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Les sous-types au travail (1e partie)
Mario Sikora (Traduction par Pierre Fleurat)

"Nous sommes des machines de survie — des véhicules robotisés programmés pour préserver aveuglément les molécules égoïstes qu'on appelle des gènes. C'est une vérité qui me remplit d'étonnement."
Richard Dawkins, "Le gène égoïste"

Andy sortait tout juste d'un stage sur les sous-types. Je lui ai demandé : "Alors, qu'as-tu appris ?"

"J'ai appris que si vous préfériez manger seul au restaurant, vous étiez un sous-type conservation ; si vous aimiez manger en groupe, vous étiez un social ; et si vous préfériez manger avec un ou deux amis proches vous étiez un sous-type 'tête-à-tête.'"

Tout ce que j'ai trouvé à répondre, c'est "Oh…"

En dépit d'une littérature de plus en plus abondante, je crois qu'il manque toujours une explication claire de ce que sont les sous-types et de ce qu'apporte leur compréhension, en particulier dans le domaine des relations de travail. La première partie de cet article (dans ce numéro) concerne les sous-types et la manière d'identifier le sien et ceux des autres. Nous aborderons aussi les modalités prévisibles "d'empilage" (quel instinct est en premier, lequel est en second, etc.) ainsi que les relations entre les sous-types, les types et les ailes. Dans la seconde partie nous nous attacherons à montrer comment les sous-types affectent nos vies professionnelles, nos forces et nos faiblesses, l'efficacité de nos performances, et nos relations avec les autres.

Rappelez-vous le dernier documentaire animalier que vous avez regardé à la télévision. Il est probable que le sujet ait été un mollusque ou un singe, un pingouin ou un paon, et que trois domaines fondamentaux étaient couverts : l'habitat de l'animal, ses schémas culturels (c'est-à-dire comment il formait des groupes organisés et stables), et ses habitudes sexuelles. Si c'était un programme complet, il suivait forcément ce plan, qui couvre à peu près tout ce qu'il y a à savoir sur n'importe quel animal.

Les humains ne sont pas différents : en dehors de notre manière de nous loger, de nos comportements en groupe et de nos comportements sexuels, il n'y a pas grand-chose qui nous importe (si l'on considère que "se loger" inclut "se nourrir"). Ce sont les trois seules choses que nous ayons à faire pour survivre et, si possible, transmettre nos gènes. Il n'est pratiquement aucune action que nous accomplissons qui ne soit motivée par une tentative de satisfaire un de ces trois instincts fondamentaux. L'ordre de priorités que nous affectons à nos besoins constitue le fondement de notre système personnel de valeurs et de la panoplie de comportements que nous utilisons pour satisfaire nos valeurs. En d'autres termes, notre préférence automatique et inconsciente pour un ensemble particulier de besoins de survie détermine ce qui compte pour nous, ce à quoi nous pensons, et ce que nous faisons pour satisfaire nos besoins.

La théorie de l'Ennéagramme et les instincts

Les différentes approches de l'enseignement de l'Ennéagramme s'accordent en général pour distinguer trois versions de chaque type de personnalité. Ces versions correspondent à trois orientations différentes des schémas habituels (et probablement automatiques) d'attention. La première est une préférence pour les sujets de "conservation", la seconde pour les sujets d'interactions "sociales", et la troisième est une préférence pour des sujets à connotation, selon l'auteur, d'"intimité", "de tête à tête", ou "sexuelle". Les différentes "versions" de chaque type de personnalité sont appelées "sous-types instinctifs" (ou "variantes instinctives" par Riso et Hudson) parce que les comportements associés à chaque préférence sont supposés être "instinctifs".

On définit généralement les sous-types ainsi : le sous-type "conservation" montre une préférence pour les sujets de survie, de confort, de santé, de sécurité, et pour l'accumulation de ressources ; le sous-type "social" est attaché aux relations et aux interactions dans le groupe ; le sous-type sexuel recherche l'intimité et l'établissement de liens avec les personnes qui comptent pour lui (ou, comme certains le prétendent, les possessions, les passe-temps ou les activités qui comptent pour lui).

Pour certaines raisons, l'un de ces instincts est dominant en nous, et nos besoins et valeurs tendent à graviter autour de lui.

Des personnes de même type de personnalité montrent des différences significatives selon leur sous-type. Par exemple, un 3 social sera beaucoup plus attaché au statut et à l'image qu'un 3 conservation, qui sera manifestement plus intéressé par la production que par l'image.

La compréhension de son propre sous-type aide de deux manières fondamentales :

  1. Elle aide à être plus lucide sur soi-même en faisant prendre conscience de schémas habituels de comportement qui peuvent être sources de problèmes.
  2. La compréhension des sous-types peut aider à déterminer le type. Par exemple, la compréhension des sous-types aidera à ne pas prendre un 6 sexuel pour un 8, ou un 4 conservation pour un 3.

Bon, tout cela semble simple ; alors, pourquoi encore un article sur les sous-types ?

Depuis environ un an, je passe plus de temps qu'avant avec d'autres passionnés de l'Ennéagramme, et je n'arrête pas de rencontrer des gens qui ont beaucoup étudié les sous-types, mais qui se sont trompés sur le leur, ou sur les sous-types de leurs étudiants. Ces erreurs sont particulièrement fréquentes avec le sous-type sexuel : la moitié des personnes que je rencontre pensent être de sous-type sexuel, et la moitié d'entre elles se trompent.

Il me semble que cette confusion provient d'un manque de clarté dans la terminologie utilisée pour expliquer les sous-types et leur relation avec le type. Bizarrement, il semble que la confusion la plus fréquente soit entre le sous-type conservation et le sous-type sexuel. Peut-être cet article rendra-t-il les différences un peu plus claires.

Dans certains cercles, il y a un débat pour déterminer si le terme approprié est "sous-type instinctif" ou "variante instinctive". Il y a des arguments valables des deux côtés, mais aucun n'a grand sens au-delà des préférences sémantiques. Souvent, j'utilise "sous-types", "variantes", "versions" et d'autres mots selon l'humeur, le contexte, et simplement mon inspiration quand j'enseigne le sujet à mes clients, et cela ne perturbe pas leur compréhension.

Il y a un accord général sur le terme "conservation" pour le premier sous-type, et il semble pertinent. En un sens, le but de tous nos instincts génétiques est la préservation du gène, et cet instinct est dédié à la survie et au bien-être de son hôte — c'est-à-dire de l'individu. Fondamentalement, cet instinct concerne l'habitat et l'auto-entretien. Il concerne aussi la conservation : conservation du soi, conservation de son énergie, et conservation des ressources.

En conséquence, une personne de sous-type conservation va parler de nourriture, de sa santé, de sécurité financière (mais pas nécessairement de l'accumulation d'une grande fortune, quoique certains aient écrit), et de son confort physique immédiat. Elle va faire son nid — préférant rester chez elle dans le confort bien connu et stable de son domaine privé, plutôt qu'aller quelque part où elle ne pourrait pas contrôler son environnement. Ce sous-type tend à être le plus introverti des trois parce que son attention se concentre automatiquement sur son propre bien-être (donc, vers l'intérieur), plutôt que sur ce que font les autres.

La maison et la famille sont extrêmement importantes pour les types conservation, qui aiment être entourés de proches et de possessions qui les rassurent. Ils sont souvent maniaques avec la nourriture, les textures, l'aisance matérielle, et très au fait des questions de santé. En ce qui concerne l'argent, ils veulent en avoir assez pour assurer leur confort, mais ont rarement envie de prendre les risques associés avec l'accumulation d'une grande fortune.

Il y a aussi un consensus sur le terme "social" pour désigner l'instinct suivant, bien qu'il soit souvent mal compris. Il n'a rien à voir avec l'instinct grégaire, il s'agit d'une pulsion à s'orienter vers le groupe ; cet instinct aide à répondre aux questions, "quelle est ma place dans ma société ?" et "comment est-ce que je me compare aux autres ?" On enseigne souvent qu'une personne de sous-type social aime les groupes importants afin d'avoir des relations avec beaucoup de gens, mais ce n'est qu'en partie vrai. Un sous-type social veut savoir où il se situe dans la hiérarchie du groupe, et pour le savoir il doit garder l'œil sur ce que fait le groupe, ce qui implique de rester en contact et d'observer. Un sous-type social aime l'idée de compagnie, et veut souvent être avec des gens, mais il ne veut pas nécessairement interagir avec eux.

L'instinct social aide, lui aussi, l'individu à survivre de multiples manières. D'abord, c'est l'antilope solitaire que le lion mange ; faire partie d'un groupe a plein d'avantages. En deuxième lieu, nous apprenons du groupe : nous apprenons où trouver de la nourriture et de l'eau, et nous apprenons des techniques de survie. Établir des rapports sociaux nous garantit le soutien du groupe en cas de besoin, maladie, vieillesse, ou calamité naturelle.

Une autre tendance qu'on observe chez le sous-type social est celle de se comparer aux autres en se focalisant sur les contrastes. Une question revient sans cesse : "où est-ce que je me situe ?" C'est la clé qui lui permet de s'orienter. Les sous-types sociaux parlent des autres, ce qu'ils font, avec qui ils le font, et pourquoi ils le font. En un sens, le sous-type social est celui qui juge le plus : il a des opinions tranchées sur la façon dont les autres devraient se comporter avec le groupe, et il est en général très concerné par les "questions sociales", la politique, l'activisme, etc., domaines dans lesquels il peut se montrer dogmatique.

En termes de langage et de terminologie, le sous-type "sexuel" pose des problèmes. Les Américains, en particulier, ont une relation contradictoire avec la sexualité, balançant entre la répression puritaine et la sexualité ouverte, souvent chez la même personne. Parler de sexe et de sexualité les met souvent mal à l'aise, mais tous veulent être perçus comme sexuellement attirants.

Parler de sexe pose encore plus de problèmes à ceux d'entre nous qui utilisent l'Ennéagramme en entreprise. C'est sans doute la voie la plus rapide vers les ennuis juridiques, et il est sage pour un consultant d'éviter ce sujet s'il enseigne l'Ennéagramme dans un cadre professionnel.

Certains enseignants des sous-types s'efforcent de contourner le problème en appelant ce sous-type "intimité" ou "tête-à-tête", et c'est là que les problèmes commencent. Cet instinct ne concerne pas des liaisons platoniques ; il s'agit d'attirer l'autre en vue d'une relation sexuelle. Revenons à notre documentaire animalier : le paon ne montrait pas ses plumes pour établir une relation platonique avec un autre paon, ou pour s'absorber dans son passe-temps préféré (comme certains enseignants d'Ennéagramme le prétendent) ; il essayait d'attirer et de séduire une femelle pour avoir une relation sexuelle avec elle. C'est la tendance instinctive d'un être humain du sous-type sexuel : attirer et séduire un partenaire sexuel potentiel. (Malheureusement, si cette phrase peut choquer, elle n'en est pas moins vraie.)

Les comportements caractéristiques qu'on observe chez ce sous-type sont de typiques comportements "alpha", masculins ou féminins, qui vont tourner autour de la mise en avant de sa personne et de la maîtrise des ressources susceptibles d'attirer le sexe opposé. Ils attachent plus d'importance à leur attrait physique et à leur apparence que les autres sous-types, ils portent plus de bijoux, et, en général, ils parlent plus de sexe que les autres sous-types. Ils sont en général plus extravertis et charmeurs que les autres sous-types, qualités cohérentes avec leur tendance habituelle à attirer l'attention de partenaires potentiels.

Au-delà de l'apparence physique et du charme du sous-type, ces personnes ont tendance à attirer l'attention en parlant d'elles-mêmes, en vantant leurs réussites, ou simplement en ramenant la conversation sur elles pour se faire remarquer (en plus de montrer ses plumes, le paon émet un cri sonore pour attirer l'attention de la femelle.)

Des comportements qui se passent de commentaires

Les choses qui captivent notre attention et celles dont nous parlons trahissent notre sous-type. Quand nous ne sommes pas conscients de penser à quelque chose de particulier, nous pensons sans doute aux besoins qui proviennent de notre instinct dominant.

C'est pourquoi une personne de sous-type conservation va parler de sa maison, de sa santé, et de sa sécurité physique et financière. Elle va continuellement surveiller son environnement et s'attacher à le modifier pour augmenter son confort physique.

Le sous-type social va parler des autres, qui fait quoi avec qui et pourquoi. Il va comparer les personnes et s'attacher aux différences, émettant des jugements sur les comportements et les choix des autres.

Le sous-type sexuel va parler de lui-même, ses réussites, ses relations et ses activités ; il va aussi parler de sexe. Il va attirer l'attention sur lui à travers son apparence, son charme et ses possessions.

Type et sous-type

Alors, quelle relation y a-t-il entre le type de personnalité et le sous-type instinctif ?

Merriam-Webster définit la personnalité comme "la totalité des caractéristiques comportementales et émotionnelles d'un individu" (J'ajouterais à cette définition quelque chose sur les schémas cognitifs). Il y a de multiples interprétations et opinions sur ce qui est à la racine de la personnalité telle qu'elle est décrite par la théorie de l'Ennéagramme : les idées supérieures, les passions, les fixations, les blessures originelles, etc. Dans notre livre, De la Conscience à l'Action : l'Ennéagramme, l'Intelligence Émotionnelle et le Changement, Bob Tallon et moi esquissons "l'Ennéagramme des stratégies". Nous suggérons que les caractéristiques cognitives, émotionnelles et comportementales que comporte chaque ennéatype trouvent leurs racines dans une stratégie préférentielle pour interagir avec le monde, ou pour atteindre à ce que chaque type "s'efforce d'être". Par exemple, les caractéristiques du 2 trouvent leurs racines dans "s'efforcer d'être connecté" et toutes leurs caractéristiques intra ou interpersonnelles sont d'une manière ou d'une autre en relation avec cette stratégie préférentielle pour être dans le monde. En résumé, notre type de personnalité est une collection de tactiques au service de notre stratégie pour la satisfaction de nos besoins.

Stratégie du 1 S'efforcer d'être parfait – Le désir d'être sans défaut, bon, et de sentir que tout est bien, chez vous comme dans le monde.
Stratégie du 2 S'efforcer d'être connecté – Le désir d'être apprécié et d'être en union profonde avec les autres, et avec vos propres sentiments.
Stratégie du 3 S'efforcer d'être remarquable – Le désir de se distinguer comme un membre exemplaire du groupe, dont on reconnaît la valeur, la réussite, et l'accomplissement.
Stratégie du 4 S'efforcer d'être unique – Le désir d'être différent, autonome, créatif, et d'être compris et apprécié pour vos qualités spéciales.
Stratégie du 5 S'efforcer d'être détaché – Le désir d'être autonome, indépendant, et capable de trouver la sérénité avec vos propres pensées.
Stratégie du 6 S'efforcer d'être en sécurité – Le désir d'être en sécurité et d'appartenir à un groupe, une cause, ou une philosophie ; faire confiance aux autres et à votre propre jugement.
Stratégie du 7 S'efforcer d'être excité – Le désir d'être stimulé, heureux, enthousiaste, et de s'amuser.
Stratégie du 8 S'efforcer d'être puissant – Le désir d'être fort, d'agir, et de pouvoir exprimer votre volonté, votre pouvoir, et votre vitalité.
Stratégie du 9 S'efforcer d'être en paix – Le désir d'être en paix avec le monde, les autres, et vos propres pensées ; d'être calme et détendu.

Tableau 1 : L'Ennéagramme des stratégies (© Mario Sikora et Robert Tallon)

Notre "sous-type instinctif", de son côté, identifie laquelle des trois tendances instinctives domine en nous. Cette tendance instinctive est la racine de nos besoins et valeurs fondamentaux ; c'est le "but" que nous nous efforçons d'atteindre. Par exemple, si vous êtes un sous-type conservation, vos "buts", les besoins fondamentaux et les choses auxquelles vous attachez de l'importance, auront trait à la maison et à la nourriture.

Par conséquent, nos instincts déterminent ce que nous voulons ; notre stratégie est la "trame" de notre manière d'obtenir ce que nous voulons, et notre "type de personnalité" est une classification des tactiques cognitives, comportementales et émotionnelles sur lesquelles nous avons l'habitude de compter pour mener à bien notre stratégie préférentielle.

(Bien sûr, ceci soulève une question : ne devrions-nous pas appeler "type" notre sous-type instinctif et "sous-type" notre ennéatype ?)

Regardons comment cette interaction se passe pour l'ennéatype 8.

L'ennéatype 8 fait appel à la stratégie "s'efforcer d'être puissant" comme mode principal d'interaction avec son monde. La "Puissance" est la capacité d'agir ou d'obtenir un résultat. Les 8 cultivent cette capacité et la mettent en œuvre pratiquement en toutes circonstances. Il y a dans cette stratégie un élément de dominance et de pouvoir, et les 8, implicitement ou explicitement, dominent leurs mondes et y exercent le pouvoir, particulièrement dans les domaines en relation avec leur tendance instinctive dominante.

Le 8 conservation met la stratégie "s'efforcer d'être puissant" au service de ses besoins de logement et de nourriture. Il protège agressivement son domaine et peut devenir combatif si quelqu'un touche à ses possessions. Il est très attaché à la famille et met un point d'honneur à pourvoir aux besoins de ses proches. Il attend de ses amis et collègues une loyauté sans faille et pardonne très difficilement la trahison. Il travaille dur et accumule les ressources, mais, comme tous les types conservation, il est plutôt prudent dans l'accumulation (et la consommation) des ressources. Il est plus économe que joueur, et se contente généralement d'avoir assez pour répondre à ses besoins. Bien sûr, un 8 est un 8, et "assez" est probablement plus que pour la plupart des autres types.

Le 8 social utilise "s'efforcer d'être puissant" pour s'orienter vis-à-vis du groupe. C'est le leader classique de l'Ennéagramme ; il s'oriente vis-à-vis du groupe en le dominant. Cette domination peut être implicite ou explicite. Une 8 sociale va laisser un autre diriger le groupe, aussi longtemps qu'elle considérera que le leader est compétent. Même si elle n'est pas le leader officiel, la 8 sociale se considère comme leader de fait. À la moindre manifestation de faiblesse ou d'incompétence, la 8 sociale va prendre le pouvoir ; elle ne peut tout simplement pas s'en empêcher. S'il lui est impossible de dominer le groupe et si le leader officiel ne se montre pas compétent, la 8 sociale va partir et former son propre groupe. Les 8 sociaux se comparent eux aussi aux autres en termes de pouvoir ; ils savent habituellement comment démontrer (même si ce n'est qu'à eux-mêmes) leur supériorité en étant plus forts, plus intelligents, en ayant plus de relations, en étant plus déterminés, etc. que ceux avec qui il leur faut entrer en relation.

Les 8 de sous-type sexuel sont les mâles et femelles alpha de l'Ennéagramme. Où qu'ils soient, ils manifestent une présence pleine de force et s'attendent à attirer tous les regards. Ils font plus de bruit et se montrent plus assurés que les autres, ne manquant aucune occasion de monter leur virilité ou leurs attraits. Ils accumulent et contrôlent agressivement les ressources, mais d'une façon très différente des 8 conservation. Ils contrôlent les ressources, non pas en vue de jours difficiles, mais pour que ceux qu'ils désirent les remarquent, et les désirent en retour. Comme le dit Tony Montana dans le film Scarface : "En Amérique, Manny, il faut d'abord avoir de l'argent. Quand tu as l'argent, tu as le pouvoir. Quand tu as le pouvoir, tu as la fille."

Voici un exemple de confusion entre les sous-types conservation et sexuel : on enseigne souvent que Donald Trump est un 8 conservation parce qu'il "attache tellement d'importance à l'argent." Il est en fait un 8 sexuel. Chaque fois qu'il affiche "Trump" en haut d'un immeuble, qu'il passe à la télévision, ou qu'il "écrit" un nouveau livre, il montre ses plumes pour que toutes les femelles les voient.

Instinct dominant et secondaire

Nous possédons les trois instincts à des degrés divers, et l'ordre de priorités que nous leur affectons de façon innée peut être représenté comme un empilement.

Un instinct domine, et c'est habituellement vers son domaine que notre attention se porte le plus souvent. Ce domaine semble être la source de nos plus grands dons ; puisque nous lui consacrons tant d'énergie, nous développons les savoir-faire requis pour y avoir du succès. Les sous-types conservation sont souvent bien informés ou compétents en ce qui concerne la nourriture, la gestion de l'argent, la décoration de la maison, etc. Les sous-types sociaux comprennent les personnes et la dynamique des groupes, et se sentent à l'aise avec des personnes de types très différents. Les sous-types sexuels ont habituellement du charme, ils sont attirants et sûrs d'eux ; ils réussissent souvent dans le monde.

Ce domaine d'attention prioritaire peut aussi être la source de nos dysfonctionnements majeurs. Quand nous nous sentons menacés, nous avons tendance à largement exagérer notre stratégie dans ce domaine. Le sous-type sexuel se laisse aller à la promiscuité ou cherche à accaparer l'attention, le sous-type social devient critique et autoritaire vis-à-vis du groupe, le sous-type conservation devient obsédé par la peur de manquer de ressources et de bien-être.

Un autre instinct joue un rôle secondaire dans notre psyché. Nous lui consacrons de l'énergie, mais moins qu'au premier. Sous un stress violent, cet instinct risque de poser encore plus de problèmes que le premier, parce que, bien qu'il soit important pour nous, nous ne consacrons pas assez de temps à son domaine pour y développer notre savoir-faire. Ainsi, un instinct sexuel secondaire va nous faire douter que nous soyons attirants et désirables en même temps qu'il nous donnera envie de le prouver ; l'instinct social secondaire crée une insécurité à propos du rôle et de l'acceptation par les autres, mêlée à une envie de les obtenir ; et l'instinct de conservation secondaire crée une insécurité à propos des ressources et de la santé, mêlée à un désir de les avoir.

Il semble que le troisième instinct crée peu de problèmes. Son domaine tend à recevoir peu d'attention et à ne pas poser de problème d'insécurité. Toutefois, il faut prendre garde à ce que le manque d'attention pour ce domaine ne conduise pas à le négliger au point d'affecter la vie de tous les jours. Si votre instinct tertiaire est celui de la conservation, vous devez faire attention à prendre soin de votre santé et à économiser pour des jours difficiles ; si c'est le social, vous devez faire attention à développer des savoir-faire relationnels et votre sensibilité ; si c'est le sexuel, vous devez faire attention à soigner votre apparence et à rester désirable pour la personne qui compte pour vous.

Il semble que "l'empilage" de nos instincts soit prévisible. Un instinct primaire sexuel sera accompagné par un instinct secondaire de conservation, un primaire social par un secondaire sexuel, et un primaire de conservation par un secondaire social.

La question est : pourquoi ? Et comment pouvons-nous utiliser cette connaissance ? En ce qui concerne le pourquoi, cela semble trop important pour être un simple sous-produit accidentel de l'évolution, donc cela doit avoir un but. Peut-être est-ce parce que la nature a besoin d'introduire une dose de prévisibilité dans son jeu de hasard. Peut-être est-ce parce que l'instinct secondaire soutient l'instinct primaire d'une façon particulièrement adaptative.

Par exemple, un instinct secondaire social soutient un instinct primaire de conservation, puisqu'une bonne compréhension de la dynamique des groupes aide à l'accumulation des ressources. Un instinct secondaire de conservation soutient un instinct primaire sexuel, puisqu'une personne en bonne santé est plus attirante qu'une personne en mauvaise santé. Un instinct secondaire sexuel soutient l'instinct social, puisque le fait d'être attirant renforce la position dans le groupe. Bien sûr, il peut s'agir là de simples rationalisations après coup, et je laisse à des gens plus intelligents le soin d'en décider.

Savoir si l'empilage est prévisible a du sens, cependant, car cela peut accélérer la compréhension de soi et aider dans les relations.

Il est évident que cela accélère la compréhension de soi. La façon dont cela aide dans les relations sera discutée dans la seconde partie de cet article. Pour l'instant, il suffit de faire remarquer que nous nous connectons avec les autres au moyen de valeurs et d'intérêts partagés. Nos tendances instinctives influencent nos valeurs et nos centres d'intérêt. Cette prévisibilité de l'empilage garantit que nous allons partager au moins une tendance instinctive avec chacun. La compréhension de l'empilage va nous aider à accélérer la découverte de ce que nous avons en commun avec les autres.

Les instincts et les ailes

Alors qu'il semble n'y avoir aucune prépondérance mesurable d'aucun sous-type dans aucun type (ou vice-versa), il semble réellement y avoir une relation entre les sous-types et les ailes.

Mise en garde : je ne reconnais pas grande valeur aux différentes théories sur les ailes et je ne les enseigne pas à mes clients. Il me semble qu'elles embrouillent les gens : j'ai assisté à beaucoup trop de débats à propos de qui a quelle aile dans les cercles de l'Ennéagramme et j'ai vu trop de gens avoir des difficultés à déterminer leur aile. Elles ne semblent pas non plus apporter des informations qui puissent être utiles dans l'action. Elles ne semblent répondre à aucune question pratique à laquelle ne puissent répondre des composants plus essentiels du modèle de l'Ennéagramme et des sous-types. Elles ajoutent un niveau de complexité qui peut être valable pour la description, mais risque de détourner du travail sur soi. L'Ennéagramme est déjà assez compliqué et les ailes n'apportent pas, à mon avis, une valeur qui compense l'augmentation de la complexité (Je sens que beaucoup de lecteurs vont se sentir froissés ; s'il vous plaît, rappelez-vous qu'il s'agit d'un penchant personnel. Si vous trouvez que les ailes ont de la valeur, n'en tenez pas compte)

Cela dit, il semble y avoir une cohérence entre le sous-type et la relation type-aile. Par exemple, les 5 sexuels se reconnaissent une aile 4, alors que les 5 sociaux se reconnaissent une aile 6. Le tableau ci-dessous présente les schémas type-aile-sous-type que j'ai identifiés à ce jour :

Sous-type/Type = Type/Aile Sous-type/Type = Type/Aile Sous-type/Type = Type/Aile
Conservation/1 = 1/9 Conservation/4 = 4/3 Conservation/7 = 7/6
Social/1 = 1/2 Social/4 = * Social/7 = *
Sexuel/1 = * Sexuel/4 = 4/5 Sexuel/7 = 7/8
Conservation/2 = 2/1 Conservation/5 = * Conservation/8 = 8/9
Social/2 = 2/3 Social/5 = 5/6 Social/8 = *
Sexuel/2 =* Sexuel/5 = 5/4 Sexuel/8 = 8/7
Conservation/3 = * Conservation/6 = 6/5 Conservation/9 = 9/1
Social/3 = 3/2 Social/6 = 6/7 Social/9 = *
Sexuel/3 = 3/4 Sexuel/6 = * Sexuel/9 = 9/8

Tableau 2 : Les relations type/aile/sous-type
* Indique une zone d'incertitude. L'individu peut résonner avec les deux ailes, ou aucune ;
l'aile peut varier en fonction du sexe, ou changer en fonction des circonstances.

J'adresse cette observation aux lecteurs d'Enneagram Monthly afin qu'ils en débattent, et la confirment ou la réfutent, et qu'ils présentent leurs observations sur les raisons d'être de telles relations.

À suivre… le mois prochain.

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Mario Sikora peut être joint à mario@enneagramconsulting.com.