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Ennéagramme et modèle du développement humain


Wallace

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Bonjour Fabien,

 

Voilà un sujet que je voulais aborder depuis longtemps et la fermeture prochaine du forum me pousse à l'action. Dans la conversation sur le type du Christ que j'avais initiée, tu avais écrit ceci auquel je repense souvent :

Le 27/08/2001 à 10:44, Fabien Chabreuil a dit :

Une chose caractérise l'être humain à ses débuts : une faiblesse physique importante par rapport aux animaux qui cherchaient à occuper le même territoire et à se procurer la même nourriture. Pourtant, très vite, l'homme a prévalu grâce à son intelligence mise au service de sa volonté de domination. La hiérarchie des centres est claire : Instinctif, Mental, Émotionnel. Le type est donc 8 alpha. […]

À un moment donné, l'être humain est suffisamment bien installé sur la planète pour que l'attitude dominatrice du 8 ne soit plus indispensable à sa survie. Du point de vue de l'Ennéagramme, son évolution psycho-spirituelle peut alors emprunter deux voies, celle de la désintégration en 5 alpha ou celle de l'intégration en 2 alpha. Est-il besoin de dire que cette dernière est préférable ?

 

À l'époque tu n'enseignais pas la spirale dynamique, je crois. Aujourd'hui considères-tu que l'analyse précédente est caduque ou au contraire ce modèle peut-il nous servir de boussole d'action sociale ?

 

Très amicalement,

Wallace

Wallace - 6 aile 7

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Fabien Chabreuil

Bonjour à tous,

 

Effectivement quand j'ai écrit ces lignes, j'apprenais la spirale dynamique et ne l'enseignait pas encore.

 

J'avais formulé l'hypothèse que tu rapportes dans le cadre suivant :

Le 27/08/2001 à 10:44, Fabien Chabreuil a dit :

Il est classique dans le monde de l'Ennéagramme d'attribuer un type à la culture d'un pays. Je voudrais généraliser en donnant un type global à l'humanité à telle ou telle période de son développement.

 

Moi aussi, j'y ai souvent repensé. Alors, si vous attendez un message optimiste de 7, il vaut mieux arrêter de lire. Je fais une réponse assez globale ; les détails pourraient faire l'objet d'un petit livre !

 

Il est évident qu'une partie de l'humanité s'est lancé dans une course à la connaissance qu'on peut voir comme un mouvement en 5. C'est clairement un mouvement de désintégration, passion et fixation me semblant bien visibles. Ça, c'est ce que j'écrivais en 2001 et qui est évidemment toujours d'actualité.

 

Il semble hélas que le mouvement de désintégration se poursuive. Après tout, la civilisation des loisirs, l'incroyable narcissisme montré par beaucoup, ou la dictature du rire manifestée par exemple par l'omniprésence des humoristes et des imitateurs notamment à la radio et à la télévision entrent quand même bien dans un mouvement en 7.

 

Sur cette pente fatale, après le 7, il y a le 1. Les signes de la colère face à l'injustice ne sont-ils pas plus que perceptibles ?

 

Ce qui est sans doute inexact dans ce que j'écrivais était de présenter cette évolution comme celle de l'humanité alors qu'elle n'est peut-être que celle d'une partie de l'humanité : faisons-nous partie "des hommes qui se sont trompés" comme le disent Tarahumaras ? Le problème est que c'est cette partie de l'humanité qui a aujourd'hui le pouvoir.

 

Les trois scenarii de Clare Graves sont encore possibles : le premier correspond à une prolongation de la désintégration dans le modèle de l'ennéagramme, le second à une stabilisation de la désintégration et le troisième à un sursaut intégratif.

 

"Aujourd'hui considères-tu que l'analyse précédente est caduque ou au contraire ce modèle peut-il nous servir de boussole d'action sociale ?"

La spirale dynamique est un modèle, et je pense qu'il est préférable d'avoir plusieurs modèles dans sa poche. D'abord la réalité est plus complexe que n'importe quel modèle, et des modèles différents peuvent en cartographier des aspects différents.

 

Ici, je pense que les deux modèles sont complémentaires. Ce que je proposais en 2001 et complète ici détaille la descente aux enfers du niveau ORANGE tel que nous le vivons. Les deux modèles finalement convergent quant aux solutions : pour la spirale dynamique, il s'agit d'aller en VERT, un vMème émotionnel où l'on prend soin de l'humanité ; pour cette utilisation de l'ennéagramme, il s'agit d’annihiler les effets négatifs de la désintégration externe (recul comparable à un creux gamma sur la spirale dynamique) puis de choisir la voie vers le 2, un type émotionnel où l'on prend soin des autres. Ouf, j'échappe à la schizophrénie !

 

Très amicalement,

Fabien

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Bonjour Fabien,

 

Je te remercie de ta réponse rapide. La suite de la désintégration correspond bien à ce que j'avais imaginé mais je me demandais s'il ne s'agissait pas de la tendance du 6 à voir le pire. Par contre, je n'avais pas perçu le parallèle entre les deux modèles dans la recherche des solutions. C'est éclairant et rassurant de trouver cette cohérence.

 

Très amicalement,

Wallace

Wallace - 6 aile 7

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Fabien Chabreuil

Bonjour à tous,

 

Mercredi, j'écrivais ceci :

Le 09/01/2019 à 11:29, Fabien Chabreuil a dit :

Sur cette pente fatale, après le 7, il y a le 1. Les signes de la colère face à l'injustice ne sont-ils pas plus que perceptibles ?

 

Et hier jeudi, je recevais le numéro de février — oui, le 10 janvier, ce n'est pas une faute de frappe ! — de mon cher Philosophie Magazine. Le titre du dossier du mois : "Qu'est-ce qu'une saine colère ?"

 

Dans ce dossier dont je n'ai pas terminé la lecture, il y a une interview de Pankaj Mishra par laquelle j'ai commencé. Pankaj Mishra est un intellectuel indien qui a publié un ouvrage intitulé L'Âge de la colère dont la traduction française paraîtra début avril. En voici le tout début :

Pankaj Mishra a dit :

Selon vous, la colère est la grande passion politique de notre temps. Comment la caractérisez-vous ?

Il y a un sentiment de trahison qui est expérimenté à l'échelle mondiale. Les peuples se sont vus promettre par les élites dirigeantes un degré plus élevé de sécurité, de stabilité et de prospérité. Or la croissance n'a profité qu'à un petit nombre regroupé dans les grandes métropoles et qui était déjà privilégié. De sorte qu'une fracture s'est mise en place dans des contextes partout différents entre ceux qui ont accès aux bénéfices de la mondialisation et ceux qui se sentent abandonnés.

 

De Daech au Brexit, de l'élection de Trump au développement du nationalisme en Inde ou en Russie, un même processus est à l’œuvre que vous n'hésitez pas à appeler une « guerre civile mondiale » — une guerre civile « mentale » et « intime » autant que sociale et politique. Que voulez-vous dire ?

Je cherche à saisir une nouvelle forme de polarisation de la société, qui ne peut plus être figurée dans les catégories classiques de gauche et de droite, et qui n'est pas prise en charge par les partis politiques existants. Cette guerre civile est le produit d'un âge où les institutions intermédiaires qui médiatisaient le rapport avec le monde — syndicats, partis, corporations, églises — ont vu leur autorité s'effacer. De plus en plus d'individus se trouvent impuissants et solitaires, alors que l'on attend d'eux qu'ils soient des entrepreneurs individuels compétitifs sur le marché. Ils sont écrasés par le poids de cette nouvelle compétitivité où ils doivent rivaliser avec les autres sans le support officiel de l'État et des institutions sociales intermédiaires. Du coup, ils sont non seulement divisés socialement mais aussi animés par des déchirements intérieurs qui les rendent étrangers à eux-mêmes et aux autres. Nous sommes face à un étrange désordre psychique qui a été très tôt diagnostiqué par Rousseau lorsqu'il craignait l'avènement d'une société régie par l'intérêt individuel et gangrenée par l'envie, l'insatisfaction et la vanité. Ce sont ces pathologies qui se combinent pour former une guerre civile de basse intensité.

 

Je conseille donc sans réserve la lecture de ce numéro de Philosophie Magazine à ceux que cette discussion intéresse, et sans doute plus tard celle du livre de Pankaj Mishra.

 

Très amicalement,

Fabien

 

Source : Pankaj Mishra (propos recueillis par Martin Legros). « Il y a un sentiment mondial de trahison qui est expérimenté à l'échelle mondiale ». Philosophie Magazine. N° 126, Février 2019, p. 60-64.

Ressource : Pankaj Mishra. L'Âge de la colère : Une histoire du présent. Paris (France), Zulma, 2019. [Version Kindle]

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Bonjour Fabien,

 

Je remarque que Pankaj Mishra dit : "gangrenée par l'envie". Penses-tu que ce soient déjà les prémices du mouvement vers le 4 ? Ça commence à me faire peur cette discussion.

 

Très amicalement,

Wallace

Wallace - 6 aile 7

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Fabien Chabreuil

Bonjour à tous,

 

"Penses-tu que ce soient déjà les prémices du mouvement vers le 4 ?"

L'envie fait partie du kit de base de notre ORANGE. J'ai souvent dit qu'il est fondé sur la frustration, par exemple dans les articles du blog “Je sais aujourd'hui saluer la beauté” ou “Alleluia ! L’iPad est là !”. Créer l'envie des biens matériels déclenche les achats et fait tourner la machine. Il est significatif que l'on voit souvent dans les hebdomadaires d'information des publicités pour des produits que le lectorat typique du journal ne peut pas se payer. Dans un premier temps, cela déclenche le désir mais ce désir est accompagnée d'espoir : "Un jour, je me la paierai cette Rolex !" Puis avec le temps et la montée des inégalités, l'espoir disparaît, et le désir devient envie et est accompagné de désespoir, de colère et d'amertume. C'est là qu'il y a pour certains désintégration en 4.

 

Pankaj Mishra utilise pour expliquer ce mélange de colère et d'envie la théorie du ressentiment mimétique de René Girard. Pour ceux qui ne connaîtrait pas les travaux du génial et regretté René Girard et qui donc ont la chance de pouvoir découvrir son œuvre passionnante, je conseillerai de lire La Violence et le sacré [Version Kindle] et Des choses cachées depuis la fondation du monde [Version Kindle], qui sont des textes fondateurs.

 

Très amicalement,

Fabien

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