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Horizons lointains
Analyse

Joseph Donelly (Tom Cruise) : 3

Dès le début du film, Joseph manifeste deux caractéristiques fondamentales du 3, le désir de réussite sociale et la volonté de l’obtenir par le travail :

  Un des frères : Le pauvre chéri, il se tue au travail.
  Joseph : J’ai un peu plus d’ambition que vous.

Cette ambition est concrète, et il est convaincu qu’il a l’énergie pour la faire aboutir :

  Son père : Les rêves, mon fils, dans ce pauvre recoin du monde, ils finissent au fond d’un verre de bière.
  Joseph : Non, pas les miens, Papa.

Quand la réussite est là, l’important est qu’elle soit vue et reconnue. Après sa première nuit de combats de boxe, une danseuse de cabaret le ramène, dans un état physique assez pitoyable, dans la chambre qu’il partage avec Shannon. Avant de s’effondrer, il n’a que deux choses à dire. À la danseuse : "J’ai été pas mal ce soir, hein ?" Et à Shannon : "Fallait les entendre applaudir. Ils n’arrêtaient pas. C’était grandiose. Grandiose."

Dès qu’il a un peu d’argent, il s’habille "comme un milord" et commence une invraisemblable collection de chapeaux qui, selon lui, doivent démontrer son nouveau statut. Un jour qu’il vient d’en acheter un nouveau, il croise Shannon dans la rue et demande : "Alors, qu’est-ce que vous en dites ? Élégant ? Ça vous plaît ?" Plus tard dans la journée, il se dispute violemment avec Shannon et il cherche à prendre le dessus. Il la précipite dans la baignoire et exige : "Dites-moi que mon chapeau est joli.", "Dites-le. Dites-moi que vous aimez mon chapeau.", et encore "Dites-le. Cela vous est si difficile, Shannon. C’est si dur de dire que vous aimez mon chapeau ou que vous aimez mon costume. Je l’ai gagné. Je l’ai mérité."

Bien évidemment, ce qu’il voudrait, c’est qu’elle avoue qu’elle l’aime. Mais en bon 3, Joseph réprime le centre émotionnel et il lui est impossible de le déclarer ainsi. Il ne peut prouver son amour que par ses réalisations : "J’ai essayé de te montrer ce que j’étais capable de faire." À la fin du film, quand il se pense sur le point de mourir, il ne peut toujours pas assumer cette émotion et dire "je" : Tout ce que je sais, c’est que Joseph aime Shannon." [Nous reviendrons sur cette difficulté du 3 à être en contact avec ses sentiments dans la description du personnage de Shannon.]

Joseph s’identifie totalement à ce qu’il fait et à ce qu’il réussit, oubliant ce qu’il a pu vivre et affirmer dans le passé. Ainsi, il peut sincèrement jurer au début du film qu’il restera en Irlande, sa patrie, jusqu’à la mort et dès la fin de sa première journée aux États-Unis, être convaincu que : "C’était peut-être ma destinée."

Identification avancée : Joseph est un 3 de sous-type conservation ("Sécurité") à aile 2.

Shannon Christie (Nicole Kidman) : 8

Shannon montre d’entrée de jeu la force, l’énergie et le courage du 8. Dans l’écurie, quand elle perçoit à un bruit la présence de Joseph, alors qu’elle pourrait s’enfuir, elle attaque… à la fourche : "Au moindre battement de cils, je vous embroche, je vous transperce." Et elle le fait. À la fin du film, elle affirme : "Ça ne me fait pas peur un peu de danger de temps en temps." Shannon se moque des conventions sociales. En cette fin du XIXe siècle, elle n’hésite pas à jurer ou à regarder Joseph nu.

Elle aime dire "Non !" et ne s’en prive pas, que ça soit à sa mère lui demandant de jouer du piano ou à Joseph essayant de lui faire dire qu’elle aime son chapeau. Elle ne cède pas à l’intimidation. Quand elle est forcée de jouer du piano, elle joue du jazz au grand scandale de sa mère et de ses amis. Elle n’hésite pas à agresser le contremaître de l’usine de préparation de poulet dans laquelle elle travaille à Boston : "Ne me touchez pas avec vos sales pattes." Comme il lui retire un jour de salaire à chaque insulte, elle le met en déroute en concluant : "Retenez aussi vendredi pendant que vous y êtes, espèce de sale petit têtard abject." Pour la décrire à ses amis, Joseph dit qu’"elle mord".

Elle connaît les points faibles des gens et n’hésite pas à s’en servir. Elle dit à Joseph : "Je vous ai sauvé la peau. Souvenez-vous en." Elle repère très vite son besoin de reconnaissance et joue à l’exaspérer. Quand il lui demande si son chapeau est joli, elle répond du tac au tac : "Pas du tout." Elle lui dit sans ménagements que les gens qui le font boxer l’utilisent et n’ont aucune considération pour lui. Elle connaît son admiration pour elle et s’en sert pour le pousser à bout ; alors qu’ils sont couchés, elle dans le lit et lui par terre, elle le rappelle :

  Shannon : Joseph. Est-ce que vous me trouvez jolie ?
  Joseph : Je n’ai jamais rien vu d’aussi joli depuis que je suis venu au monde.
  Shannon : [Victorieuse, elle prend un ton indifférent] Bon. [Elle se recouche sans un mot de plus.]

En tant que 8, Shannon réprime le centre émotionnel comme le fait Joseph un 3. Cela ne leur facilite pas la tâche quand ils doivent s’avouer leurs sentiments. Quand, transis et affamés, ils pénètrent par effraction dans la maison où ils découvrent un bon repas préparé, ils en sont réduits à faire semblant :

  Joseph : Shannon, asseyez-vous à cette table de fête. […] Je veux que vous fassiez semblant. Asseyez-vous là. Je vais vous servir. Je vous invite à un festin.
  Shannon : Non, Joseph, ne me servez pas. Asseyez-vous. Asseyez-vous près de moi. Imaginons que cette maison soit la nôtre. Vous seriez mon mari, et moi votre femme. Asseyez-vous.

Même alors, ils ne peuvent évoquer leur amour. Métaphore pathétique, ils parlent de leurs projets de terre en Oklahoma.

  Shannon : Un vert pâturage et une rivière, c’est complémentaire, vous ne croyez pas ?
  Joseph : C’est vrai. En fait, si on réfléchit, l’un ne va pas sans l’autre.

Et comme cela reste toujours impossible, ils reviennent au jeu du "comme si" :

  Shannon : Faites semblant de m’aimer.
  Joseph : Je fais semblant de vous aimer.
  Shannon : Je fais semblant de vous aimer aussi.

À la fin du film, quand elle Joseph croit mourant, les mots ne peuvent toujours pas sortir. Ce n’est que lorsqu’elle le pense mort qu’elle dit : "Je t’aime. Je t’aime depuis le premier jour où je t’ai vue." Enfin.

Nora Christie (Barbara Babcock) : 1

Nora Christie sait en permanence comment il faut se conduire, que ce soit seule ou en présence du monde. Quand Shannon entre en galopant dans la cour déserte de leur château, elle la rappelle à l’ordre : "De la dignité ! De la dignité ! Une dame n’oublie jamais les usages." D’ailleurs, il n’est pas question de déboutonner un col qui serre, car "mieux vaut s’étouffer que d’être vulgaire". Elle ne fréquente que des "modèles de bienséance". Elle surveille la quantité d’alcool bue par son mari et le réprimande à ce propos à la moindre occasion. Elle n’a pas d’humour, et Daniel la trouve "lugubre".

Elle fait son devoir. Elle soigne Joseph blessé par sa fille, mais c’est pour mieux le faire pendre après. Elle est horriblement mal à l’aise quand elle et Daniel trichent pour acquérir une terre en Oklahoma.

Partie à Boston à la recherche de sa fille, elle y découvre l’enfer : "Aucun ordre ne règne dans ce pays barbare."

C’est une femme énergique et de décision. C’est elle qui gère la maison devant la faiblesse de Daniel. Elle est à l’origine du départ en Amérique de la famille à la recherche de Shannon. Cette expérience aide d’ailleurs à son intégration ; on la sent à la fin prête à suivre le conseil de son mari : "Fais comme si on démarrait dans la vie."

Identification avancée : Nora est un 1 de sous-type social ("Inadaptation").

Daniel Christie (Robert Prosky) : 7

Dès qu’on découvre le baron Christie, c’est dans un pub où il déclare son besoin de gaieté et d’aventures…

  Les clients : Comment vous sentez-vous ce soir ?
  Daniel : Je me sens oppressé. C’est le seul mot qui convienne. Je vis dans une maison étouffante et lugubre, et pis encore, j’ai une femme qui veut m’empêcher de boire. J’ai soif d’aventures et si j’avais des ailes, je volerais jusqu’aux étoiles. […] Je donnerais tout ce que j’ai pour quinze petites minutes de liberté.

Il repère alors Joseph et n’a qu’une chose à lui dire : "De l’entrain, mon gars ! Tu es trop jeune pour ruminer dans ta bière."

En fait, ses désirs de liberté, on sait tout de suite qu’il ne tient pas à faire un effort pour les réaliser. Il le sait aussi : "Salut, âmes des trépassés ! Quelle déception immense je dois être pour vous tous", clame-t-il en rentrant ivre chez lui.

Sa paresse à agir ne l’empêche pas d’être un brave type. Il comprend bien que Joseph ait voulu le tuer après la mort de son père et l’incendie de sa ferme. Il veut l’assister pendant le duel : "J’ai demandé à te servir de témoin dans cette boucherie." Mais avant, il s’inquiète de savoir s’il a "bien mangé". Bien évidemment, il ne fait rien pour que le duel n’ait pas lieu.

Au contraire de Nora, il adore l’Oklahoma et retrouve une certaine capacité à agir, à s’enthousiasmer et à aimer : "Je me sens dans mon élément au Far-West. Qui sait ce dont je suis capable ?"

Il monte un plan puéril pour acquérir par tricherie un bout de terre et force Nora à le mettre en œuvre avec lui.

Identification avancée : Daniel est un 7 de sous-type conservation ("Clan").

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description du film