Questions à propos de la peur de base

[Kiemantine]

Bonjour à tous,

 

Je souhaiterai avoir plus d'informations concernant la notion de peur de base. J'ai Le Grand livre de l'ennéagramme chez moi. Je sais donc quelle est la peur de base de mon type (être perdue et séparée) et le fonctionnement décrit fait sens pour moi.

 

Mais ce que je n'arrive pas à comprendre, c'est pourquoi je me sens tellement désarmée, désemparée et sans ressource en présence de cette peur ? Cette peur vient de loin et elle me prend aux tripes. Lorsque je ressens cette peur, je suis prête à faire n'importe quoi pour que cela cesse. À présent que je l'identifie facilement, je la crains : lorsque je la vis, je n'ai plus aucune confiance en ce que je ressens ou exprime (déjà que cela ne m'est pas facile…).

 

Je m'aperçois que, dans ces moments, tous les mécanismes de mon type sont présents et un des moyens de tenir ma peur à l'écart est de prendre conscience que soit la passion soit la fixation (soit les deux) sont à l'œuvre. Mais ce sentiment est insidieux et il revient toujours rapidement. Je constate aussi que mon mécanisme de défense est très efficace pour éloigner cette peur. Jusqu'à la prochaine fois.

 

En résumé, j'ai l'impression que l'évitement de cette peur me gouverne beaucoup plus que l'évitement du conflit. Pourquoi ? Et que faire pour apaiser cette peur ?

 

Merci d'avance pour vos réponses.

Amicalement,

Kiemantine

[Fabien Chabreuil]

Bonjour Kiemantine,

 

Dans le cas du 9, la peur de base est assez proche de la false core, et ce que tu décris me fait penser que c'est plutôt celle-là que tu vis. J'explique pourquoi ci-dessous.

 

"Mais ce que je n'arrive pas à comprendre, c'est pourquoi je me sens tellement désarmée, désemparée et sans ressource en présence de cette peur ? Lorsque je ressens cette peur, je suis prête à faire n'importe quoi pour que cela cesse."

La false core est la chose la plus horrible dont nous sommes convaincus sur nous-même et nous faisons tout — TOUT ! — pour ne pas en être conscient.

 

Personnellement, j'ai découvert ma false core en lisant une liste, et non pas — comme cela devrait être — dans l'environnement sécurisant d'un stage ou d'une relation accompagnée. Quand je suis arrivé à celle de mon type, j'ai fondu en larmes. Je connais plein de personnes ayant vécu une expérience semblable.

 

"Je m'aperçois que, dans ces moments, tous les mécanismes de mon type sont présents et un des moyens de tenir ma peur à l'écart est de prendre conscience que soit la passion soit la fixation (soit les deux) sont à l'œuvre. Mais ce sentiment est insidieux et il revient toujours rapidement. Je constate aussi que mon mécanisme de défense est très efficace pour éloigner cette peur. Jusqu'à la prochaine fois."

Oui, l'ego a été créé pour se prouver que la false core est fausse. C'est pourquoi, on ne peut pas lutter contre elle, car cela ne fait que renforcer l'ego. On peut juste s'en désidentifier. Il existe pour cela des techniques spécifiques que nous voyons dans le stage Néti Néti, mais en attendant de le faire, tu peux appliquer les techniques du stage Éveil que tu as suivi.

 

Quand nous sommes confrontés à notre false core, automatiquement notre ego se met à briller de tous ses feux afin de nous prouver qu'elle est inexacte. D'une certaine manière, l'ego nous console de la douleur de la false core.

 

"En résumé, j'ai l'impression que l'évitement de cette peur me gouverne beaucoup plus que l'évitement du conflit.

Oui, la false core est en amont de l'ego.

 

Très amicalement,

Fabien

[Théolix]

Bonjour Kiementine, Fabien et lecteurs,

 

La découverte de ma false core, dans un endroit sécurisant puisqu'en stage, ne m'a pas fait pleurer (émotionnel réprimé ?) ; elle a quand même été une grande révélation expliquant beaucoup de mes automatismes (sinon tous).  À partir de cette découverte, je peux en m'auto-observant mettre en pratique multi-quotidiennement les exercices appris au stage Néti-Néti. Mon ego me rattrape sans cesse et la pratique est incessante… et tellement libératrice, mais je reste quelquefois tellement bien dans mon ego (surtout dans l'intempérance d'ailleurs)  que je prends conscience qu'il n'y a rien de magique : la désidentification est un travail de tous les jours (le 7 adore le mot "magique") et elle est une partie importante de prise de conscience de l'illusion d'identité.

 

Très cordialement,

Théolix

[Sevan]

Bonjour,

 

Kiemantine je trouve que tu es bien parvenue à observer et analyser le lien entre cette "peur" et les mécanismes de notre ennéatype.  Je suis d'accord avec l'analyse de Fabien par rapport à ce que tu décris. Pour ma part, je n'ai pu donner un sens à la peur de base du 9 uniquement après avoir découvert ma False Core et en faisant le lien entre les deux.

 

Amicalement,

Sevan

[Jérôme]

Bonjour à tous,

Je voudrais partager avec vous un témoignage et une réflexion peut être en lien avec ma peur de base d'être perdu et séparé, et peut être aussi avec ma false core, mais je ne la connais pas pour l'instant (du moins consciemment), chaque chose en son temps.

Je me suis rendu compte il y a quelque temps de mon extrême sensibilité aux situations où des enfants sont séparés de leur parents, notamment quand cette séparation est définitive. L'exemple déclencheur fut le film L'Étrange destin de Benjamin Burton où le héros naît avec l'apparence physique d'un vieillard, puis rajeunit physiquement et mentalement tout au long de sa vie, pour mourir avec l'apparence physique d'un bébé dans les bras de sa femme, qui elle a vieilli normalement, et qui lors de cette scène finale ressemble plutôt à sa mère. Il meurt de manière apaisée, attendue par lui et sa femme. Cette scène a déclenché chez moi une immense tristesse, et j'ai pleuré pendant encore 10 minutes en sortant du cinéma, de manière absolument non contrôlable, comme si une porte s'était ouverte en moi, laissant échapper un flot d'émotions accumulé dans un endroit non connu de moi-même. Je ne suis pas très habile à nommer les émotions, mais je sais dire que ce n'était pas une tristesse habituelle, mais une tristesse quelque peu apaisée, j'étais gêné mais ça me faisait du bien de pleurer ainsi.

Depuis j'ai réalisé que je traînais en moi une liste de scènes qui me reviennent parfois et me hantent, et que les plus marquantes d'entre elles sont sur ce thème de la séparation parent-enfant : un spot sur la sécurité routière ou une maman s'affole de ne pas voir son bébé se "réveiller" dans son fauteuil suite à un accident, un reportage sur un enfant qui se retrouve seul survivant d'un accident de voiture, la bande annonce du film La Rafle où on voit des enfants séparés de leurs parents de force, etc. Le summum de la difficulté étant pour moi des images de scènes réelles. J'ai clairement en tête une vidéo historique d'un camp de concentration où on voit un enfant de 3 ou 4 ans arraché à sa mère. La photo du dernier article du blog Et à l'aurore m'a paralysé pendant à peu près une heure lundi matin. [compulsion anti conflit avec Fabien=ON] Fabien, je ne remets pas du tout en cause ton choix, je pense qu'il est particulièrement important aujourd'hui que nous nous rappelions que cela a existé il n'y a pas très longtemps en Europe.[/compulsion]

Ces scènes sont probablement difficiles pour beaucoup de monde, et bien d'autres sont également terribles, mais je constate avec un peu de recul que ce thème est de loin le plus sensible chez moi, et je me demande si c'est en lien avec ma peur de base.

Vos avis et témoignages de 9 ou autres ennéatypes sur ce thème m'aideront peur être à mieux explorer cette fibre sensible.

À très bientôt,
Jérôme

[Fabien Chabreuil]

Bonjour Jérôme,

Nous allons attendre les témoignages des 9, mais ta réaction me semble effectivement liée à ta peur de base et à ta false core, et en même temps, elle me semble suffisamment forte pour qu'il soit possible qu'elle renvoie en plus à une expérience personnelle.

"J'ai réalisé que je traînais en moi une liste de scènes qui me reviennent parfois et me hantent, et que les plus marquantes d'entre elles sont sur ce thème de la séparation parent-enfant."
Il me semble souhaitable de faire sur ces scènes la technique de déstructuration de la régression en âge avec ressource que tu as apprise dans le stage Éveil. Attention toutefois, ces transes peuvent être des écrans en masquant d'autres éventuellement douloureuses. La technique est donc à faire dans un environnement sûr et à un moment où tu peux être aidé si nécessaire.

Très amicalement,
Fabien

[Sevan]

Bonjour Jérôme,

La séparation parent-enfant est effectivement l'une des situations à laquelle je suis sensible, qui peut me toucher au point de pleurer, et que j'ai lié à ma false core une fois celle-ci découverte. Ceci dit, c'est plus un contexte global, les retrouvailles pouvant avoir le même effet : je me souviens du film L'Été de Kikujiro, où un jeune garçon décide de partir chercher sa mère, accompagné par un vieux yakusa… En particulier d'une scène où le garçon prend la main de Kikujiro. Comme il est analysé dans le ciné-agramme, je ne raconte pas tout et je le recommande vivement.

Par ailleurs, il y a d'autres situations que je lie à ma false core, et je n'ai pas de liste précise ni de "scènes qui me hantent"…


Sevan

[Jérôme]

Bonjour à tous,

 

"Elle me semble suffisamment forte pour qu'il soit possible qu'elle renvoie en plus à une expérience personnelle."

J'ai discuté de l'exemple de Benjamin Burton il y a quelques mois avec une personne qui animait une journée sur l'intelligence émotionelle. Il m'avait déja donné cette piste. Selon lui cela me rappelait un vécu de séparation difficile, probablement avec ma mère. Il a précisé qu'il ne s'agissait pas forcément d'une grosse séparation, mais d'une séparation que j'avais vécu comme difficile, même si elle était peut-être anodine. La seule séparation significative que j'ai pu retrouver dans mon histoire est quand je suis allé chez une nourrice, tout petit, alors que ma mère travaillait encore. J'avais assez mal vécu cela, mais je n'en ai moi-même aucun souvenir. Peut être est-ce là la clé, peut être pas… Je ne sais pas comment aller plus loin pour l'instant.

 

"Il me semble souhaitable de faire sur ces scènes la technique de déstructuration de la régression en âge avec ressource que tu as apprise dans le stage Éveil"

Merci Fabien pour ce précieux conseil. Je n'avais pas identifié ces situations comme des régressions en âge, et il est vrai que je n'ai par ailleurs pas beaucoup traqué cette transe depuis le stage Éveil de l'an dernier. Je l'ai révisée et pratiquée ce soir en rentrant du travail, car j'avais du mal à me sortir d'une discussion désagréable vécue dans l'après midi. Je me tiens donc prêt pour les prochaines régressions.

 

"Je me souviens du film L'Été de Kikujiro. [...] Comme il est analysé dans le ciné-agramme, je ne raconte pas tout et je le recommande vivement"

Merci Sevan, ça tombe bien, je l'ai dans ma liste d'attente Ciné-agramme, et du coup je vais me faire une scéance ce soir. Merci aussi pour ton témoignage.

 

Je reste intéressé par d'autres avis de 9 ou d'autres ennéatypes bien entendu.

À très bientôt,

Jérôme

[Isabelle P]

Bonjour à tous,

Bonjour à toi Jérôme,

 

J'ai été très touchée par ton témoignage et par la sincérité de ton partage.

 

La séparation enfant-parents est également un sujet sensible pour moi. Il est toutefois étroitement lié à mon vécu personnel, ayant été séparée de mes parents et élevée jusqu'à l'âge de 4 ans par mes grands-parents, situation perçue comme un véritable rejet et abandon lors de l'adolescence.

 

L'Étrange destin de Benjamin Burton fait effectivement partie de ces films qui ont provoqué chez moi une tristesse particulière et profonde avec un sentiment d'incomplétude et de vulnérabilité extrême. Je me rappelle que ce film avait ravivé mon besoin de fusion avec l'autre.

 

L'émotion la plus violente jamais ressentie fut déclenchée par le film Dancer in the dark de Lars von Trier. Ce fut un véritable déchirement intérieur. Je ne peux d'ailleurs toujours pas évoquer ce film sans avoir les larmes qui montent. Le thème de la séparation mère-enfant y est abordé mais sous l'angle du sacrifice de la mère. La scène finale de pendaison fut à la limite du supportable, mes larmes ruisselaient, mon corps tremblait. Mon état de bouleversement fut tel qu'après projection du film, je hurlais de douleur puis restais tétanisée pendant deux heures dans ma voiture, incapable d'affronter le monde extérieur.

Ma sœur qui m'accompagnait fut plongée dans le même état, je ne vous explique la tête de nos parents lorsqu'ils nous ont vu revenir du cinéma. 

 

Aujourd'hui encore, je m'explique difficilement pourquoi ce film m'a tant bouleversée. Est-ce le thème du sacrifice maternel qui aurait déclenché un tel ravage intérieur ? Il me semble également avoir identifié que le personnage principal de Selma, marqué par l'abnégation, pouvait être 9…

 

J'espère pouvoir lire d'autres partages sur ce sujet.

 

Bien à vous,

Isabelle

[Jérôme]

Bonjour Isabelle et merci pour ton témoignage,

 

Je dois dire que ton bref résumé du film Dancer in the dark m'a glacé le sang, et qu'il y a peu de chance que je le regarde. D'habitude, j'aurais copié-collé ton paragraphe qui en parle en italique dans ma réponse pour faire le lien plus directement, mais quelque chose me retient de le faire, comme si c'était trop dur de dupliquer de tels mots.

 

Pour l'instant je vois donc que ce thème de séparation parent-enfant est présent chez le 9, plus ou moins renforcé par le vécu de chacun. Y aurait il sur le forum des 9 pas ou peu sensibles à ce sujet ?

 

À très bientôt,

Jérôme

[Isabelle P]

Bonjour Jérôme,

"Je dois dire que ton bref résumé du film Dancer in the dark m'a glacé le sang, et qu'il y a peu de chance que je le regarde."
L'intensité de ma réaction et de celle de ma sœur semblent toutefois supposer un renvoi à un vécu personnel. Je connais des personnes qui ont vu ce film et qui n'ont pas du tout été touchées.

Cela reste, à mon sens, une expérience, qui même douloureuse, a constitué un tournant psychologique majeur dans ma vie. Un condensé de 10 ans de psychanalyse en 140 minutes, c'est forcément lourd à intégrer. 

Sans vouloir te convaincre de voir le film, je joins à ce message un extrait qui me parait être l'une des plus belles scènes de cinéma jamais filmées  :
 

Belle journée à toi,
Isabelle