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Rien en commun
Analyse

Rien en commun : David BasnerDavid Basner (Tom Hanks) : 7

Dès le prégénérique, nous savons que David aime profiter des plaisirs de l'existence. Dans le vol qui le ramène à Chicago après ses vacances, il est en train de lutiner, voire un peu plus, une hôtesse de l'air – "C'est quoi là ? Ça fonctionne comment ?" –, opération qui est interrompue par la traversée d'une zone de turbulences. Comme le passager du siège qui est devant lui se retourne et le regarde avec indignation, il justifie la situation : "Je prends souvent ce vol, alors j'ai un petit bonus."

Après le débarquement, il se change dans sa voiture et arrive à son travail où il enchaîne les plaisanteries avec chaque personne qu'il croise : "Il existe vraiment cet État. C'est pas vrai, je croyais que c'était un nom d'aromate pour les pizzas.", "Enfin des mecs qui se tuent au boulot.", "Quel talent, ces petites chattes. Je suis revenu, ça vous fait plaisir ?", "Doris, je t'ai manqué ? Oui, bien sûr." Au passage, il repère une femme assise dans la salle d'attente :

  David : Cette dame qui remplit le questionnaire, c'est pour travailler ici ?
  Polly : Mais oui, elle…
  David : [Il l'interrompt et apostrophe la candidate.] Renoncez-y, Madame. Fuyez. Derrière ces portes, c'est l'enfer. [Kathy entre dans la salle] Vous êtes la plus belle, Kathy. Mais dites la vérité à cette pauvre femme. L'agence de pub BG & L, c'est le bordel.

Il blague avec ses collègues sur le licenciement de Clemens qui "était un sale con. […] Il paraît qu'il planquait des montagnes de dope dans son petit cagibi." Bien sûr, il propose à ses collègues féminins de leur montrer son bronzage. Promu, il a un nouveau bureau avec une fenêtre : "Chic, s'il y a des accidents, je serai aux premières loges."

David a ramené une babiole à une des secrétaires qu'on verra pendant tout le film afficher un air triste face à ses plaisanteries : "Je vous apporte un cadeau, un souvenir des Bahamas. Et pourquoi ? Parce que je suis votre groupie, vous êtes la plus marrante." Jusqu'au générique de fin, sa retenue en fait une cible de choix pour les taquineries de David. Par exemple, il passe avec des collègues et lui enlève le bureau sur lequel elle était en train de travailler : "Écoutez, c'est marrant. Ici, vous avez pas osé rire, c'est le bureau, d'accord, mais en rentrant, dans les embouteillages, je parie que vous allez vous pisser dessus." Ce n'est que quand David déprimera qu'on apprendra qu'elle apprécie son attitude :

  Secrétaire triste : Vous ne me faites plus jamais de blague, Monsieur Basner.
  David : Ça vous faisait rigoler ?
  Secrétaire triste : Ouais.
  David : Moi aussi.

Lorsqu'il assiste à l'accouplement des chevaux dans l'écurie d'Andrew, David déclare : "Moi, j'exigerais des lumières tamisées. […] Et après, il se passe quoi ? Ils prennent un verre et une cigarette." Ce besoin de plaisanter est là, indépendamment de son ressenti réel. Quand, ivre et dépressif, il va chez Donna en plein milieu de la nuit et qu'elle lui dit "Attends et sois calme. Reste assis ! Bouge pas !", il tire la langue et halète comme un chien. Lorsqu'il vient chercher son père à l'hôpital, il dit à l'infirmière qu'il a "tout signé et [que] tout est payé", puis il lui demande : "À propos, vous êtes à la commission ?"

Les messages de son répondeur téléphonique sont aussi l'occasion pour David de monter sa gaieté ou de faire des canulars : "Salut, vous avez enfin trouvé David Basner. Je cherche des nouvelles voix pour les pubs radio, alors tentez votre chance de passer une audition minute. Vous me dites votre nom et votre numéro. Vous y êtes ? Moteur !" Andrew en sera la victime : "Bonjour, ici David Basner. [Silence permettant à l'interlocuteur de parler] Voilà. Attendez, attendez, il y a de la friture sur la ligne, j'entends très mal, vous pouvez parler plus fort. [Silence permettant à l'interlocuteur de parler] Attendez, j'entends rien, je vous dis. Vous pouvez parler plus près s'il vous plaît. [Silence permettant à l'interlocuteur de parler] Oh, ça va ! C'est pas la peine de hurler. En fait, c'est pas à moi que vous parlez, c'est à mon répondeur. Alors c'est pas en gueulant comme ça que ça fera arriver le bip plus vite. Alors, on se calme, on attend le bip et merci de votre appel."

Ses pitreries rendent David populaire, même si – émotionnel réprimé oblige – elles sont parfois un peu agressives. C'est le cas du deuxième message de répondeur ci-dessus. Dans un pub, un ami lui présente deux filles qu'il est en train de draguer, Sheila et Louise ; David rétorque : "Ça va ta femme ? Tu as perdu ton alliance." Quand il reçoit des stagiaires à l'agence, il leur dit qu'ils pourraient "finir comme Monsieur Yaka", petite marionnette de papier à qui on vient de couper la tête ; "David adore plaisanter", se croit obliger de préciser Ted devant l'air abasourdi de son auditoire.

Clownerie et rationalisation peuvent aller de pair :

  Donna : Quelle surprise de te voir ici, ou ailleurs du reste !
  David : J'ai oublié quelque chose ?
  Donna : Tu avais promis que tu viendrais voir ma pièce, tu ne te rappelles pas ? Mais pourquoi est-ce que tu ne veux pas admettre que le théâtre expérimental t'ennuie ?
  David : Non, non, c'est pas vrai. J'adore ça. Moi aussi, j'expérimente un truc. Je voulais voir si je saurais apprécier une soirée au théâtre…
  David et Donna
en chœur :
… sans être obligé de venir au théâtre.

Quand il y a un problème, la première réaction de David est de dédramatiser ; la seconde est de tenter d'y échapper :

  Max : Trente-six ans de mariage, et elle me laisse tomber. Elle a pris ses fringues, elle a pris ses casseroles, ses assiettes, le mixeur, et voilà. Il est minuit, et je suis tout seul chez moi avec un vieux steak haché dans du papier aluminium.
  David : Écoute, écoute Papa, c'est… C'est un malentendu. Ça…
  Max : Non, c'est pas un malentendu. Quand il y a un simple malentendu, tu pars avec ta brosse à dents, pas avec le mixeur.
  David : Bon, écoute. Euh, là, je suis… Je suis en plein milieu… Est-ce que je peux te rappeler ?
  Max : [Il raccroche.]

David veut amuser la galerie, mais il s'agit surtout de s'amuser lui-même. Ce centrage sur soi est évident à tous. Même si cette phrase est à double sens — nous y reviendrons —, Cheryl lui dit : "Tu vois en moi quelque chose qui te plaît beaucoup. Tu te vois toi." David en est parfaitement conscient. À une fille d'un soir qui lui demande s'il a "quelqu'un dans sa vie", il répond : "Oui, non, enfin… J'ai moi. Ça compte ça. Quand je me vois, je suis… [Il est interrompu par la sonnerie du téléphone.]" Bien entendu, il attribue à cette attitude des côtés positifs :

  David : Je t'ai pas dit le scénario que j'avais inventé. Voilà. Je m'en allais, je devenais très riche, je m'installais dans un grand manoir, et mes parents venaient me voir une seule fois, et ils me disaient : « Oh, quelle jolie maison ! On t'aime beaucoup, David. » Je répondais : « Oh, je vous aime aussi. » Bon, alors, là-dessus, ils s'en allaient et ils mouraient.
  Donna : [Elle le regarde, silencieuse.]
  David : Ça veut dire que je suis dégueulasse ?
  Donna : Frank, le con que j'avais épousé, lui, c'était un vrai dégueulasse. Toi, tu es…
  David : [Il l'interrompt.] … infantile, immature, égoïste. Oui, je suis tout ça, mais tu sais combien de fric ça rapporte de fonctionner comme ça dans sa tête ?
  Donna : [Elle le prend par la main.] Oui, je sais. Sur le plan financier, grandir, c'est une grave erreur.

David est fier de sa réussite professionnelle. Au début de sa carrière, il "grattait comme grouillot" au service courrier, et il est devenu un publicitaire dont la créativité est reconnue. Il affiche une forte confiance en soi, avec les femmes qu'il drague ou comme quand il dit à Charlie qu'il veut devenir associé de l'agence :

  Charlie : David, je sais qu'il y a au moins deux autres agences qui t'ont fait des propositions. Tu les envoies sur les roses, ou je te fous par la fenêtre de ton beau bureau de rêve.
  David : Oh, Charlie, ils n'ont pas l'intention de me prendre comme partenaires, eux. Pourquoi je te lâcherais ?
  Charlie : Partenaire ? Boyle, Gargas, Lionel et Basner ?
  David : Comme John, Paul, George et Ringo.
  Charlie : Tu te mouches pas du pied.
  David : Non, disons que je suis plutôt capable.
  Charlie : Ah oui, oui, t'as le don de faire de jolis jingles de pub, mais c'est un commerce ici. On a besoin de nouveaux clients.
  David : Ah oui ? Alors, bouge pas.

En réalité, en accord avec la dichotomie du 7, il a moins confiance en lui que cela : "Ce qui est marrant, c'est qu'on nous prend pour des mecs très sûrs. C'est un gag, ça, non ?", dit Roger, le réalisateur des films publicitaires. Même s'il y a une part d'attitude purement commerciale, on sent la problématique de la peur du monde extérieur face à Andrew qu'il ne se risque jamais à contredire. Par exemple, ici au restaurant :

  Andrew : On prend juste un verre.
  David : Ah oui. [Andrew appelle le serveur.] Donnez-moi un vermouth-soda, je vous prie.
  Andrew : Quand je dis un verre, c'est un vrai verre.
  David : Donnez-moi une vodka on the rocks, je vous prie.

Ou dans la résidence secondaire des Woolridge :

  David : Comment ça « Il me les prépare » ? Mais j'en veux pas. Je ne me vois pas en train de me coltiner des cadavres de canard dans l'avion, moi.
  Andrew : [Il arrive avec un grand sourire en tenant une gibecière contenant les canards.] David, tenez, voilà ce petit cadeau pour rendre jaloux vos petits copains de la ville.
  David : Oh ouaouh ! Merci ! Oh génial ! Génial ! Vous savez, Monsieur Woolridge, cette ferme, c'est vraiment magnifique. J'adore, j'adore vos canards […].

Comme nombre de 7, mais peut-être de façon un peu plus excessive ("ils s'en allaient et ils mouraient"), David adhère à l'adage selon lequel on choisit ses amis, mais pas sa famille. Et un 7, cela préfère avoir le choix ! Il voyait donc ses parents le moins possible :

  Lorraine : Tu me racontais tes petites histoires enfantines, et puis voilà, tu te sauvais. Et puis tu es parti. Bon, ensuite, tu ne revenais pas très souvent. Ah si, pour Noël… Et un petit bouquet pour mon anniversaire.
  David : Des roses baccarat.
  Lorraine : Et un coup de téléphone pour la fête des Mères.
  David : Une fois, je t'ai appelé de Tahiti.

Il évitait d'ailleurs même d'en parler : "Je bosse avec toi depuis trois ans et je ne sais même pas si tu as des parents.", lui dit Jenny, sa secrétaire.

Autant dire que devoir s'occuper de sa mère et de son père qui se débrouillent assez mal seuls, le dernier étant en plus malade et au chômage, est une source de stress importante : "J'ai l'impression d'être une nounou au pair." Cela provoque dans un premier temps une désintégration forte : il boit, cesse de plaisanter au travail, engueule ses collègues. Dans un deuxième temps, quand il découvre la gravité de la maladie de son père, David cesse de chercher lequel de ses parents est responsable de leur séparation, et il essaye de reconstruire un lien avec son père : "Je voudrais le connaître un peu et, j'en sais rien, apprendre peut-être à me connaître aussi."

Il prend alors conscience de sa puissance personnelle – "Tu vois en moi quelque chose qui te plaît beaucoup. Tu te vois toi.", lui avait dit Cheryl – et il affronte Andrew auquel il n'avait jamais osé s'opposer :

  Andrew : Vous avez juste une heure. Faites votre valise et retrouvez-moi à l'aéroport. On a la présentation finale à New York cet après-midi.
  David : Ah oui, fallait que ça se passe aujourd'hui. Pardon, Monsieur Woolridge, je peux pas y aller.
  Andrew : Quoi ?
  David : Partez sans moi. Mon père est malade.
  Andrew : Ben, faut le mettre à l'hôpital.
  David : Il y est mais on l'opère, et je tiens à rester près de lui.
  Andrew : Pourquoi ?
  David : Pourquoi ?
  Andrew : Je viens de vous dire qu'on a un meeting à New York.
  David : Vous l'avez dit deux fois, et je vous redis « Pas question ».
    […]
  Andrew : Écoutez, je plaisante plus. Ça commence à m'énerver. Si vous voulez avoir ce budget [Il frappe le bras de David.], il va falloir vous magner le cul. Votre valise est prête ? Alors, je vais compter. Un, deux, trois…
  David : Nom de Dieu !
  Andrew : Quatre…
  David : C'est pas un gag. Oui, il compte.
  Andrew : Cinq, six, sept…
  David : On est au XXe siècle, Monsieur Woolridge, je ne suis pas un cul-terreux…
  Andrew : Huit, neuf…
  David : … qui bosse pour le seigneur. Dix ! Écoutez, J'ai fait tout le boulot, non ? Alors prenez le projet et faites-en ce que vous voulez, mais pour la cinquième fois, je vous dis que je n'irai pas à New York ni ailleurs et si vous posez encore une fois un doigt sur moi, je vous casse en deux, pauvre con !

David devient aussi capable de s'engager dans une vraie relation avec Donna, même s'il lui reste des progrès à faire quant à l'expression des émotions :

  David : Tu sais que tu es la seule petite amie que mes parents supportaient ?
  Donna : Dis plutôt que je suis la seule petite amie que tes parents aient vue de près.
  David : On est confortable. [Long silence. Il lui tend la main qu'elle prend.] Oui, très très confortable.
  Donna : [Long silence.] Je trouve aussi.

Identification avancée : David est un 7 α à aile 8. Les instincts de conservation (Clan : "On est une équipe", "J'ai un cadeau pour vous tous, mes petits camarades") social (Sacrifice) et sexuel (Imagination : "Tu as une fille avec toi ? Est-ce que tu la connais au moins ?", lui assène son père) sont tout trois bien visibles.

Rien en commun : Max BasnerMax Basner (Jackie Gleason) : 8

Max n'a jamais été très agréable à vivre : il ne parlait pas à son épouse et a élevé son fils "à coups de pied dans les fesses pendant 20 ans". Voilà que d'un seul coup, sa femme le quitte, il perd son travail, il est malade et risque une amputation des jambes, et il va avoir besoin de l'aide de David. On se désintégrerait à moins, mais pour un 8, il est difficile d'imaginer pires perte de contrôle et impuissance qui vont exacerber les mécanismes égotiques de l'ennéatype.

Dès la première tuile, le départ de Lorraine, l'agressivité est au rendez-vous :

  Max : Ici. Max. Max Basner, ton père. T'as entendu parler de moi ? Ça t'intéressera peut-être de savoir que ta mère m'a plaqué aujourd'hui.
  David : [Il décroche.] Quoi ?
  Max : Ah t'es là, hein ?
  David : Oui, oui, je suis là, et c'est quoi cette histoire de Maman.
  Max : Tu as une fille avec toi ? Est-ce que tu la connais au moins ?
  David : Il est marrant ce gag. Redis-moi ça pour Maman.
  Max : Pourquoi ? Je parle Chinois ou quoi ? Trente-six ans de mariage, et elle me laisse tomber. Elle a pris ses fringues, elle a pris ses casseroles, ses assiettes, le mixeur, et voilà. Il est minuit, et je suis tout seul chez moi avec un vieux steak haché dans du papier aluminium.
  David : Écoute, écoute Papa, c'est… C'est un malentendu. Ça…
  Max : Non, c'est pas un malentendu. Quand il y a un simple malentendu, tu pars avec ta brosse à dents, pas avec le mixeur.
  David : Bon, écoute. Euh, là, je suis… Je suis en plein milieu… Est-ce que je peux te rappeler ?
  Max : [Il raccroche.]

Dès le lendemain, David va voir son père qui enclenche le mécanisme de défense de déni :

  Max : [David sonne et frappe à la porte] Qui est là ?
  David : David.
  Max : Tu sais où est la clé.
  David : [Il ouvre la porte et rentre dans l'appartement. Max est assis dans son fauteuil en train de lire un journal et de fumer un cigare. Il ne dit pas un mot.] Bonjour.
  Max : Ouais.
  David : Ça va bien ?
  Max : Je me suis jamais senti mieux.
  David : Bon, qu'est-ce qui se passe ?
  Max : Tu vois, là, j'ai un cheval, un cheval qui peut pas perdre.
  David : Y a un truc qui brûle ou je deviens fou ?
  Max : Tu deviens fou. [David va retirer la poêle en train de brûler sur la cuisinière.] Ça te plaît ici maintenant que ta mère a embarqué les meubles ? Ta mère est une voleuse. Elle a pris le sofa, le grand fauteuil, les chaises, la table. Je dois bouffer sur la table de bridge. Ce matin, j'ai fait une réussite avec les toasts.
  David : [Il amène la poêle.] C'est quoi ça ?
  Max : Ah, c'est un steak. [Le steak est carbonisé, et Max essaye gentiment de le refiler à son fils.] Tiens, t'as envie d'un steak ? Vas-y. Je vais en faire un autre pour moi.
  David : J'ai pas envie d'un steak. Bon, c'est quoi cette histoire entre toi et maman ?
  Max : J'arrive jamais à trouver le ketchup. Où est-ce que ta mère cache ce bon Dieu de ketchup ?
  David : J'habite plus ici depuis dix ans. Je sais qu'elle rangeait la moutarde sur l'étagère du haut. T'as qu'à regarder.
  Max : Oui. Ah le voilà. Elle piaillait quand je mettais du ketchup. Question cuisine, elle valait rien. Le chien n'est pas mort de vieillesse, il s'est suicidé de dégoût. [Il s'attable devant son steak carbonisé.] Ah, ça, c'est une belle entrecôte. T'as déjeuné ? T'as pas faim ?
  David : [Il hoche la tête négativement.] Alors… Maman est partie ?
  Max : Tu vois quelqu'un d'autre ici ?
  David : Ça suffit. Tu m'expliques la situation ou tu préfères jouer aux devinettes ?
  Max : Je te l'ai dit au téléphone. Elle m'a lâché et elle est partie.
  David : Est-ce que tu sais où elle est ?
  Max : On s'en fout. Je vis beaucoup mieux sans elle. [Ironique.] Ah, c'était une vraie boute-en-train celle-là. Je suis encore plié en deux tant j'ai rigolé avec elle. Oh écoute. Tout ça, c'est pas ton problème. Je te fais perdre ton temps. Oublie ça.
  David : Oh, je t'en prie, hein, arrête ! T'as dû m'appeler trois fois cette année : une fois « bon anniversaire ! », une fois « t'as des places pour la finale de hockey ? », et la troisième, là, « ta mère viens de me quitter ». Tu me fais pas perdre de temps.
  Max : T'as déjà envie de te tailler ? Y'a presque dix minutes que t'es ici. Pourquoi ? T'as une blonde qui t'attend au pageot ? Une rouquine avec des jeans trop serrés et son nom brodé sur les fesses ? Quand j'avais ton âge, je me foutais de leur nom, je voulais juste leurs fesses. Oh, ça va ! Fous le camp !

Ensuite, viennent les graves soucis de santé liés au diabète. Les troubles oculaires induits font perdre à Max le contrôle de son véhicule. David vient le chercher mais il n'est pas question de lui avouer ce qui s'est passé : "Comment c'est arrivé, ça ne te regarde pas." Il n'est surtout pas question de se l'avouer. Comme Max ne peut complètement masquer à David ses difficultés de vue, il essaye d'abord de les nier :

  Max : J'y vois pas assez pour faire de la route, mais en ville, ça va.
  David : Non, non, tu lis la page des courses comme ça. [David met la paume de sa main juste devant ses yeux.]
  Max : Il faut étudier tous les parcours.
  David : Oui, tu les étudies de si près que tu as des taches d'encre dans le blanc des yeux. Allons-y.

Puis il refuse de se laisser accompagner chez l'ophtalmologiste : "Ne viens pas avec moi. Tu veux que les gens me prennent pour un vieux ringard qui la cerveau tout ramollo, c'est ça ?" David cède naïvement, et bien évidemment Max ne va pas au rendez-vous.

Parallèlement, Max a de plus en plus de mal à marcher, et que faire d'autre si ce n'est du déni ? "Quelle saloperie ce tas de ferraille ! Il faudrait être acrobate pour rentrer là-dedans.", dit-il pour justifier sa difficulté à monter dans la jeep de David.

Lors de la soirée dans la boîte de jazz, David découvre l'état catastrophique des pieds de son père et le traîne à l'hôpital. Son état est suffisamment grave pour qu'il risque une amputation, et donc le déni joue à nouveau :

  Max : Je veux foutre le camp de cette saloperie d'hôpital. Je vais bien. Je veux rentrer chez moi. Je veux descendre de ce fauteuil. Je veux m'en aller. Vous allez me lâcher, oui. Ôtez vos sales pattes. Je pourrais vous poursuivre pour négligence.
  David : Je me charge de lui.
  Docteur : D'accord mais faites-lui comprendre qu'il doit être opéré de toute urgence, dès demain matin si possible.
  Max : Demain, mon cul ! Je serai pas ici demain matin. Le mec qui ose me toucher la jambe, je le démolis. Le premier qui me touche, il est mort.
  David : Tu n'as pas le choix. Tu n'as pas le choix.

Bien entendu, cette faiblesse de santé doit rester confidentielle : "Il m'a fait jurer de ne pas le dire à ses copains. Il ne veut pas qu'on sache qu'il est malade."

Le déni s'exerce aussi sur l'impact que sa brutalité aurait pu avoir sur David :

  David : C'est dans cette maison que j'ai grandi à coups de pied dans les fesses pendant 20 ans.
  Max : Eh, on dirait que ça t'a plutôt réussi. Tu fais le clown dans une jeep, tu fais du fric, tu baises toutes les filles qui traînent. Alors il faut croire que j'ai pas tout raté.
  David : Et maintenant, t'es fier de moi, hein ? C'est ça ? Mais quand j'étais gosse, t'arrêtais pas de gueuler, tu me reprochais tout.
  Max : Je te reprochais quoi ? Arrête, je comprenais même pas de quoi tu parlais. T'étais empoisonnant, un chieur. Quand j'y pense, dès que j'allais pisser, toi, tu faisais des prières comme si on allait te châtrer. Ça va. Fous le camp d'ici !

"J'ai été élevé comme ça. J'ai fait du mieux que j'ai pu.", conclut-il, et c'est hélas sans doute vrai.

Quant à Lorraine qui était frigide et ne savait pas s'amuser, Max nie aussi une quelconque responsabilité : "Mais quoi, merde. J'étais son mari, j'avais le droit au plaisir. Seulement voilà, j'ai dû aller me l'offrir ailleurs. […] Fais pas le curé. Ton meilleur ami, c'est ta queue."

À la suite des échanges de cette soirée où David était venu lui demander ce qu'il avait fait à sa mère, Max ne répond plus quand David lui téléphone et refuse de lui ouvrir sa porte. Il accepte de renoncer à cette vengeance quand David lui demande pardon et lui propose de l'amener "écouter [s]a musique" dans un club de jazz.

Max explose de colère à la moindre occasion, comme quand David lui ramène les boutons de manchette que Lorraine a retrouvés dans ses affaires : "Alors, elle revient pas. [Il les jette par terre.] Qu'elle crève cette garce !"

À l'origine, la passion d'excès du 8 était nommée « luxure ». David a emmené Max faire des commissions dans une boutique où il essaye de voler une pomme :

  Max : [David vient de lui acheter des magazines pornographiques.] Tu sais, ça, c'est un avantage qu'on a toujours eu en commun.
  David : Qui donc ?
  Max : Mon père. Toi. Moi. On a le talent pour amener une fille au plumard.
  David : Euh, oui. Ça me fait plaisir que ça fonctionne encore. Dis, tu veux des pointes d'asperges.
  Max : Hélas, je peux plus. Non, non, ça fonctionne plus.
  David : [Il le regarde silencieusement et se retourne ne sachant comment réagir.]

Max a un accès extrêmement difficile aux émotions. Quand Lorraine vient le voir à l'hôpital avant son opération, il ne rêve au fond que de la voir revenir. Cela impliquerait qu'il le reconnaisse et qu'il réussisse à contrôler sa colère, et c'est donc impossible :

  Max : Assez ! J'ai plus la moindre goutte de sang. Alors, sortez d'ici ! [Il allume et voit Lorraine.] Ah.
  Lorraine : Je passais dans le quartier.
  Max : Quoi de neuf ? Ça va toi ?
  Lorraine : Bien, je vais très bien.
  Max : Je te crois sur parole. Je peux t'offrir quelque chose ? Un verre d'eau ? Ou un biscuit ? Ou de la morphine ?
  Lorraine : [Elle rit.] Un biscuit, je préfère.
  Max : David m'en a apporté plein. C'est un truc spécial diabète. C'est dégueulasse. C'est tout ce qu'on me laisse manger ici. Je pourrais crever demain, mais on me colle au régime. [Lorraine rit.] On dirait que je peux encore te faire rire, hein ?
  Lorraine : Quand tu voulais, tu savais très bien me faire rire. Dès le premier jour.
  Max : J'étais le vrai charmeur, c'est bien ça, hein ?
  Lorraine : Oh oui, avec tout le monde, sauf ma mère.
  Max : Oh celle-là…
  Lorraine : [Elle rit à nouveau.] Qu'est-ce que nous étions, Max ? Deux gosses, et sous prétexte que nous étions sortis ensemble deux ou trois fois, pan, on s'est mariés.
  Max : Deux ou trois fois, tu exagères. Je t'avais sortie une dizaine de fois au moins, et puis on se marrait bien ensemble. J'avais essayé de t'apprendre à conduire la vieille Chevrolet, tu te souviens ? [Ils se perdent tous les deux quelques instants dans cette évocation.]
  Lorraine : Si on avait plus de souvenirs heureux, de moments… On a vécu longtemps ensemble, Max, mais il y avait pas de complicité.
  Max : [La colère survient.] Lorraine, rigoler, toi, ça te faisait peur.
  Lorraine : [Elle pleure.] Mais pourquoi tu m'as pas appris ?
  Max : J'ai essayé. J'ai essayé, essayé des milliards de fois, bordel !
  Lorraine : Non ! Juste une fois ou deux, puis tu as lâché, tu m'as abandonnée.
  Max : Et toi ? Tu t'es donné du mal ? [Il se mure dans le silence.]
  Lorraine : Pourquoi on se parlait jamais ? Il fallait se parler, se dire ce qu'on avait sur le cœur. Tu sais comment on vivait, Max ? Comme des voisins de palier. Salaud, je te pardonnerai jamais de t'être détruit comme ça, de nous avoir détruits tous les deux. Mon Dieu, mais explique-moi ce qui s'est passé ! Je tenais à toi. Je tenais tant à toi.
  Max : Mon œil. [Lorraine sort. Max, resté seul, éteint la lumière et pleure.]

Ces larmes, c'est une des rares fois pendant le film où il manifestera une véritable émotion, autre que la colère. Une autre, c'est en sortant du bateau où il s'est réfugié après avoir appris qu'il avait perdu son travail, il sourit à des enfants qui jouent sur les quais. Seul ou avec des enfants, un grand classique chez les personnes réprimant l'émotionnel.

La maladie et le soutien de David le poussent lui aussi à s'intégrer. Un peu :

  David : Tu vas péter le feu.
  Max : Je péterai le feu à condition que ce ne soit pas toi qui m'opères.
  David : Oh mais j'aurais pu être un bon chirurgien.
  Max : T'aurais pu être un bon n'importe quoi.
  David : [Il a un sourire heureux.] J'ai eu une journée dingue à la boîte mais je pars pas. Je vais passer tout à l'heure à la maison, prendre une douche et me changer mais je serais près de toi. Demain matin quand on viendra te chercher, je serai ici. Quand on te ramènera, je serai ici.
  Max : En d'autres termes, tu seras ici. [David hoche la tête et se penche pour l'étreindre.] Pourquoi est-ce que tu ne files pas que je puisse dormir ? C'est con. Si je suis de mauvais poil demain matin, j'aurai du mal à savourer l'opération. [Max ferme les yeux et essaye de contenir son émotion.]

Après l'opération, lorsque Max est ramené dans sa chambre encore sous l'effet de l'anesthésie, David l'étreint et pleure. Max ouvre les yeux et, ne sachant quoi faire ou dire, ferme les yeux et fait semblant d'être toujours endormi. Quand il quitte l'hôpital après l'opération, il arrive à faire un deuxième compliment à David : "T'es la dernière personne sur qui j'aurais parié pour faire la route avec moi." Cela suffit au bonheur de son fils : entre personnes réprimant l'émotionnel, on se comprend à demi-mot !

Identification avancée : Max est un 8 α. Il manifeste à la fois l'aile 7 (rationalisation, intempérance) et l'aile 9 (oubli de soi). Les problématiques instinctives concernent la conservation (C--) et le sexuel (X++).

Rien en commun : Andrew WoolridgeAndrew Woolridge (Barry Corbin) : 6

Au premier abord, Andrew Woolridge, le P-DG de Colonial Airlines, peut passer pour un 8. Il est assez direct, plutôt cassant et assez agressif, comme lors de cette première rencontre avec David avec lequel un repas était prévu :

  David : Je suis ravi de vous rencontrer pour ce dîner. Au fait, je crois savoir qu'ici ils servent une extraordinaire bouillabaisse.
  Andrew : Pas de dîner.
  David : Euh, pardon ? [Atterré.] Pas de dîner ?
  Andrew : J'ai bégayé ? J'ai dit : « Pas de dîner. » Je dîne seul. On prend juste un verre.
  David : Ah oui. [Andrew appelle le serveur.] Donnez-moi un vermouth-soda, je vous prie.
  Andrew : Quand je dis un verre, c'est un vrai verre.
  David : Donnez-moi une vodka on the rocks, je vous prie.

Remarquons tout de suite que si Andrew était un 8, David viendrait d'échouer au test : c'est un faible incapable de camper sur ses choix et de s'affirmer. Andrew n'y attache pas plus d'importance que cela. Il va trouver David sympathique dès lors qu'il fait de l'humour : "Je voudrais vous poser une question, Monsieur. Vous utilisez uniquement une fourchette à salade, mais c'est facile pour la soupe ?"

Cette fameuse fourchette à salade, on a vu, quelques minutes avant, Andrew l'essuyer soigneusement, alors qu'il est dans un hôtel de grand luxe dans lequel il est vraisemblable que les couverts soient propres. Les précautions d'Andrew s'appliquent aussi au plat qu'il va déguster :

  Andrew : Vous savez ce qu'il faut faire quand on a avalé une arête.
  Maître d'hôtel : Oui bien sûr, Monsieur.
  Andrew : Dans ce cas, je prends la truite.

Ces précautions ne sont pas exceptionnelles. Charlie et David s'étaient renseignés sur Andrew avant ce premier contact :

  Charlie : Je t'ai pris un rendez-vous pour un dîner avec le P-DG, Andrew Woolridge.
  David : J'ai déjà des renseignements sur lui. Il a été pilote de la Marine. C'est tout ce qu'on sait de ce mec. Il est prudent, il est discret, plutôt conservateur. Tu vois, quoi, c'est pas du tout un mondain.
  Charlie : Tiens, peut-être qu'il est con, paranoïaque et qu'il n'a rien dans le crâne. Personne le connaît vraiment.

Le même non-dîner nous montre d'ailleurs un moment de répression du centre mental quand, à la demande d'Andrew, sa fille lui fait un topo sur David et son agence :

  Cheryl : Basner dirige le service « Conception et création ». Du talent mais un rien impulsif. C'est le genre à tout plaquer pour une petite minette.
  David : Et je porte des bikinis bariolés.
  Andrew : [Il regarde David soupçonneusement et se penche pour regarder son pantalon.]

Dès lors, David lui étant sympathique, il commence par l'inviter à jouer au golf avec lui et encaisse sans problème la blague du répondeur ("Votre sens de l'humour est spécial, Basner."). David le prévient : "Pour être tout à fait franc, je joue au golf pour la première fois de ma vie. Vous voulez savoir ? Je suis venu parce que je veux ce contrat avec Colonial Airlines." Andrew affirme alors n'attacher que peu d'importance à ce qui est habituellement une vertu cardinale pour les 8 : "Je suis sûr que pas mal de gens vous diraient que cette franchise est admirable. Moi pas."

Il se montre cordial avec David, l'invite dans sa maison de campagne pour une partie de chasse aux canards, et en profite pour essayer de le choquer et faire de l'humour :

  Andrew : Ma fille dit le plus grand bien de vous.
  David : Ah oui, tiens.
  Andrew : Elle dit que vous êtes un baiseur de rêve.
  David : [De stupeur, il tire un coup de fusil alors que son arme est en direction de la rivière.] Elle a dit ça ?
  Andrew : C'est mon bébé, elle me raconte tout.
  David : C'est étrange comme conversation entre une fille et son papa, non ?
  Andrew : C'est une femme très moderne. Je l'ai élevé pour en faire une vraie décisionnaire. Je l'ai élevée pour en faire un homme.
  David : Mon père a fait pareil pour moi mais je lui raconte pas tout.
  Andrew : Épargnez-moi l'histoire de votre vie. Allez, tirez encore. Ça nous fera une friture.

Il est heureux de lui donner des canards à ramener à Chicago : "David, tenez, voilà ce petit cadeau pour rendre jaloux vos petits copains de la ville." Il se laisse alors facilement manipuler par David lui faisant croire qu'il est connaisseur en chevaux :

  David : Vous savez, Monsieur Woolridge, cette ferme, c'est vraiment magnifique. J'adore, j'adore vos canards, et surtout les chevaux. Oui, je les adore. Je lisais dans le Tesio que l'étalon transmet 60 % des caractéristiques génétiques du produit et que la mère n'influe donc que pour 40 % dans la descendance. Je dois dire que je suis d'accord avec Tesio. C'est vraiment le meilleur expert.
  Andrew : Vous lisez Tesio ?
  David : [Il opine de la tête avec enthousiasme.] Comme un roman ! C'est mon livre de chevet.
  Andrew : [Ravi.] Dites à vos patrons que Colonial Airlines voudrait que vous présentiez un projet dès que possible.

On peut pourtant trouver la manœuvre un peu grosse !

Quand Andrew accepte la campagne imaginée par David, son approbation est plus réfléchie qu'instinctive. La dernière scène où apparaît Andrew est aussi significative de la différence entre un 8 et un 6 à dominante fortement contre-phobique :

  Andrew : Vous avez juste une heure. Faites votre valise et retrouvez-moi à l'aéroport. On a la présentation finale à New York cet après-midi.
  David : Ah oui, fallait que ça se passe aujourd'hui. Pardon, Monsieur Woolridge, je peux pas y aller.
  Andrew : Quoi ?
  David : Partez sans moi. Mon père est malade.
  Andrew : Ben, faut le mettre à l'hôpital.
  David : Il y est mais on l'opère, et je tiens à rester près de lui.
  Andrew : Pourquoi ?
  David : Pourquoi ?
  Andrew : Je viens de vous dire qu'on a un meeting à New York.
  David : Vous l'avez dit deux fois, et je vous redis « Pas question ».
  Andrew : [Il tourne le dos à David et se dirige vers Jenny.] Où est Charlie Gargas ?
  Jenny : À Los Angeles.
  Andrew : Appelez-le.
  Jenny : Il sera rentré qu'à 3 heures.
  Andrew : Tout de suite.
  David : Monsieur Woolridge, Ted Geller peut y aller.
  Andrew : C'est pas avec Geller que j'ai signé, c'est avec vous.
  David : Il connaît parfaitement la campagne.
  Andrew : [À Cheryl.] Parle-lui.
  Cheryl : Gasner, il est capital que ce soit vous qui présentiez le projet au Conseil d'administration. Vous avez d'excellents docteurs. Vous n'avez rien à craindre pour votre père.
  David : Non, c'est exact, mais je veux être là.

Par deux fois déjà, Andrew a essayé de régler le problème en faisant appel à une autorité extérieure, Charlie puis sa fille. Comme cela ne marche pas, il y retourne et joue au dur :

  Andrew : Ça veut dire que vous ne venez pas à New York ?
  David : Pour la quatrième fois, non, je n'irai pas à New York.
  Andrew : Écoutez, je plaisante plus. Ça commence à m'énerver. Si vous voulez avoir ce budget [Il frappe le bras de David.], il va falloir vous magner le cul. Votre valise est prête ? Alors, je vais compter. Un, deux, trois…
  David : Nom de Dieu !
  Andrew : Quatre…
  David : C'est pas un gag. Oui, il compte.
  Andrew : Cinq, six, sept…
  David : On est au XXe siècle, Monsieur Woolridge, je ne suis pas un cul-terreux…
  Andrew : Huit, neuf…
  David : … qui bosse pour le seigneur. Dix ! Écoutez, J'ai fait tout le boulot, non ? Alors prenez le projet et faites-en ce que vous voulez, mais pour la cinquième fois, je vous dis que je n'irai pas à New York ni ailleurs et si vous posez encore une fois un doigt sur moi, je vous casse en deux, pauvre con !
  Andrew : [Il s'éloigne calmement et, en passant, s'adresse à Cheryl.] Renvoie-le. [Il sort.]

À nouveau, Andrew rompt le combat et laisse la main à sa fille.

On peut aussi penser qu'un 8 ne reviendrait pas si rapidement sur sa décision en se laissant influencer par Charlie.

Identification avancée : Andrew est un 6 μ de sous-type sexuel ("Force-Beauté"). L'instinct de conservation est aussi visible.

Rien en commun : Cheryl Ann WayneCheryl Ann Wayne (Sela Ward) : 8

Cheryl arrive à l'hôtel où sont censés dîner David et son père. Comme elle va passer un coup de téléphone, elle se fait draguer par David qui prend, au sens figuré, "un coquard" :

  Cheryl : Il est 7 h 30.
  David : Oh, mon Dieu, dépêchons-nous. Bientôt ce sera la Renaissance, et on sera bien trop occupé à faire de la peinture.
  Cheryl : De quoi est-ce que vous parlez ?
  David : Non, c'est rien. C'était une réplique de film. Oubliez ça, ça a raté. C'est de Woody Allen, mais peut-être que ça vous impressionne pas.
  Cheryl : Non, pas du tout. [Sarcastique.] Mais c'est pas une catastrophe.

Quand on voit comment elle a préparé le dîner en se renseignant sur David et sur son agence, on peut même imaginer qu'elle a reconnu David et saisi cette occasion de le déstabiliser. En tout cas, elle le fera à table dans les minutes qui suivent : "Basner dirige le service « Conception et création ». Du talent mais un rien impulsif. C'est le genre à tout plaquer pour une petite minette."

À la sortie de l'entretien avec Andrew, David essaye d'attirer en vain l'attention du voiturier, alors que Cheryl, qui arrive juste derrière, n'a rien à faire pour qu'il s'occupe immédiatement d'elle :

  David : Je tente ma chance une dernière fois. En général, je ne mêle pas le boulot et le plaisir, mais là je dois faire une exception parce que je crains de le faire. [Il lui saisit le bras.] C'est joli ça.
  Cheryl : Basner, mettons les choses au point. Il y a un seul écueil qui peut être fatal pour une femme qui est dans le monde des affaires, c'est quand on l'accuse d'avoir gravi les échelons sur le dos, et je n'ai pas besoin de faire ça. Je suis diplômée de la Business School de Wharton et j'ai toutes sortes d'autres certificats. Entre nous, tout ira sur des roulettes si vous n'oubliez pas de rester de l'autre côté de la barricade. Si vous essayez de la franchir, eh bien, je serais capable de vous écraser les couilles à coups de bottes.
  David : Vous savez, moi aussi, j'ai étudié à Wharton.
  Cheryl : Vous mentez.
  David : Oui, oui, je mens. Pardonnez-moi. Ce n'est pas bien mais je me protège les couilles comme je suis persuadé qu'il vous est arrivé de devoir protéger les vôtres.
  Cheryl : Est-ce que vous insinuez que je suis un peu trop agressive ?
  David : Non. Enfin, non, pas pour une catcheuse.
  Voiturier : Votre voiture est là, Madame. [Cheryl lui donne un pourboire.] Merci.
  Cheryl : Venez, Basner.
  David : Je vous demande pardon.
  Cheryl : Laissez votre voiture ici et venez. Je vous raccompagne. [Elle se dirige vers sa voiture.] Où est-ce que vous habitez ?
  David : Les quartiers des imprimeurs à Deerborne.
  Cheryl : Ah oui, j'adore les faubourgs.

Menaces avec le langage vert des 8, manifestation de supériorité, Cheryl a posé immédiatement le cadre : c'est elle qui contrôle la relation. Elle récidive tout de suite après qu'ils aient eu des rapports sexuels. David découvre qu'elle est la fille d'Andrew. Comme elle n'en porte pas le nom, il la croit alors marié et s'inquiète des conséquences que cela peut avoir. Cheryl rétorque : "C'est moi qui ai choisi de venir, et c'est moi qui choisis de partir. Tu peux prendre ça comme tu voudras." David lui propose alors de rester un peu de temps avec lui, ce qu'elle refuse : "C'était gentil mais n'en faisons pas un grand opéra wagnérien. […] Tu n'es pas le genre à fricoter avec la fille du patron. Ça te coince." David prend acte de ce renversement des rôles traditionnels de l'homme et de la femme dans la séduction – le film date de 1986 ! – : "Séduit et abandonné."

Une fois l'accord conclu avec l'agence, c'est Cheryl qui pilote le projet du côté de Colonial Airlines. C'est elle qui choisit l'actrice qui jouera le rôle de la grand-mère dans le film publicitaire : "La troisième femme n'a pas du tout l'air d'une grand-mère, elle a l'air d'une putain." Une fois que Cheryl a retenu une candidate, les autres doivent se débrouiller, même si elle se révèle alcoolique et sourde : "Elle a le visage que Colonial Airlines souhaite. Alors on va se débrouiller pour que ça aille."

Si elle a "travaillé à mort" pour ce projet, elle manifeste tout autant la passion d'excès dans le domaine sexuel. En apparence, sa relation avec David se limite à cela, travail et sexe, même si, en réalité, elle s'implique plus qu'elle ne veut le laisser paraître. On le voit dans la scène où elle est au restaurant avec David et où Donna passe à vélo : la complicité entre eux est tellement évidente que le regard de Cheryl s'attriste. Bien évidemment, elle ne manifeste rien consciemment. Ce n'est que lorsque vient la fin des relations professionnelles avec David que Cheryl lui avoue l'intérêt qu'elle avait pour lui :

  Andrew : Renvoie-le. [Il sort.]
  Cheryl : Très jolie performance. Qu'est-ce que tu sais faire d'autre ? Brûler tes vaisseaux.
  David : T'as fait une plaisanterie, là ? C'est ça, hein ? Hein ? T'as fait un mot, sans doute un peu intello – bonjour Homère – mais plutôt rigolo. Cheryl Ann ! Réussir à plaisanter dans une telle situation, c'est le signe qu'on a le sens de l'humour. On nage dans la joie.
  Cheryl : J'ai travaillé à mort sur ce projet. Je croyais que je travaillais avec un professionnel.
  David : J'ai fait mon boulot. Je l'ai fait jusqu'au bout.
  Cheryl : Ah mais non, moi je vais à New York alors que toi, tu renonces. Je vois qu'on n'a pas les mêmes priorités.
  David : Ça me paraît évident et ça m'étonne au moins autant que toi. Je croyais qu'on était pareil.
  Cheryl : C'est bien ça qui me déçoit autant. On faisait une vraie équipe. J'étais impatiente de te retrouver chaque matin, de voir comment tu serais habillé. Je me demandais ce que tu allais dire, et les vacheries que tu allais me faire, et comment on s'arrangerait pour faire l'amour. Tous ces jours et ces semaines de travail épuisantes, tu en as fait une fête, et ça va me manquer parce que ça arrive rarement. Tu vas me manquer, David. Tu vas me manquer. [Fermement.] Tu es viré.

C'est la dernière apparition de Cheryl dans le film, et il est donc difficile de savoir pourquoi elle tombe le masque à ce moment-là. Vengeance en montrant à David ce qu'il a perdu ? Désir de se montrer à elle-même combien elle sait contrôler ses émotions et être forte ?

Identification avancée : Cheryl est un 8 α de sous-type sexuel. Les amateurs noteront ses tenues qui sont une belle illustration du style vestimentaire « Dramatique ».

Rien en commun : Charlie GargasCharlie Gargas (Hector Elizondo) : 9

Au retour de ses vacances aux Bahamas, David va directement à l'agence où doit se tenir une réunion concernant l'un de ses projets. Au lieu de s'y rendre, il passe de bureau en bureau pour rire et plaisanter avec chacun. Il y met tant d'enthousiasme que Donovan est obligé de sortir de la réunion pour lui dire de faire moins de bruit. Même quand sa secrétaire lui rappelle qu'on l'"attend dans la salle de conférences", il continue sa tournée. Elle est obligée de récidiver quelque temps plus tard :

  Jenny : N'oublie pas le meeting. Ils t'attendent.
  David : J'y vais, je pense qu'à ça.

Là-dessus, il ferme la porte du bureau et exprime son contentement en jouant avec ses baguettes de tambour. Quand il arrive enfin dans la salle, Charlie, de dos, se contente de montrer sa montre, et il ne lui reste plus qu'à clôturer la réunion. Quelques instants après, il se retrouve seul avec David et est tout aussi cool quand celui-ci lui fait comprendre qu'il veut devenir un des associés de l'agence :

  Charlie : David, je sais qu'il y a au moins deux autres agences qui t'ont fait des propositions. Tu les envoies sur les roses, ou je te fous par la fenêtre de ton beau bureau de rêve.
  David : Oh, Charlie, ils n'ont pas l'intention de me prendre comme partenaires, eux. Pourquoi je te lâcherais ?
  Charlie : Partenaire ? Boyle, Gargas, Lionel et Basner ?
  David : Comme John, Paul, George et Ringo.
  Charlie : Tu te mouches pas du pied.
  David : Non, disons que je suis plutôt capable.
  Charlie : Ah oui, oui, t'as le don de faire de jolis jingles de pub, mais c'est un commerce ici. On a besoin de nouveaux clients.
  David : Ah oui ? Alors, bouge pas.

Face à ce besoin de développer le business de l'agence, la signature du contrat avec la compagnie aérienne d'Andrew est particulièrement importante : "Note à l'attention de David Basner : la date de présentation d'une prémaquette de campagne pour la Colonial Airlines a été fixée. Toi et ton équipe, vous avez deux semaines pour faire dans le génie. N'oublie pas David, je veux ce budget. Signé John, Paul, George et Ringo."

Pourtant, on ne le voit guère s'impliquer dans la préparation et la concrétisation du contrat. À la fin du film, quand David s'est opposé violemment à Andrew mettant ainsi en péril l'accord avec Colonial Airlines, la réaction de Charlie est pleine d'acceptation :

  Charlie : Ça me désole de rentrer si tard. J'ai manqué le feu d'artifice. Tu sais que les habitants de Los Angeles se promènent avec des cheveux verts ? Je te jure, j'ai vu un mec qui les dessinait au pinceau. Des cheveux peints. Tu te rends compte ? Cette ville est démente.
  David : On a perdu le contrat ?
  Charlie : Non, j'ai calmé Woolridge mais je lui ai promis de te faire jeter, ligoté, à poil, du haut d'un avion, le châtiment habituel… J'ai appris à manœuvrer les clients, tu sais.
  David : Je veux bien te présenter des excuses, Charlie, mais à personne d'autre. Je t'avoue que les emmerdes de mon père, ça n'a pas été facile.
  Charlie : Bienvenue au club. Les derniers temps, j'avais mis mon père dans un foyer. C'était le meilleur qui existait. Cela dit, je le voyais pas souvent tellement je bossais mais on s'occupait bien de lui, et tout. Il sucrait un peu les fraises. Pas beaucoup. Bon, et puis un jour, je suis allé le voir, et il ne me reconnaissait plus. Il avait décroché. Il savait même plus que j'étais son fils.
  David : Ah oui, et moi qui te prenais pour le fils idéal, Charlie.
  Charlie : Non, non, non, le fils-miracle, il n'y en a eu qu'un dans l'histoire. [Il prend David par l'épaule.] Écoute David, fais ce que tu dois faire, compris. Je me charge de Woolridge.
  David : Merci.

On peut noter dans cet échange que Charlie aborde le sujet de manière brève et indirecte ("J'ai manqué le feu d'artifice."), puis passe immédiatement à autre chose. Quand David revient sur le sujet, Charlie met en avant ses talents de négociateur.

La même paisible acceptation se manifeste quand David décide de consacrer du temps à son père :

  Charlie : Quand est-ce que tu reviens travailler ? Tu as manqué ma séance de photo avec le crâne tout nu.
  David : J'en sais rien. J'en sais rien, Charlie. Heu… Pourquoi tu confies pas mes budgets à Ted Geller jusqu'à mon retour ?
  Charlie : Au bout de huit jours à faire le papa-sitter, tu vas devenir cinglé.
  David : Possible mais je… Je voudrais le connaître un peu et, j'en sais rien, apprendre peut-être à me connaître aussi.
  Charlie : Bonne chance, fils.
  David : Merci Charlie. Eh ! Donne pas ma belle fenêtre à quelqu'un d'autre.

Le reste du film nous montre Charlie surtout préoccupé par l'acquisition d'une moumoute destinée à masquer sa calvitie le temps d'une interview pour le magazine Âge de la pub. Il y a là bien entendu un souci d'image propre à son milieu professionnel, mais on peut y voir aussi la tendance du 9 sous stress égotique à s'occuper de détails au lieu de travailler sur l'essentiel qui est ici le contenu de l'interview et surtout le contrat avec Colonial Airlines.

Identification avancée : David est un 9 manifestant dans le film l'instinct social ("Participation périphérique").

Rien en commun : Donna Mildres MartinDonna Mildred Martin (Bess Armstrong) : 9

Donna fait du théâtre expérimental et donne des cours : "L'objet de ce travail corporel, c'est de libérer les mouvements spontanés, la parole, les bruits." Dans la première scène où nous la voyons, ses élèves doivent se comporter comme des amibes, et elle prend avec philosophie le fait que l'un d'entre eux passe son temps à bouquiner ("Tu ne te crèves pas trop, Bubba.") et que d'autres miment un acte sexuel :

  Donna : Zachary, Nancy, qu'est-ce que vous faites ?
  Zachary : Ben on fait des bébés amibes. Vous n'y connaissez rien !
  Donna : Je préférerais que ça reste asexuel comme exercice, si j'ose vous demander ça. Merci.

Donna est très positive, que ce soit à propos de ses cours, de l'obtention d'une petite subvention, ou du cadeau de trois fauteuils pour son théâtre ("C'est un début.").

Elle est amoureuse de David dont elle a été la petite amie au lycée et dont elle garde encore une photo sur sa cheminée. En bonne 9, elle fusionne avec lui au point de pouvoir terminer ses rationalisations en même temps que lui :

  Donna : Quelle surprise de te voir ici, ou ailleurs du reste !
  David : J'ai oublié quelque chose ?
  Donna : Tu avais promis que tu viendrais voir ma pièce, tu ne te rappelles pas ? Mais pourquoi est-ce que tu ne veux pas admettre que le théâtre expérimental t'ennuie ?
  David : Non, non, c'est pas vrai. J'adore ça. Moi aussi, j'expérimente un truc. je voulais voir si je saurais apprécier une soirée au théâtre…
  David et Donna
en chœur :
… sans être obligé de venir au théâtre.
  David : Tu me pardonnes ?

Bien entendu, il y a de la colère à n'être pour lui qu'une confidente, qu'"une sorte de pot de chambre émotionnel". Cette colère ne s'exprime que par des petites piques comme dans l'échange ci-dessus qu'elle termine en lui mettant un léger coup sur la tête avec son cahier de notes, ou dans cette remarque à ses élèves :

  Une élève : Miss Martin, c'est votre petit ami ?
  Donna : Oh, c'est une vieille flamme. On était à l'école ensemble. Regardez-le bien ici. Si vous voulez être tranquille plus tard, évitez ce genre-là.

Cela ne l'empêche pas d'être toujours disponible pour lui et de l'accepter inconditionnellement :

  David : Je t'ai pas dit le scénario que j'avais inventé. Voilà. Je m'en allais, je devenais très riche, je m'installais dans un grand manoir, et mes parents venaient me voir une seule fois et ils me disaient : « Oh, quelle jolie maison ! On t'aime beaucoup, David. » Je répondais : « Oh, je vous aime aussi. » Bon, alors, là-dessus, ils s'en allaient et ils mouraient.
  Donna : [Elle le regarde, silencieuse.]
  David : Ça veut dire que je suis dégueulasse ?
  Donna : Frank, le con que j'avais épousé, lui, c'était un vrai dégueulasse. Toi, tu es…
  David : [Il l'interrompt.] … infantile, immature, égoïste. Oui, je suis tout ça mais tu sais combien de fric ça rapporte de fonctionner comme ça dans sa tête ?
  Donna : [Elle le prend par la main.] Oui, je sais. Sur le plan financier, grandir, c'est une grave erreur.

Assuré de son soutien, David en abuse. Lorsqu'il est déprimé et épuisé par les incessantes demandes de ses parents, il débarque chez Donna à minuit, complètement ivre ("Juste une bière ou deux et peut-être deux ou trois scotchs"), alors qu'elle est couchée avec son amant. Pourtant elle le laisse entrer. David surgit même dans la chambre, demande à Robert s'il veut savoir "ce qui la fait sauter au plafond", puis lui révèle le deuxième prénom de Donna, Mildred. Donna, qui était allée pendant ce temps chercher son balai, se plante près du lit et dit à David : "Tu te rappelles de ma voix en colère ? Écoute ma voix en colère. Fous le camp. Fous le camp." Elle est consciente de la transformation du 9 quand la colère accumulée se déverse et, comme apparemment David en a déjà été la victime, elle tente de jouer sur cela pour l'arrêter. C'est peine perdue, et là, tout le monde en prend pour son grade : David reçoit quelques coups de balai, et Robert se voit sommé de "rengaine[r] [s]a psychanalyse de bazar".

Évidemment, cette fureur retombe en quelques instants. Donna s'excuse auprès de Robert et s'isole avec David : "Non, non, ne t'en va pas. Pardon. Je… Je… Laisse-moi avec lui une minute. Je t'en prie. Juste une minute, je te promets." Elle commence par lui rappeler le côté exceptionnel de sa colère : "Tu m'as entendu hurler ?" Puis elle exprime son désir d'une vraie relation, de préférence avec David ("Tous ces grandioses et joyeux souvenirs, c'est fabuleux", "Je t'ai assez attendu", "Être ton pote, ça pas question", "[Le peignoir rose] t'allait bien d'ailleurs"), et sa tristesse quand il ne réagit pas comme elle l'espérerait.

Quelques jours plus tard, elle passe à vélo devant le restaurant où David et Cheryl sont en train de déjeuner, et on voit bien que sa colère est totalement oubliée et son amour toujours aussi fort. Donna vient ensuite soutenir David à l'hôpital alors qu'il attend pendant l'opération de son père. Elle ira aussi rendre visite à Max plusieurs fois dans les jours qui suivront.

Quand enfin David est suffisamment mûr pour accepter de s'engager et pour s'avouer l'amour qu'il a pour elle, elle est là :

  David : Tu sais que tu es la seule petite amie que mes parents supportaient ?
  Donna : Dis plutôt que je suis la seule petite amie que tes parents aient vue de près.
  David : On est confortable. [Long silence. Il lui tend la main qu'elle prend.] Oui, très très confortable.
  Donna : [Long silence.] Je trouve aussi.

On peut apprécier l'emploi du mot « confortable » qu'on pourrait croire sorti directement d'un ouvrage sur l'ennéagramme.

Identification avancée : Donna est un 9 μ de sous-type sexuel ("Union").

Rien en commun : Lorraine BasnerLorraine Basner (Eva Marie Saint) : ?

Lorraine quitte Max après 36 ans de vie commune et 10 ans après que David ait quitté la maison. Pour pouvoir la typer, il nous manque deux informations cruciales. Pourquoi a-t-elle attendu tant de temps ? Qu'est qui l'a finalement décidé ? L'explication qu'elle donne à David est insuffisante pour comprendre vraiment son attitude :

  David : Alors, comme ça, après trente-six ans de mariage, tu fais tout d'un coup comme si rien n'avait jamais existé. C'est ça ton truc, maman ?
  Lorraine : C'est ça que ton père t'a dit ? Que je l'ai plaqué sans crier gare ?
  David : Non, il ne m'a rien dit, maman. On a juste cherché le ketchup tous les deux.
  Lorraine : Moi, je vais te dire ce qui s'est passé. Tu n'as aucune idée de ce que j'ai enduré après ton départ, David. Je n'avais personne, je parlais toute seule, et quand il rentrait à la maison, je continuais à parler toute seule. Je regardais son fauteuil et s'il était assis dedans, je savais qu'il était rentré. Tu veux savoir, je ne suis pas partie à cause des cris, je suis partie à cause du silence.
  David : Oui, d'accord, maman. Mais t'es pas obligée de raconter, tu sais.
  Lorraine : David, si tu savais tout le courage qu'il m'a fallu pour franchir cette porte.
  David : [Il se tait et la regarde avec gêne.]

La tentation est de penser à un ennéatype 9 qui se réveille d'un long, d'un très long sommeil. Le problème est que ce réveil devrait marquer une intégration et que Lorraine ne manifeste aucunement l'orientation d'acceptation et de soutien du 9. Elle est notamment d'un incroyable manque de tact. Par exemple, elle regarde avec une insistance gênante la perruque de Charlie :

  Charlie : [Il se tourne vers Lorraine.] Il y a un problème ?
  David : Non, non, il n'y a aucun problème. [Pendant ce temps-là, Lorraine se touche les cheveux !]
  Charlie : Je sens des regards.
  David : Non, non, tu sens rien du tout.
  Charlie : OK, j'ai ma leçon d'Aïkido. Je file. Excusez-moi. [Il s'en va.]
  Lorraine : [En pouffant] Oh ! Elle est affreuse cette moumoute. Tu crois qu'il le sait ?
  David : Maintenant, oui.

Ou bien Lorraine dit à David qui lui fait cadeau d'un chiot : "Enfin quelqu'un à aimer !"

Elle refuse toute part de responsabilité dans l'échec de son couple avec Max :

  Max : [En colère.] Lorraine, rigoler, toi, ça te faisait peur.
  Lorraine : [Elle pleure.] Mais pourquoi tu m'as pas appris ?
  Max : J'ai essayé. J'ai essayé, essayé des milliards de fois, bordel !
  Lorraine : Non ! Juste une fois ou deux, puis tu as lâché, tu m'as abandonnée.
  Max : Et toi ? Tu t'es donné du mal ?

Quand David lui annonce l'hospitalisation de Max et la gravité de son état, elle réplique : "Mais est-ce ma faute s'il n'a rien voulu faire ? […] Mais c'est pas ma faute."

Lorraine est relationnelle : "C'est merveilleux. Les gens me parlent, et en plus je suis payée.", dit-elle à David en lui annonçant qu'elle est embauchée dans une compagnie d'assurances. Jenny va lui apprendre à taper à la machine : "C'est si agréable d'avoir un fils dont la secrétaire est une copine."

Elle manifeste assez peu d'émotions, voire est mal à l'aise avec elles, ce qui ne l'empêche d'essayer de manipuler émotionnellement David, comme ici au pub :

  David : Pourquoi est-ce qu'on m'a dit que tu étais en larmes et que tu me cherchais ?
  Lorraine : Ed Bedsole [un médecin qu'elle a rencontré au cours de yoga] m'a embrassé et… Ça m'a affolé.
  David : Oh, mais qu'est-ce que ça avait d'affolant ?
  Lorraine : Je ne savais pas comment répondre. En fait, je ne sais pas si j'ai trouvé ça agréable ou dégoûtant. Il y a bien longtemps que ça ne m'était pas arrivé. Ton père ne m'embrassait plus depuis des années. Il n'y avait plus rien. Depuis 30 ans, il n'y avait plus rien, ni amour, ni même désir. Plus rien. Le désert.
  David : Est-ce qu'il est parti ? Il était à la maison.
  Lorraine : Pour dîner, et dormir, et aller aux toilettes. Il me trompait. Ça, tout le monde le savait. C'était humiliant pour moi. Ça t'étonne ?
  David : Mais tu ne disais rien. Il fallait me parler de toutes ces choses, maman.
  Lorraine : Tu n'étais qu'un gamin. Tu me racontais tes petites histoires enfantines, et puis voilà, tu te sauvais. Et puis tu es parti. Bon, ensuite, tu ne revenais pas très souvent. Ah si, pour Noël… Et un petit bouquet pour mon anniversaire.
  David : Des roses baccarat.
  Lorraine : Et un coup de téléphone pour la fête des Mères.
  David : Une fois, je t'ai appelé de Tahiti. [Long silence.] Je suis ici maintenant.
  Lorraine : Oui, tu es ici, je sais. J'ai enfin l'occasion de te parler, mais ça m'embarrasse. [Elle pleure.] Ce n'est pas le genre de choses dont une mère devrait discuter avec son fils. [Elle se lève, s'approche de lui, et le prend par le bras.] J'aurais voulu être une bonne mère, David.
  David : T'étais très bien.
  Lorraine : Non, non, j'aurais pu être mieux. [Elle pleure.] J'ai été une mauvaise mère. Je voulais faire plus pour toi, David.

Ou dans cette dernière scène entre eux :

  Lorraine : Moi, je ne reviendrai pas. Ton père pourrait ne pas s'en remettre, David. Il va avoir besoin de soin, de présence. Tu peux t'en charger ? Moi, non. Parce qu'entre nous, c'est… C'est impossible. Il n'y a plus rien à faire.
  David : Je sais, maman.
  Lorraine : Est-ce que tu me détestes ?
  David : Non. [Il se lève et l'étreint.] Comment est-ce que je te détesterais ? T'es ma maman.
  Lorraine : Appelle-moi. [Elle l'embrasse sur la joue et s'en va.]
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