencent à faire de l’effet.
  Sarah : Oui.
  Grace : Et que tu sois heureuse.
  Sarah : Mais… Mais, ma chérie, je suis heureuse.
  Grace : Maman… Non, c’est faux.
  Sarah : [Elle regarde Grace et reste silencieuse et vaguement perplexe.]

Peut-être du fait de cette remarque de Grace, elle trouve peu après la force d’essayer de faire comprendre la situation à Aiden. Quand il devient évident que Gabe ne paiera plus l’école juive, elle tente de le prendre au mot sur sa carrière, mais bien évidemment, il n’en tient pas compte :

  Sarah : J’peux dire quelque chose qui va sûrement t’énerver.
  Aiden : J’ai hâte, vas-y.
  Sarah : Pourquoi tu leur ferais pas l’école ?
  Aiden : Tu te fiches de moi ? On est quoi ? Des Amishs ?
  Sarah : J’ai fait des recherches sur Internet et y’a tout un mouvement qui va dans ce sens. Dans certaines villes où l’école publique craint vraiment trop, il y a pas mal de parents qui envisagent d’autres options.
    […]
  Aiden : Si tu veux que je renonce à être comédien, vas-y, dis-le.
  Sarah : Ben, tu devrais renoncer à être comédien.
  Aiden : Je renoncerai pas à être comédien.
  Sarah : On peut pas payer une école privée, t’as peur de l’école publique.
  Aiden : On est au milieu de l’année scolaire. Tu veux vraiment parachuter ces deux petites boulettes matze endoctrinées dans l’école la plus mal notée du district ?
  Sarah : Je suis d’accord, papa, mais t’as un plan B alors ?

Aiden se décide alors à faire l’école à Grace et Tucker, et c’est le fiasco qui était prévisible. Quand Sarah rentre à la maison et découvre les enfants scotchés sur une chaise, elle a du mal à contenir sa colère : "Il faut qu’on remette tout à plat." Elle réfléchit et trouve la stratégie appropriée à un ennéatype 7 : "Je propose qu’on sorte dîner." Le repas terminé, Aiden et elle discutent au bord de la plage :

  Sarah : Chéri, je veux vraiment te soutenir. Je crois… Je crois sincèrement en toi.
  Aiden : Pourquoi le fait de me voir aimer dire du Shakespeare a pu te rendre triste ?
  Sarah : Je ne sais pas exactement. J’étais terrifiée à l’idée que jamais j’éprouverais une telle passion dans ma vie, et je l’éprouve pas, c’est vrai. J’importe des données dans un tableur, Aiden. En réalité, c’est un scanner qui devrait faire mon travail, sauf qu’il y a tellement de bureaucratie à tous les niveaux que personne ne le voit.
  Aiden : Mais un jour, tu le dirigeras ce putain de service.
  Sarah : J’ai pas tellement envie de diriger le service des Eaux.
  Aiden : T’as envie de quoi alors ? C’est vrai au fond, j’en sais rien.
  Sarah : Ben, moi non plus. Tu sais quoi ? J’ai même pas une seconde pour me poser la question parce que je cavale et que je m’arrête jamais, et qui si je m’arrêtais une minute, nos gosses n’auraient rien à manger. Tout repose sur moi.
  Aiden : Je croyais… Je croyais que tu me soutenais, que tu avais envie de m’aider à vivre mon rêve.
  Sarah : Depuis quand notre relation doit-elle se consacrer uniquement à la poursuite de ton rêve ?

Cela ne l’empêche de continuer à "subv[enir] au besoin de la famille pendant que [Aiden] joue", comme le souligne le rabbin Twersky. En attendant que Aiden se décide à grandir, Sarah travaille, travaille, travaille. Comme elle n’est pas émotionnellement impliquée dans son métier, il lui est plus facile d’y manifester la passion de colère de l’ennéatype. Jerry, un collègue lourdingue qui lui tient des propos salaces, fait semblant de faire parler son pénis et l’empêche ainsi de travailler, y a droit :

  Sarah : [Elle essaye de maîtriser sa colère.] Tu peux arrêter de parler. J’ai une tonne de travail aujourd’hui et j’ai besoin de calme.
  Jerry : Tu veux un petit massage ?
  Sarah : [Elle explose.] Est-ce que tu pourrais la fermer un peu ? Tes remarques sont totalement déplacées. On n’est pas à la fac, Jerry. On bosse, c’est un bureau.
  Jerry : Oh ! Tu te la joues Jane Fonda ? Je blague un peu en travaillant, ça va !
  Sarah : Rassure-toi, mais j’en rien à faire de ta queue.
  Jerry : [Il se drape dans sa dignité.] Ma queue n’en a rien à foutre de toi. Qu’est-ce que tu crois ? Eh oui. Désormais, nous t’ignorons.

Elle va se plaindre de l’attitude de Jerry à son patron qu’elle trouve dans son bureau, occupé à regarder des vidéos de chaton sur YouTube. Elle a le droit au conseil que l’on donne habituellement aux ennéatypes 1 : re-lax !

  Sarah : Désolé de vous déranger. Je peux vous parler ?
  Son patron : Oui, oui, bien sûr. Assieds-toi. Qu’est-ce qui se passe ?
  Sarah : Disons que j’ai un petit problème récurrent avec mon voisin de bureau.
  Son patron : Jerry ?
  Sarah : Oui.
  Son patron : Mais… C’est un garçon désopilant.
  Sarah : C’est-à-dire qu’il a une attitude légèrement inappropriée et heu… Je sais que je suis relativement nouvelle et je voudrais pas remettre en cause un statu quo, mais je crois qu’il est temps que je vous informe qu’il me met mal à l’aise.
  Son patron : Oui, je vous écoute. Qu’est-ce qu’il a dit ?
  Sarah : Eh bien il a commencé par dire que chaque fois qu’il ne portait aucun sous-vêtement, ça lui déclenchait des… des demi-érections.
  Son patron : Hum, hum.
  Sarah : Et là, il a fait comme si elle me parlait.
  Son patron : Qui ?
  Sarah : La demi-érection.
  Son patron : Et ça a fait comment ?
  Sarah : Je sais pas. Il a pris une voix haut perchée un peu comme… Comme une voix de fantôme, je dirais.
  Son patron : Oui, mais il n’a pas imité la voix d’un Noir ou ce genre de chose ? Il n’a rien dit de raciste ?
  Sarah : Non, c’était une voix très haut perchée.
  Son patron : [Soulagé.] Merci.
  Sarah : Comme une voix de souris ou, comme je vous ai dit, comme un fantôme.
  Son patron : Comme un fantôme de souris.
  Sarah : D’accord.
  Son patron : Bon, OK. Écoutez Sarah, je sais bien qu’on est pas des gens très conformistes dans ce service, mais je crois que vous avez besoin de vous détendre un petit peu. Personne n’a essayé de vous toucher, et personne n’a donné à son pénis une voix de rappeur. Alors je vais vous dire ce que je vais faire. Je vais déménager Jerry dans un autre box et je vais lui demander de la mettre en veilleuse, mais vous, vous devez promettre de sourire un peu plus. D’être un peu plus Hakuna Matata.
  Sarah : Je ne sais pas ce que ça veut dire.
  Son patron : Ça veut dire : “Vis ta vie sans aucun souci.”
  Sarah : J’ai deux enfants. Je sais que c’est dans Le Roi Lion. Ce que je vois pas, c’est comment ça s’applique a priori au service des Eaux.
  Son patron : Ça s’applique en ce sens que vous devez vous détendre un peu, Sarah. Vous avez quelque chose que tout le monde veut avoir.
  Sarah : Heu… Rappelez-moi de quoi il s’agit.
  Son patron : Un emploi.
  Sarah : D’accord.

Malgré l’agressivité dont Gabe a pu faire montre à son égard lors de leur première visite à l’hôpital, elle retourne le voir et lui fait un habile sermon sur la nécessité de se réconcilier avec ses enfants :

  Sarah : Je crois pas vous l’avoir déjà dit, mais… quand j’ai perdu ma sœur, vous êtes la personne qui m’a le plus aidé. Vraiment.
  Gabe : Ah oui.
  Sarah : Oui.
  Gabe : Je suis content de savoir que j’ai pu être utile, mais je ne me rappelle pas ce que je vous ai dit.
  Sarah : Vous avez dit : “Rien dans la vie ne demande davantage de courage qu’affronter le fait qu’un jour elle s’arrête, et de l’autre côté du chagrin se trouve la sagesse.”
  Gabe : Moi, j’ai dit ça ?
  Sarah : Oui.
  Gabe : C’était pas mal pensé. [Sarah rit.] Et maintenant je suis là et je suis un deuil en devenir.
  Sarah : La sagesse pour moi, ça a été d’arriver à comprendre que les choses qui n’ont pas été dites ne nous lâchent plus jamais. Il n’y a rien que je regrette plus que de ne pas avoir dit à ma sœur à quel point je l’aimais et que je l’avais toujours idolâtrée. Mais on se disait pas ces choses-là parce qu’on n’était pas comme ça. [Long silence.] Et un jour voilà, elle n’a plus été là. [Long silence.] Et j’ai en moi toutes ces choses à dire, et personne à qui les confier.
  Gabe : Mes deux fils savent ce que j’éprouve pour eux.
  Sarah : Vous en êtes sûr, Gabe ?
  Gabe : [Il détourne la conversation.] Je leur ai dit que je voulais prendre ma retraite et j’ai menti. On m’a poussé vers la sortie parce que je n’étais plus à niveau pour la technologie. Ne laissez jamais personne les pousser dehors.
  Sarah : Vous ne le leur avez jamais dit ?
  Gabe : C’est quoi ça ? Une espèce d’ingérence ? Vous êtes venue pour me dire que j’ai échoué en tant que père.
  Sarah : Non ! Non du tout. Vous avez élevé deux garçons qui sont exceptionnels, Gabe. Ils ont peut-être pas toujours de réponse rapide, ni de récompense sur leur cheminée. En fait, aucun de vos fils n’a de cheminée, mais ils sont fabuleux. Ils sont pleins de sensibilité et aujourd’hui, ils ont besoin de savoir à quel point leur père les aime. [Gabe la regarde longuement sans rien dire.] Barbara vous aidait beaucoup dans les conflits que vous aviez avec eux ?
  Gabe : Elle rendait tout le monde heureux spontanément. Elle faisait ressortir le meilleur de moi.
  Sarah : Je crois que si, aujourd’hui, elle était là, elle vous dirait que vos fils se souviendront de ce moment jusqu’à la fin de leur vie et que ça va construire ce qu’ils seront demain.
  Gabe : Un jour viendra où vous ferez une super-matriarche.
  Sarah : Je suis déjà une super-matriarche. [Elle pleure.] Du moins, j’essaie.

On observe à l’occasion de cette discussion le domaine de l’ennéatype 1 (cf. stage Ailes) et le manque de confiance en soi ("J’essaie.") dû au mental réprimé. Cette sensibilité n’est pas de la faiblesse. Gabe le sent bien, qui la respecte pour sa volonté et son courage, et accepte donc de suivre son conseil.

Identification avancée : Sarah est un 1 α à aile 9 de sous-type conservation ("Anxiété"). L’instinct social ("Inadaptation sociale") se manifeste nettement dans son métier où elle ne réussit pas à comprendre et accepter l’ambiance décontractée de son service.

Le rôle de ma vie : Gabe BloomGabe Bloom (Mandy Patinkin) : 8

"Mes deux fils savent ce que j’éprouve pour eux." affirme Gabe à Sarah. En 8 très désintégré, son amour s’est manifesté par une dureté dont aucun des deux ne s’est vraiment remis :

  Noah : Ah d’accord, donc quand t’es vieux et que t’as un cancer, tout le monde est supposé oublier que t’es un salaud.
  Aiden : Eh, c’est pas facile, je sais. Tu peux me croire, Noah, personne le sait mieux que moi.

Noah est celui des deux qui a le plus souffert puisqu’il est celui dans lequel Gabe avait mis le plus d’espérance :

  Gabe : Et quand ton frère avait 6 ans, on a commencé à penser que quelque chose n’allait pas. Je me souviens, une psychologue scolaire lui a fait passer une batterie de tests et à la fin de la séance, elle a dit : “C’est pas un enfant handicapé, c’est un génie.” Ah tu m’aurais vu, je m’pavanais. Je partais travailler en me disant : “Je suis le père d’un génie.” Je n’étais pas peu fier, tu peux me croire.
  Aiden : J’te crois.
  Gabe : Je nous imaginais travaillant un jour ensemble, côte à côte, à l’université. J’avais de grands espoirs.
  Aiden : Pourquoi chaque fois qu’on est tous les deux, tu n’as envie de parler que de Noah ?
  Gabe : J’peux pas parler avec lui. Je lui dis bonjour, et il dit “Pourquoi tu dis bonjour comme ça ?”

On voit là l’activation de la false core (cf. stage Néti néti) d’Aiden et sa détresse. Noah a choisi la solution la plus évidente quand on a affaire à un 8 en pleine désintégration : réduire la relation au strict minimum possible. Au moment où se déroule le film, cela fait un an que Noah n’a pas vu son père : "J’en ai ma claque d’être considéré comme une déception. Je pense que j’ai suffisamment donné. […] La dernière fois qu’il m’a appelé, c’était pour mon anniversaire. Comme cadeau, j’ai eu droit à un exposé de vingt minutes sur ma nullité."

Cet exposé sur son incompétence, Aiden y a aussi droit systématiquement. Gabe vient voir Aiden chez lui pour lui annoncer l’aggravation de son état de santé :

  Gabe : [Il se tourne vers la piscine sans eau, plein de terre et de détritus divers.] Elle est bien la piscine. Tu cultives quoi, la typhoïde ou l’hépatite ? Et la clôture, elle a un souci ? Tu sais quoi, on se croirait un peu à Bombay chez toi.
  Aiden : Le jardin est dans le même état depuis qu’on a emménagé. Tu vas faire le même commentaire chaque fois que tu viens ? J’ai pas reçu un chèque décent depuis la pub contre les pellicules.
  Gabe : Et le pire, c’est que tu as toujours des pellicules.

Cet échange a lieu juste après qu’Aiden lui a dit "Si tu as éduqué ce chien pour qu’il pisse partout sauf sur la pelouse, tu as fait un boulot épatant" et a donc un petit parfum de vengeance.

Aiden annonce à son père son intention de faire l’école à ses enfants :

  Gabe : C’est une idée aberrante. Tu es ignare. Tu as l’intention de leur apprendre quoi ? À faire l’acteur ?
  Aiden : Il y a des sites Web, Papa, je te signale, et il y a des bouquins. C’est juste pour finir le semestre. Ça va le faire.
  Gabe : Tu les accables avec tes peurs. C’est pas parce qu’on t’a tabassé à l’école publique que ça leur arrivera.
  Grace : On t’a tabassé, Papa ?
  Aiden : Mais non.
  Gabe : Oh que oui.
  Aiden : Non.
  Gabe : [Fermement.] Dis-leur la vérité ! [Il se tourne vers les enfants.] Ils s’en sont pris à lui. Avec ses Donjons & dragons, ses films de science-fiction…
  Aiden : C’est arrivé qu’une fois.
  Gabe : Tu as épousé une demi-juive, tu n’inculques à tes enfants aucune foi dans une puissance supérieure, aucun sens du spirituel, et maintenant tu leur bourres le crâne avec tes peurs. C’est un vrai gâchis, Aiden.

Le plus insupportable pour Gabe est l’entêtement d’Aiden à tenter de devenir comédien :

  Aiden : J’ai un casting auquel je voudrais vraiment aller.
  Gabe : Ces castings, là, quand est-ce que tu vas arrêter ?
  Aiden : Je n’en sais rien. Pas tout de suite.
  Gabe : Tu ne peux pas te considérer comme un chef de famille.
  Aiden : Merci.
  Gabe : Je sais, on est en 2014. À mon époque, un homme serait mort plutôt que de laisser sa femme s’épuiser au travail pendant qu’il fait le clown.

Quand il est à l’hôpital, Aiden, Sarah et leurs deux enfants viennent lui rendre visite. Au jeu de massacre, c’est chacun son tour. Il commence par Grace dont il découvre la perruque colorée : "Qu’est-ce que ces hippies t’ont fait ? On a l’impression que tu fais le plus vieux métier du monde." Il poursuit avec Tucker qui lui a acheté un buzzer péteur : "La scolarisation à domicile porte ses fruits." Et pan sur Aiden qui a le droit à une deuxième salve quand Grace annonce qu’elle connaît bien ses tables de multiplication : "Tant mieux ! Travaille dur ! Ne deviens pas actrice." Il ne reste plus que Sarah qui n’a pas attendu son tour en vain :

  Gabe : [Il s’adresse à Tucker.] Ça va de faire les idiots quand on est étudiant, mais un jour ou l’autre, tu devras faire vivre ta famille. Tu auras besoin des tables de multiplication.
  Sarah : Mais peut-être que Tucker aura une femme qui l’aimera et le soutiendra, et lui soufflera les réponses s’il lui arrive de les oublier.
  Gabe : Peut-être qu’il épousera une femme qui le confortera dans ses chimères, qui le laissera s’asseoir sans rien faire à attendre que ses rêves se réalisent, pendant que ses enfants resteront sans bouger au bord d’une piscine boueuse. Grace ne sait même pas nager, bon sang !

Gabe nie l’impact que ses propos ont sur sa famille. Il manifeste aussi le mécanisme de défense de déni à propos de sa santé. Aiden vient le voir alors qu’il vient d’être hospitalisé : "Approche. Te laisse pas berner par tout ça. Ils couvrent leurs arrières pour ne pas avoir de procès aux fesses. Je vais bien." Quelques instants plus tard, il grimace de douleur ("Oh ! Seigneur !") et essaye de faire croire que c’est une réaction à un match qui passe à la télévision : "Mais t’as vu ce lancer ? Si Collin ne se dépêche pas de faire entrer un nouveau lanceur, j’arrache mes tuyaux et je saute par la fenêtre."

Le déni se manifeste aussi quand Sarah essaye de le convaincre de se réconcilier avec ses enfants avant de mourir :

  Gabe : Mes deux fils savent ce que j’éprouve pour eux.
  Sarah : Vous en êtes sûr ?
  Gabe : [Il détourne la conversation.] Je leur ai dit que je voulais prendre ma retraite. J’ai menti. On m’a poussé vers la sortie parce que je n’étais plus à niveau pour la technologie. Ne laissez jamais personne les pousser dehors.
  Sarah : Vous ne le leur avez jamais dit ?
  Gabe : C’est quoi ça ? Une espèce d’ingérence ? Vous êtes venue pour me dire que j’ai échoué en tant que père.
  Sarah : Non ! Non du tout. Vous avez élevé deux garçons qui sont exceptionnels. Ils ont peut-être pas toujours de réponse rapide ni de récompense sur leur cheminée. En fait, aucun de vos fils n’a de cheminée, mais ils sont fabuleux. Ils sont pleins de sensibilité et aujourd’hui, ils ont besoin de savoir à quel point leur père les aime. [Gabe la regarde longuement sans rien dire.] Barbara vous aidait beaucoup dans les conflits que vous aviez avec eux ?
  Gabe : Elle rendait tout le monde heureux spontanément. Elle faisait ressortir le meilleur de moi.
  Sarah : Je crois que si, aujourd’hui, elle était là, elle vous dirait que vos fils se souviendront de ce moment jusqu’à la fin de leur vie et que ça va construire ce qu’ils seront demain.
  Gabe : Un jour viendra où vous ferez une super-matriarche.

Si Gabe finit par se rallier au point de vue de Sarah, c’est parce qu’il reconnaît sa force et son courage, les seules qualités qu’il apprécie vraiment. C’est sur ce thème que sont les seuls compliments qu’il réussit à faire à ses enfants :

  • À Aiden : "Merci d’avoir fait de ton mieux pour que cette famille tienne debout, alors que moi je n’ai pas pu."
  • À Aiden encore en commentant la bagarre avec Jerry : "Ça demande du courage. Je suis content pour toi. Tu as montré qui tu étais."
  • À Noah : "Noah, tu es un guerrier." ; "Tu as gagné."

C’est aussi sur ce thème qu’il aime être apprécié :

  Aiden : Tu te sens comment ?
  Gabe : Je n’ai pas peur. C’est drôle quand même, non ? Je croyais que j’aurais peur.
  Aiden : C’est la chose la plus courageuse que j’ai jamais entendue.
  Gabe : C’est vrai ?
  Aiden : Oui. Oui, c’est vrai.
  Gabe : Tu me donnes ta parole ?
  Aiden : J’te donne ma parole. [Gabe sourit, heureux.]

Gabe peut aussi manifester les capacités de protection du 8 :

  Sarah : Je crois pas vous l’avoir déjà dit, mais… quand j’ai perdu ma sœur, vous êtes la personne qui m’a le plus aidé. Vraiment.
  Gabe : Ah oui.
  Sarah : Oui.
  Gabe : Je suis content de savoir que j’ai pu être utile, mais je ne me rappelle pas ce que je vous ai dit.
  Sarah : Vous avez dit : “Rien dans la vie ne demande davantage de courage qu’affronter le fait qu’un jour elle s’arrête, et de l’autre côté du chagrin se trouve la sagesse.”
  Gabe : Moi, j’ai dit ça ?
  Sarah : Oui.
  Gabe : C’était pas mal pensé.

Comme Aiden a peur de l’école publique, Gabe a accepté de payer les frais de scolarité de Grace et de Tucker mais "à condition de pouvoir choisir l’école" : ce mélange de générosité et de contrôle est assez typique d’un 8. En tout cas, quand il trouve un traitement dont les médecins le préviennent qu’il est inefficace, Gabe met fin à son engagement sans barguigner et apparemment sans état d’âme.

Identification avancée : Gabe est un 8 α. L’instinct de conservation est le plus visible dans le film, mais la maladie de Gabe fait qu’il n’est pas possible d’en déduire un sous-type.

Le rôle de ma vie : Grace BloomGrace Bloom (Joey King) : 6

L’appartenance à un groupe est vitale pour Grace, ce qui fait évidemment sens avec un père aussi immature et donc insécurisant qu’Aiden. Ce groupe est sa foi et son école juives, et l’importance qu’elle y attache est peut-être un effet du lien de connexion avec Gabe qui est probablement sa figure protectrice (cf. stage Connexions). Vis-à-vis de ce groupe, elle évite la déviance en en respectant les règles, même si celles-ci sont dures pour une adolescente qui aimerait être séduisante :

  Grace : Les garçons, ils ont tous les trucs cool pour honorer Hashem, alors que moi, j’aurais droit à rien d’un petit peu excitant tant que j’aurais pas ma sheitel.
  Aiden : La sheitel, c’est quoi ça ?
  Grace : La perruque de modestie, et donc une fois que je serais mariée, je me raserai la tête et je porterai ma perruque toute ma vie. Y a que comme ça que mon mari me trouvera jolie.
  Aiden : Je suis navré mais je trouve que c’est une tradition absolument grotesque. [Grace se renfrogne.] En plus avec toi, ça marcherait pas parce que tu es tellement jolie qu’à tous les coups, tu serais encore plus jolie sans cheveux qu’avec, et ça foutrait tout le raisonnement en l’air. [Grace se détourne pour que son père ne la voie pas sourire de plaisir.]

ou plaire à Jesse :

  Jesse : Tiens, dis donc, euh, ma sœur fait une grosse fiesta au bord de la piscine à la fin de l’année. En général, c’est super. Tu voudras venir ?
  Grace : Non merci. J’ai jamais appris à nager. En fait, j’ai même pas de maillot de bain.
  Jesse : Pourquoi ?
  Grace : Ben, Dieu dit qu’une femme doit couvrir son corps et rester pudique.
  Jesse : Ah d’accord. Bon, ben, t’as plusieurs mois si tu changes d’avis.
  Grace : [On voit sa tristesse.] Oui. Cool.

Quand sa mère lui propose de porter des vêtements colorés, elle refuse de s’habiller "comme sur Disney Channel" : "Je crois que Dieu teste ma foi en ce moment, et que je devrais éviter de faire des changements trop radicaux." À ce moment, Grace manifeste la difficulté du 6 à faire bouger ses limites.

À la fin du film, elle essaye de convaincre Noah de venir dire adieu à son père et là aussi, elle le fait au nom de valeurs de groupe :

  Noah : Grace. Je peux te dire un secret. J’ai peur. Perdre ma mère, ça a été le pire truc de ma vie. Revivre ça, ce serait trop dur.
  Grace : Je sais que tu es triste. Mais on est triste aussi nous. C’est pour ça qu’on devrait être ensemble. [Noah ne répond pas.] Écoute. Oncle Noah, je sais que tu crois pas en Dieu, mais tu peux peut-être croire un petit peu dans la famille.

Dès lors, envisager de quitter l’école juive est une catastrophe :

  Sarah : Ils ont menacé d’exclure les enfants s’ils n’ont pas un chèque à la fin de la semaine. Il serait peut-être temps de les mettre à l’école publique, non ?
  Grace : [Elle les écoutait, visiblement inquiète.] Non !
  Tucker : [Il a un sourire ravi.] Ouais !

Grace réitère un peu plus tard : "Je ne veux pas quitter mon école. Je me sens bien là-bas. Et avec mes amis, comment je ferais ?"

Quand son père essaye de faire les cours à la maison, elle essaye de respecter les mêmes règles qu’à l’école, ce qui avec un professeur et un condisciple tous deux d’ennéatype 7 n’est pas facile :

  Aiden : Bien. Mes chers élèves, bonjour.
  Grace : [Droite comme un i.] Bonjour.
  Tucker : [Vautré sur le canapé, la tête en bas] Au revoir. [Grace fait une mimique désespérée.]
  Aiden : On va commencer par faire l’appel. Grace ?
  Grace : [Elle lève la main.] Présente.
  Aiden : [Il fait semblant de découvrir le nom du deuxième élève.] Et Toukère ?
  Tucker : Je commence déjà à m’ennuyer.
  Aiden : Bon, on va considérer qu’il a dit “présent”. Concentrons-nous d’abord sur vos programmes respectifs. Grace, qu’est-ce que tu étudies plus particulièrement en ce moment ?
  Grace : La géométrie.
  Aiden : [Il se met à chantonner.] Géométrie, géométrie, c’est la chanson de la géométrie.
  Grace : [Elle fait une mimique inquiète.]
 

Quelques instants plus tard, devant l’impréparation et l’incompétence paternelles, Grace prend le cours en main.

Elle aimerait aussi que les règles soient appliquées par tous dans la famille :

  Grace : Si tu peux être grossier, ça veut dire que nous aussi. T’es sûr de vouloir ça ?
  Aiden : Pas de souci.
  Sarah : Non !
  Tucker : Je suis sûr que Grace, elle dira pas de gros mots.
  Grace : [Elle se sent mise au défi, se concentre et se jette à l’eau.] Tête de nœud.
  Aiden : [Ravi.] Ouaouh !
  Sarah : Grace !
  Grace : Papa a dit ça l’autre jour quand un type lui a piqué sa place de parking.
  Aiden : Je l’ai traité de tête de nœud parce que c’était une tête de nœud. Il avait un 4×4 jaune vif. Qui se paye des 4×4 jaune vif ? C’est quoi son truc ? La guerre contre le soleil ?
  Tucker : [Il montre une photo de voiture affichée sur la tablette.] Papa, faut qu’on s’achète cette voiture.
  Aiden : Nous n’achèterons pas d’Aston Martin mais durant les prochaines soixante secondes, t’as le droit de dire un gros mot. [Grace fait une moue désapprobatrice.]
  Tucker : Alors, poil aux couilles. [Aiden éclate de rire, et Grace se retourne indignée vers sa mère dans l’attente d’une réaction.]

Grace a de l’humour :

  Grace : On va être scolarisés à la maison.
  Jesse : Pourquoi ? Vous êtes Amish ?
  Grace : Non, nous, on est juifs, mais on n’a plus les moyens de payer l’école privée.
  Jesse : Je croyais que les juifs contrôlaient Hollywood.
  Grace : Oui, moi aussi, je croyais. Peut-être qu’on fait pas partie de la même tribu.

Quand Aiden décide de lui apprendre à nager, elle exprime sa peur — plus souvent manifestée de manière non verbale dans le reste du film — et a un amusant moment de bascule du centre mental : "Si je meurs, je te préviens, je serais vraiment en pétard."

Identification avancée : Grace est un 6 α de sous-type social ("Devoir")

Le rôle de ma vie : Tucker BloomTucker Bloom (Pierce Gagnon) : 7

Tucker n’a pas beaucoup de répliques dans le film, mais sa communication non verbale ne laisse pas de doute sur son ennéatype. Par-dessus tout, Tucker craint de s’ennuyer, et l’école juive est évidemment son cauchemar. Il ne comprend même pas pourquoi il devrait faire un tel effort :

  Aiden : [Il le dépose en voiture devant l’école.] Allez, sois un bon juif !
  Tucker : Pourquoi ? C’est embêtant !
  Aiden : J’en ai aucune idée. Demande au rabbin.

Aussi, quand Sarah propose de les mettre à l’école publique, sa réaction contraste avec celle de Grace :

  Sarah : Ils ont menacé d’exclure les enfants s’ils n’ont pas un chèque à la fin de la semaine. Il serait peut-être temps de les mettre à l’école publique, non ?
  Grace : [Elle les écoutait, visiblement inquiète.] Non !
  Tucker : [Il a un sourire ravi.] Ouais !

Il faut dire que l’école publique risque d’être moins contraignante :

  Tucker : Je pourrais m’acheter de la drogue dans ma prochaine école ?
  Aiden : Quoi ?
  Tucker : Tonton Noah dit qu’à l’école publique, il s’achetait plein de drogue.
  Aiden : Non, ça, c’étaient les années 90. On est à L.A. La moitié des pharmacies vendent du cannabis. Il suffit d’avoir la migraine et 50 $.
  Sarah : Chéri, lui dis pas ça.

Plus tard, quand Aiden vient effectivement le retirer de l’école juive parce qu’il ne peut pas payer la scolarité, on découvre que Tucker dort à poings fermés sur son pupitre. Quand Aiden lui fait les cours à la maison, il s’installe sur le canapé, la tête en bas. Comme il donne une bonne réponse dans les premières secondes, il pousse un cri de joie, se lève d’un bond et veut s’en aller en criant : "Récré !" Rappelé à l’ordre, il s’esquive quelques secondes plus tard sous prétexte d’aller faire un choom. En fait, il est alléprendre une console de jeux et s’amuse à en mettre les images en surimpression sur le tableau : "Je t’ai menti pour le choom, Papa. J’avais juste envie de tuer le triangle."

La valeur n’attendant point le nombre des années, Tucker est déjà prometteur en termes de rationalisation :

  Tucker : Bocal à gros mots !
  Aiden : Il va se faire foutre, le bocal.
  Sarah : Aiden !
  Aiden : Le bocal à gros mots, il va se faire foutre.
  Tucker : Foutre, ça veut dire coucher. Tu veux coucher avec le bocal ?

La passion de gloutonnerie est bien sûr présente : "Je t’ai fait un bol de céréales, mais je l’ai mangé", annonce-t-il à Grace.

Quand il va voir son grand-père qui est mourant à l’hôpital, il lui amène comme cadeau un buzzer péteur… Ben oui, pour s’amuser, un buzzer péteur, what else ?

Identification avancée : Tucker est un 7 α à aile 8.

Le rôle de ma vie : Noah BloomNoah Bloom (Josh Glad) : 5

Noah préfère le centre mental, et celui-ci est exceptionnel : "C’est pas un enfant handicapé, c’est un génie." Son malheur est qu’il applique son intelligence à des sujets méjugés par son père dont le mépris agressif l’a plongé dans la dépression. Noah a trouvé refuge dans une caravane héritée de sa mère dont il ne sort quasiment jamais : "Je sais que t’es un ermite ou j’sais pas quoi" lui assène Janine en guise de bonjour. Ce havre de sécurité, il en protège soigneusement l’entrée, même vis-à-vis de son frère :

  Aiden : Noah ! Je sais que tu es là, je t’entends troller. Noah, ouvre ! Je m’en irais pas.
  Noah : Tire-toi.
  Aiden : J’ai fait tout le trajet pour te voir. Ouvre, putain.
  Noah : Le mot de passe, c’est quoi ?
  Aiden : Attends… Je crois que c’est “ton père va mourir et il faut que j’te parle”. [Noah hésite et ouvre la porte. Aiden fait les présentations.] Noah, lumière du jour. Lumière du jour, Noah.

Dès cette première scène, on sent la colère de Noah. Son profil sur le réseau social auquel il participe affiche : "Noah Bloom crachant de sombres vérités depuis la profondeur de l’obscurité. Allez-y, bloquez mon compte et je créerai simplement un autre profil." Au moment où Aiden arrive, il était en train d’envoyer un message : "Va sucer des bites." Quelques instants plus tard, quand Kugel urine sur la caravane de son voisin et qu’Aiden essaye de l’arrêter, il l’interrompt : "Non, c’est bon, laisse-le faire. Je peux pas le saquer ce mec."

Comme aucun des propos de Noah ne déclenche de conflit, il serait tentant d’envisager l’hypothèse 9, mais quelques indices permettent de préférer le 5.

D’une part, l’agressivité de Noah s’exerce principalement envers Aiden, et on pourrait penser à la capacité du 9 à savoir jusqu’où il peut aller sans qu’il y ait affrontement. Cet argument n’est pas déterminant car Aiden n’entre jamais en conflit avec personne — même avec son père, et il y aurait pourtant de quoi ! —, à l’exception de l’altercation finale dans le supermarché avec Jerry qui est, paradoxalement, une marque d’intégration.

D’autre part, Noah est fortement désintégré mais il sait fort bien dire non et fixer ses frontières :

  Aiden : Écoute, j’ai deux problèmes. Il y en a au moins un pour lequel tu pourrais peut-être m’aider.
  Noah : Quoi ?
  Aiden : Kugel.
  Noah : [La réponse fuse.] Dans tes rêves.
  Aiden : Non, j’peux pas élever deux enfants, aller à des auditions et m’occuper de ce chien.
  Noah : T’oublies tout de suite.
  Aiden : Attends, mais tu te fous de moi. J’te signale que c’est notre père. C’est notre père. On doit faire face ensemble.
  Noah : Ah d’accord, donc quand t’es vieux et que t’as un cancer, tout le monde est supposé oublier que t’es un salaud.
  Aiden : Eh, c’est pas facile, je sais. Tu peux me croire, Noah, personne le sait mieux que moi.
  Noah : L’autre, c’est quoi ?
  Aiden : Quoi ?
  Noah : T’as dit que t’avais deux problèmes à régler. Je peux éventuellement t’aider en dehors du chien.
  Aiden : L’autre problème, c’est qu’il va essayer un nouveau traitement expérimental et qu’il n’a plus assez d’argent pour payer la yechiva pour les enfants.
  Noah : [Il soupire et se lève.] Bon ben, je crois que t’es dans la merde, mon gars. [Il lève la main, paume en avant] Longue vie et [Il fait un doigt d’honneur à Aiden.] prospérité.
  Aiden : Attends ! T’es sérieux ?
  Noah : [Il retourne dans sa caravane.] Faut que j’retourne au taf. Un blogueur ne se repose jamais. [Il tend l’index vers Aiden.] Et pas de plan foireux, t’embarques le chien.

Quand Janine vient le voir, Noah la remet à sa place en affichant ses connaissances mentales, au point que cette probable 8 rompt le combat :

  Janine : Je sais que t’es un ermite ou j’sais pas quoi, mais si t’empêches pas ce connard de chien d’aboyer, je balance ton mobile home du haut de la falaise.
  Noah : Kugel, tu fermes ta gueule ! [Il la regarde longuement.] Pourquoi t’as un pantalon de Muppet ?
  Janine : C’est pas un pantalon de Muppet. Je bosse sur mon costume pour le Comic-Con.
  Noah : T’es un fan de cartoon ?
  Janine : [Vexée.] Ça va ! J’suis une pro. Je crée des personnages de jouet en peluche grandeur nature.
  Noah : Ouais, t’es une fan de cartoon.
  Janine : [Elle contre-attaque.] Tu sors jamais de ton mobile home ?
  Noah : T’es toujours aussi agressive ?
  Janine : Dis donc, ton ravissant mobile home sent toujours comme si Burger King en personne avait bouffé Grimace et ensuite avait chié partout dans le living.
  Noah : [Supérieur et satisfait.] Euh, Grimace est un des nombreux personnages de McDonald, apparu en novembre 1971 pour la première fois. Tu confonds les marques de fast-food et les noms de leurs icônes.
  Janine : [Furieuse.] Le fait que tu connaisses tout ça en détail en dit suffisamment long sur le genre de mec que tu es. [Elle tourne les talons et s’en va.]

Noah sait aussi parfaitement ce qu’il veut : "Le lego Star Wars contre 3 heures de baby-sitting à condition qu’il soit dans sa boîte et que l’emballage soit en parfait état." L’accord obtenu, il dit fermement : "Vous avez 3 heures." Après cette séance de garde des enfants, il signale qu’il trouve que "[Tucker est] très chouette. Plus intelligent que ce que je croyais."

Effet du centre mental, Noah vit dans la peur comme Aiden, mais là où celui-ci a peur du monde extérieur (l’école publique), Noah a peur de ses émotions : "Grace, je peux te dire un secret ? J’ai peur. Perdre ma mère, ça a été le pire truc de ma vie. Revivre ça, ce serait trop dur." On a le sentiment que depuis le décès de sa mère qui le protégeait de Gabe, sa caravane n’est pas uniquement pour Noah un lieu d’isolement, mais aussi un endroit où il exerce son mécanisme de défense d’isolation.

Identification avancée : Noah est un 5 α à aile 6 de sous-type conservation ("Château fort"). Le dialogue avec Janine, cité ci-dessus, laisse penser que les instincts social ("Jargon") et sexuel ("Confidence-Confiance") sont aussi blessés.

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